Dossier réalisé par le secteur cheminot du NPAUne réforme vers la privatisationEn 1997, s’appuyant sur une directive européenne qui préconisait des comptes séparés entre l’exploitation du réseau et l’entretien de celui-ci, le gouvernement de la « gauche plurielle » et son ministre des Transports Gayssot (PCF) décidèrent de séparer totalement les infrastructures (les voies) du reste de la SNCF...
C’était la création de Réseau Ferré de France (RFF). Cela a été conçu pour préparer la libéralisation du trafic ferroviaire et a mis un terme au monopole public de la SNCF sur le réseau. Depuis, des entreprises privées, ou appartenant à un autre réseau européen, peuvent faire rouler un train entre Lille et Marseille en en faisant la demande auprès de RFF et en s’acquittant d’un péage. La combativité des cheminotEs, notamment lors de la grande grève de novembre-décembre 1995, a empêché le gouvernement d’aller à la vitesse qu’il souhaitait. Pourtant, les cheminotEs ont connu de nombreuses réorganisations ces 15 dernières années. D’une part, la direction de la SNCF a imposé des économies massives, notamment avec la suppression de milliers de postes (20 000 en 10 ans !). D’autre part, elle a mis en place un découpage de la SNCF par activités et par régions, quasiment à l’image de ce qui se pratiquait avant la création de la SNCF en1937... Elle s’est efforcée de transformer chaque activité en une entité bien délimitée, avec un budget séparé et une quasi-obligation de faire des bénéfices. Bref, en séparant ce qui pouvait être rentable de ce qui ne l’était pas, elle a tout préparé pour une privatisation morceau par morceau...
Le PS veut finir son sale boulotAujourd’hui, sous couvert de réunification de la SNCF et de RFF, le gouvernement cherche à éclater l’entreprise en trois ! En effet, le tour de passe-passe consisterait à intégrer RFF au sein d’un Établissement public à caractère industriel et commercial, SNCF Réseau, dans lequel seraient intégrés les postes d’aiguillages ainsi que l’Équipement, en charge de l’entretien du réseau. En un mot les activités non rentables et coûteuses. Une seconde entreprise, SNCF Mobilités, serait constituée par les activités commerciales. Enfin, une troisième, la direction, serait là pour chapeauter le tout. On voit bien le danger : privatisations des profits et socialisation des pertes ! Une recette chère aux capitalistes. Les droits sociaux des cheminots sont considérés comme un obstacle pour finaliser ce dessein. Le projet d’« harmonisation du cadre social » voudrait aligner, par le bas, les conditions de travail des plus de 150 000 cheminotEs sur celles des 3 000 cheminotEs du privé. Aujourd’hui, le Parti socialiste voudrait donc achever ce qu’il a commencé en 1997. Si ce projet de loi venait à aboutir, il s’agirait d’une régression historique, du point de vue de l’organisation du réseau comme du point de vue des conditions de vie des cheminotEs : perte de 10 jours de repos par an, etc. C’est pourquoi les cheminotEs se battent pour la réunification de tous les secteurs du ferroviaire (public, privé, filiales, sous-traitance) dans une seule et même structure qui en aurait le monopole public, la SNCF, et pour l’harmonisation des conditions de travail des travailleurs du rail, mais en les alignant sur celles des cheminots de la SNCF. De la colère au quotidien à la grève nationaleRFF, EPIC, RH0077... Autant de sigles barbares inventés par les crânes d’œuf de la direction de la SNCF qui aujourd’hui soufflent à l’oreille des journalistes que les raisons de cette grève sont incompréhensibles !
Une stratégie, car derrière une réforme d’apparence technocratique, se cachent les problèmes quotidiens des cheminotEs. Il suffit de se rendre dans une AG de grévistes pour comprendre à quel point ces problèmes sont aigus. Il y a d’abord les bas salaires. Au commercial ou à l’entretien des voies, on commence à peine au SMIC. Les primes sont à la tête du client. Sans parler des suppressions de postes : encore 2 500 cette année. Et les restructurations sont permanentes pour adapter les rythmes de travail à l’hémorragie des effectifs. Écoutez un cheminotE gréviste expliquer qu’il ne veut pas perdre dix repos par an, alors que les plannings de travail sont déjà complètement déstructurants, ou un conducteurE de banlieue raconter qu’il doit déjà faire jusqu’à 117 arrêts dans une journée de travail, mais que le gouvernement et le patronat du ferroviaire prévoient d’augmenter les amplitudes de ses journées jusqu’à 14 heures pour qu’il fasse la pointe du matin et la pointe du soir ! Ceux de l’aiguillage, de la maintenance et de l’entretien des voies en témoignent tous les jours devant leurs camarades : moins ils sont dans leurs services et plus la sécurité en pâtit. Avec tous en tête l’accident de Brétigny-sur-Orge de juillet dernier...
« Coagulation des mécontentements »La colère accumulée jusque-là s’exprime dans la grève, en particulier contre ce gouvernement détesté dont la réforme ne peut qu’être un sale coup qui s’ajoute à tous les autres. Même celles et ceux qui ne l’ont pas lue en détail en sont persuadés... Voilà au moins un point commun évident entre les cheminotEs et les classes populaires de ce pays : la rage contre Hollande ! Mais c’est loin d’être le seul. Car lorsque les grévistes expliquent la politique que la SNCF leur fait subir depuis des années, dont la réforme n’est que l’aboutissement, tous les travailleurs peuvent s’y reconnaître. D’ici à ce qu’ils se reconnaissent dans la lutte des cheminotEs, il n’y a qu’un pas... qui hante les nuits de nos chers ministres socialistes ! La « coagulation des mécontentements » les effraie... Mais elle effraie aussi les états-majors syndicaux qui, le jour du déclenchement de la grève, se sont rués chez le ministre pour négocier des amendements à la réforme. Une façon d’imposer un rythme au mouvement qui serait calqué sur celui de ces tractations sans fin et sans intérêt, alors que de nombreuses AG ont voté à l’unanimité le retrait pur et simple du projet de loi. Une façon aussi de ne surtout pas parler des problèmes concrets que soulèvent les cheminotEs dans cette grève et qui pourraient servir de base à une plateforme de revendications pour tous les travailleurs. Qu’on se le dise à Air France, à La Poste, chez les intermittentEs, dans les hôpitaux, partout, dans le privé comme dans le public, les cheminotEs exigent bien le retrait de la réforme pour faire reculer le gouvernement, mais aussi l’arrêt des suppressions de postes, l’embauche au même statut des précaires et des travailleurEs du rail privé, des filiales et des sous-traitants, et des augmentations de salaires. Un bon programme pour une lutte d’ensemble !Pour gagner, plusieurs défis à releverLes cheminotEs ont commencé la grève il y a plus d’une semaine, et certaines questions de fond deviennent des enjeux décisifs pour la lutte.
Regrouper les forcesLa réforme ferroviaire s’attaque à tous les cheminotEs, quel que soit leur métier. Dans de nombreux dépôts et gares, les grévistes se réunissent et décident de la poursuite de la grève dans des assemblées générales par métier. Ces cadres de discussion permettent de discuter de revendications qui touchent les grévistes dans leur boulot quotidien, mais ils maintiennent aussi une séparation voulue par l’employeur. Cela arrange bien la direction qu’on ne se mélange pas entre conducteurs et commerciaux, entre roulants et sédentaires, parce que quand on commence à se mélanger et à échanger sur nos problèmes, on se rend vite compte que ce sont les mêmes : le sous-effectif, les suppressions de postes, le management agressif... Comme c’est déjà le cas dans certaines gares, les grévistes ont tout intérêt à se réunir en AG interservices, à faire tomber les barrières ! Dans les nombreuses manifestations de ces derniers jours, les cheminotEs grévistes se divisent le plus souvent en cortèges syndicaux... Cela alors qu’ils mènent pourtant la grève tous ensemble (syndiqués et non-syndiqués, tous syndicats confondus), tiennent les piquets de grève ensemble, se réunissent en AG ensemble... C’est pourquoi, dans certaines gares, les grévistes ont décidé de manifester tous ensemble, dans des cortèges unitaires qui regroupent tous les grévistes de la gare. Le meilleur moyen de pousser l’unité jusqu’au bout !
Pour une grève active et démocratiqueAprès plusieurs jours de grève, les états-majors syndicaux hésitent à poursuivre la grève jusqu’à satisfaction des revendications (avec le risque de se faire déborder par le mouvement), et sont fortement tentés d’aller négocier dès maintenant des amendements au projet de loi actuel, avec le risque de se heurter à leur base mobilisée. Le seul facteur qui peut faire pencher la balance du bon côté, c’est la force et la détermination des grévistes eux-mêmes ! En effet, si les grévistes sont passifs et laissent toute l’initiative aux directions syndicales, alors ces dernières décideront en fonction de leurs propres intérêts d’appareil, et non en fonction de l’intérêt des grévistes. C’est d’ailleurs ce que le gouvernement essaie d’encourager, on le voit déjà, en proposant notamment dans les négociations de leur accorder plus de permanents syndicaux... C’est pourquoi les grévistes doivent s’organiser pour contrôler la lutte eux-mêmes. Cela passe tout d’abord par des assemblées générales souveraines, qui discutent et votent sur les revendications de la lutte, les moyens d’action... et ne laissent pas les décisions importantes entre les mains des directions syndicales. Dans certaines gares, les grévistes se sont aussi dotés d’un journal quotidien de la grève, écrit par les grévistes eux-mêmes, ce qui leur permet de décider eux-mêmes des messages qu’ils font passer. Très rapidement, il y a un enjeu à ce que les grévistes de différentes gares puissent se coordonner : pour savoir par eux-mêmes ce qui se passe ailleurs, échanger les bonnes idées des uns et des autres, monter des actions communes... Enfin, le contrôle démocratique des grévistes sur leur mouvement passe aussi par la mise en place de structures où les grévistes élisent, parmi eux, celles et ceux en qui ils ont confiance pour animer la grève, qui seront sous le contrôle de l’AG (qu’on appelle cela « comité de grève » ou autre). Solidaires de la grève, la renforcer !Le décalage entre ce que l’on entend dans les médias et le vécu des cheminotEs est assez frappant. En effet, selon les médias, les cheminotEs seraient des égoïstes hors normes, prêts à faire louper le bac à toute une génération, doublés d’abrutis finis qui n’auraient rien compris à une « bonne réforme ».
Un peu plus et les « clients » de la SNCF (qui redeviennent des « usagers » pendant les grèves) seraient prêts à attraper le premier gréviste venu pour l’attacher sur les rails. Heureusement, peu de trains roulent !Pourtant, les grévistes qui rencontrent quotidiennement les usagers dans les gares, lors de diffusions de tracts par exemple, se rendent compte que la réalité est tout autre. Le mouvement rencontre en effet une sympathie certaine et plus importante que lors des précédentes mobilisations. Nombreux sont ceux qui disent comprendre la grève des cheminotEs, même si bien sûr ils rencontrent aussi les « habituels » usagerEs en colère, excédés par les longues heures d’attente. Les usagerEs, qui sont aussi des travailleurEs, savent que l’on n’a déjà que trop reculé sur les droits sociaux ou les services publics en France ces dernières années. Sans compter que la coupe est pleine vis-à-vis du gouvernement Hollande… Bref, bon nombre pensent que les cheminots ont raison de ne pas se laisser faire.
Comment aider ?Aider les grévistes est une nécessité : c’est faire la démonstration auprès des cheminotEs qu’ils ne sont pas seuls et qu’ils sont même soutenus par une partie de la population. De fait, être solidaire de la grève, c’est la renforcer. Pour ce faire, il y a plusieurs possibilités : diffuser des tracts de soutien à la grève auprès des voyageurs, prendre contact avec les cheminotEs qui ont souvent un tract spécialement conçu pour les usagerEs et leur proposer de le distribuer avec eux, organiser des rassemblements aux abords des gares, créer des collectifs d’usagers solidaires… On peut aussi faire adopter des motions de soutien à la grève sur son lieu de travail, sa fac, son lycée ou dans son syndicat. On peut organiser des collectes que l’on remet ensuite aux assemblées générales et qui peuvent servir pour l’organisation quotidienne de la grève (peinture pour les banderoles, charbon pour le barbecue, etc.). Enfin, on peut bien entendu se servir du matériel conçu par le NPA (1) : organiser des distributions du tract du NPA en soutien à la grève, coller l’affiche spécialement conçue pour la grève, et aider l’intervention des cheminotEs du NPA en distribuant le bulletin « Les cheminotEs anticapitalistes ». Toutes ces actions, ne serait-ce que de passer dire un mot d’encouragement dans les gares, renforce l’action des grévistes. Il faut aller discuter, y compris avec celles et ceux qui travaillent. Cela reste utile : nombreux sont ceux qui font la grève, ne serait-ce qu’une heure par jour, et ceux qui hésitent peuvent « basculer » grâce au soutien extérieur. Enfin, restent au travail les petits chefs qui se sentiront encore un peu plus idiots de remplacer les grévistes qui se battent aussi pour eux ! 1 – Disponible sur le site national : www.npa2009.orgLes usagers des médias pris en otage par les éditocratesPlus de 10 ans après sa première publication, notre « lexique pour temps de grèves et de manifestations » est plus que jamais d’actualité. « Prises d’otage », « galère des usagers », « grogne syndicale », etc. La grève des cheminots, entamée mardi soir, signe le grand retour de la langue automatique d’un journalisme officiel plus ou moins ouvertement hostile aux mouvements sociaux.
«L’opposition entre les lycéens qui vont passer le bac et les terribles grévistes qui les en empêcheraient, l’opposition entre les usagers et les grévistes, c’est une thématique idéologique de droite » note Claude Askolovitch, dans son éditorial du 14 juin sur I-télé. Et de conclure, sans que l’on sache s’il ironise ou s’il s’en félicite vraiment : « Voir les socialistes faire du Figaro, c’est nouveau, donc c’est intéressant ». Mais si le gouvernement a « parlé à droite » comme semble s’en réjouir Askolovitch, une partie des médias n’a pas manqué de lui emboîter le pas. À commencer par le Monde, qui titre sobrement son éditorial du 13 juin : « SNCF : il faut savoir arrêter une grève ». Le « journal de référence », devenu journal officiel, reprend à son compte l’injonction du gouvernement. « “Compromis”, “intérêts de tous” : voilà des mots que les grévistes n’entendent pas. » L’éditorialiste du Monde, en manque d’inspiration, a-t-il pioché dans notre « lexique » pour rédiger son éditorial, cousu de la langue automatique du journalisme brise-grève ? « Il y a dans ce mouvement de grève une grande irresponsabilité de la part de syndicats qui accréditent l’idée que, décidément, ils préfèrent le conservatisme à la réforme. » Le Monde rabroue les syndicalistes qui « n’obtiendront rien », vont « perdre la bataille » et dont la grève est injustifiée car elle « perturbe la vie quotidienne des usagers », « menace le bac » mais surtout, parce qu’elle est « illisible » pour l’opinion publique. Tellement « illisible » que le Monde ne daigne dire un mot du contenu de la réforme ni des revendications des grévistes. Comme un écho ironique à l’éditorial de la chefferie du Monde, le blog des « décodeurs » sur lemonde.fr publie un article le même jour : « Mais au fait, pourquoi la SNCF fait grève ? » Bonne question, à laquelle le lecteur trouvera des éléments de réponse plus factuels que la charge anti-syndicale de la Une du quotidien papier. On y apprend, entre autres, que la « menace sur le bac » brandie par le gouvernement et le Monde est à relativiser ; ou encore que les deux syndicats (CGT-Cheminots et Sud-Rail) qui appellent à la continuation de la grève représentent une majorité des salariés – même si l’article met en avant les « fractures » et luttes internes syndicales. Le Monde fait-il du Figaro ? Ni une, ni deux, ce dernier – qui consacre une double page à la « galère des usagers » – monte le ton : la France « se déglingue », elle n’est « plus capable d’assurer correctement la tenue des épreuves du baccalauréat » à cause de « quelques cheminots syndiqués », peste l’éditorialiste Yves Thréard. Des privilégiés nuisibles qui bloquent la France « pour un oui ou pour un non », pour des motifs « inacceptables ». Le Parisien n’est pas en reste (...) « C’est parti pour une journée de galère pour les usagers de la SNCF » commente en vidéo sur leparisien.fr l’éditorialiste du quotidien, raccord avec la ligne éditoriale de l’édition papier. Avec, à la clé, une « question du jour » qui annonce la couleur : « SNCF : Faut-il limiter le droit de grève ? » Dans le même registre, le Figaro va plus loin : « Faut-il interdire le droit de grève dans les transports publics ? » interroge le quotidien conservateur sur son site.Impossible de poursuivre ce bref tour d’horizon de la presse nationale sans évoquer les tauliers de l’Express et du Point, qui n’ont pas manqué de tirer à boulets rouges sur les cheminots. Leur grève évoque à Franz-Olivier Giesbert une France « toujours à cran, éruptive, plombée par les boulets des corporatismes ». L’éditorialiste du Point, jamais avare de métaphores douteuses (1), en tire une conclusion aux subtils accents totalitaires : « n’est-il pas temps d’essayer de guérir la France sans lui demander son avis, quitte à la brutaliser un peu ? » Dans un de ses désormais célèbres éditoriaux vidéo, Christophe Barbier décerne quant à lui un « carton rouge » aux grévistes de la SNCF (entre autres). Selon lui, « le recours à la grève n’est pas une bonne formule », cela fait d’eux des « preneurs d’otages » et incite « à certaines violences ». Notons que Libération ne se mêle pas à ce concert de dénonciations de la grève des cheminots. En fait le conflit social est tout simplement absent de la Une du quotidien, comme des billets des éditorialistes qui lui préfèrent l’actualité irakienne et la Coupe du monde de football. Le son de cloche n’est pas si différent chez les chroniqueurs à la télévision ou à la radio. Arlette Chabot, sur LCI, peine à comprendre la raison pour laquelle les syndicalistes luttent contre une réforme qu’ils ont voulus, et ce malgré les concessions du gouvernement. La continuation de la grève relèverait d’une « surenchère » due à la « division syndicale ». Pédagogue mais intraitable, Nicolas Doze douche les espérances des manifestants sur BFM-TV : la réunification de la SNCF ? Impossible, à cause de l’Europe. Le maintien du statut des cheminots ? Impossible, dans le nouveau cadre européen. Éponger la dette de l’entreprise, en grande partie le résultat des investissements dans les lignes à grande vitesse ? Impossible : ce serait l’équivalent d’une subvention publique, interdite… par Bruxelles. La chronique de politique de France info consiste, quant à elle, en une longue exégèse de ce que dit et pense « l’exécutif ». Quelques exemples :– « Le modèle de la crise sociale version 1995 ne peut s’appliquer à ce mouvement. Aujourd’hui, le gouvernement parie sur le fait que cette grève n’est pas comprise, et par conséquent, qu’elle n’est pas populaire. » – « L’exécutif ne semble pas ressentir les prémices d’une crise sociale. Comme s’il était convaincu qu’il s’agissait d’une simple crispation de la CGT, débordée par sa base »– « Lundi, ce ne sont pas des salariés au pouvoir d’achat en berne qui seront pénalisés, mais leurs enfants ou leurs proches, des lycéens qui vont passer leur bac. Le distinguo devrait peser dans les AG ce week-end. C’est ce que veut croire, et espérer, l’exécutif. » Laissons à Claude Askolovitch, que nous citons en ouverture de cet article, le mot de la fin (ou presque). Avec cette hypothèse lumineuse : « au fond, si le gouvernement de gauche emploie le « vocabulaire idéologique » de l’adversaire – en jouant les usagers contre les grévistes – n’est-ce pas que « peut-être, tout simplement, la réalité est-elle de droite » ? Askolovitch se rend-il compte qu’associer aussi nettement l’opposition des usagers et des grévistes au « vocabulaire idéologique » de la droite revient à conclure que, pour le paraphraser, la majorité des grands médias « parlent à droite » ? Peut-être. Après tout, qu’est-ce que cela aurait de si étrange, puisqu’il semble penser que « la réalité est de droite » ? Le problème qui demeure, et qui est un problème démocratique, c’est que ce constat soit apparemment partagé, consciemment ou non, par une majorité d’éditorialistes, de chroniqueurs et de chefferies éditoriales… Le traitement médiatique de la grève des cheminots ne fait qu’en apporter une nouvelle preuve.
Frédéric Lemaire1 – La France serait « rongée comme par des puces par les syndromes du déclin, elle fait penser à ces grands malades qui, à force de s’être grattés, ne supportent plus qu’on les touche. » Article produit par l’association ACRIMED (Action – Critique – Médias) que nous remercions ici. ACRIMED vient de lancer une souscription dont l’objectif est de récolter 40 000 euros. Pour les aider : http://boutique.acrimed.org/14-faire-un-don.html