C’est un vote à bien des égards historique. Les sénateurEs irlandais se sont majoritairement prononcés, mercredi 11 juillet, en faveur d’un boycott des produits issus des colonies israéliennes. Les importations de tels produits pourraient, si le projet de loi en cours d’examen allait jusqu’au bout, faire l’objet de poursuites.
Le vote du 11 juillet n’a pas, pour l’instant, force de loi. Comme le rappelle l’AFP, le texte « doit maintenant être examiné par un comité parlementaire, avant d’être éventuellement présenté aux députés irlandais ». Il n’en demeure pas moins que la décision des sénateurEs irlandais est un symbole fort et un formidable encouragement à la campagne internationale de boycott d’Israël.
Complicité de crime de guerre
La proposition de loi irlandaise va même au-delà de la seule interdiction de l’importation et de la vente de produits issus des colonies israéliennes. Il s’agit également, ainsi que le rappelle la Plate-forme des ONG françaises pour la Palestine, de bannir « l’implication dans la fourniture de services dans les colonies, l’extraction de ressources d’un territoire occupé sans le consentement des autorités compétentes, la tentative, l’assistance et la complicité dans la commission de ces actes ».
En d’autres termes, appliquer le droit international. En effet, le transfert de population sur un territoire occupé est interdit par la IVe Convention de Genève, qui stipule (article 49), que « la puissance occupante ne pourra procéder à la déportation ou au transfert d’une partie de sa propre population civile dans le territoire occupé par elle ». Selon le statut de Rome de la Cour pénale internationale, la colonisation est à ce titre un « crime de guerre ». Contribuer, même indirectement, au maintien ou à l’extension des colonies peut donc être assimilé à une complicité de crime de guerre.
« Un pas courageux qui ouvre la voie du combat contre l’apartheid »
En novembre dernier, Amnesty international rappelait que « des dizaines de millions de dollars sont générés par l’exportation de biens produits dans les colonies chaque année au détriment de l’économie palestinienne [et que] ces profits contribuent à préserver et développer ces colonies par l’appropriation illégale des ressources palestiniennes telles que l’eau, les terres fertiles, les carrières de pierre et les minéraux. » C’est notamment sur ce point que Frances Black, sénatrice indépendante à l’origine du projet de loi, a insisté, en soulignant, dans une tribune publiée par le Irish Times, que « dans les territoires occupés, les gens sont expulsés de force de leurs maisons, des terres fertiles sont saisies, et les fruits et légumes qui sont ensuite produits sont vendus sur les étalages irlandais pour financer tout cela ».
L’initiative, pourtant limitée aux seuls produits des colonies, et non à l’ensemble des produits israéliens, comme le revendique la campagne internationale BDS, a déclenché la colère des autorités israéliennes qui ont dénoncé, dans un communiqué du ministère des Affaires étrangères, « une initiative de boycott d’Israël populiste, dangereuse et extrémiste ». De son côté, l’ONG palestinienne pour les droits humains Al Haq a affirmé que « le peuple irlandais peut être fier que le Seanad [Sénat] irlandais ait fait aujourd’hui un pas courageux qui ouvre la voie du combat contre l’apartheid ». Un combat difficile, mais qui se poursuit et remporte des victoires : de bonnes nouvelles dont on aurait tort de se priver.
Julien Salingue