Un homme extraordinaire vient de disparaître à 97 ans. Lycéen, il adhère à l’organisation de jeunesse du Parti des travailleurs socialistes (SAP), une scission de gauche du SPD qui lutte pour l’unité d’action avec le KPD contre Hitler. En 1933, il part en Palestine. Au bout de six ans, il doit quitter son kibboutz après avoir créé un syndicat ouvert aux non-juifs. Il est ensuite détenu 27 mois sans jugement. Écœuré par le sionisme, il retourne en Allemagne, où il rejoint la petite section de la ive Internationale dont il fut longtemps un dirigeant non public et membre jusqu’à sa mort. De 1953 à 1962, il est attaché aux affaires sociales de l’ambassade de RFA à Paris. Il met cette position au service du travail clandestin de l’Internationale avec le FLN, dans la guerre pour l’indépendance de l’Algérie. Il rédige alors son livre Le PCF et la question coloniale, qui ne sera publié qu’en 1971 chez Maspero. Il prend ensuite, jusqu’à sa retraite en 1978, la direction de la presse de l’IG Metall. Au plus près des revendications, en lien avec les militants combatifs, il en fait monter le tirage de 1,8 à 2,2 millions.
J. Moneta fut de tous les combats : contre le réarmement de la RFA, contre le nucléaire… Il s’engage contre l’impérialisme, mais aussi contre les dictatures staliniennes. Il fut particulièrement actif dans le soutien au mouvement d’autogestion ouvrière autour de Solidarnosc avant et après le coup d’État de 1981. Après la chute du mur de Berlin, il adhéra au Parti du socialisme démocratique (PDS), issu du parti au pouvoir en RDA et pièce maîtresse de ce qui est devenu Die Linke. Il fut membre de la direction nationale et responsable du travail syndical jusqu’à l’âge de 80 ans. Ces derniers mois, ce polyglotte suivait encore avec un grand intérêt l’actualité nationale et internationale, avec le même attachement au combat pour l’émancipation de l’humanité.
Pierre Vandevoorde