Alors que le projet de loi sur les retraites est arrivé au Sénat après que le gouvernement a échoué à le faire adopter à l’Assemblée nationale, la mobilisation ne faiblit pas. La semaine du 6 mars s’annonce à bien des égards décisive, avec la possibilité que nous entrions dans une phase de blocage massif et durable du pays. Tel est en tout cas l’objectif que nous devons nous fixer !
Il est à ce stade utile de le rappeler : la mobilisation contre la « réforme » des retraites est déjà historique, avec trois des cinq plus importantes journées de manifestation des trente dernières années. Et même si le plus dur reste à faire, nous ne devons pas bouder notre plaisir, en constatant que nous avons d’ores et déjà remporté un certain nombre de victoires, quand bien même celles-ci seraient symboliques : en gagnant la « bataille de l’opinion publique », avec des sondages qui indiquent une opposition toujours croissante à la contre-réforme et un soutien toujours croissant à la mobilisation ; en démasquant les mensonges du gouvernement, concernant les « 1200 euros minimum », les « carrières longues », les retraites des femmes, etc. ; en changeant l’ambiance générale et en mettant au centre du débat public les questions sociales, desserrant l’étau des discours racistes, sécuritaires et ultra-réactionnaires — même si ne nous en sommes pas débarrassés.
À partir du 7 mars, on bloque tout
Ces premières victoires sont des points d’appui précieux pour la suite. Mais face à un gouvernement qui entend poursuivre le bras de fer et qui reste déterminé à passer en force, le plus dur reste à faire. Il s’agit donc d’élever le niveau du rapport de forces, avec la conviction qu’il est possible de gagner, et avec l’objectif de bloquer le pays, plusieurs jours de suite, pour les contraindre à remballer leur contre-réforme.
Oui, nous pouvons gagner ! Dans la situation actuelle et au vu des évolutions du rapport de forces, l’affirmer n’est pas s’auto-intoxiquer. Il est réellement possible de l’emporter, et l’une de nos tâches doit être de convaincre le plus largement possible, autour de nous, qu’après des années, voire des décennies de reculs sociaux et de mobilisations défaites, nous sommes dans un moment où il est envisageable d’infliger un revers aux capitalistes et à leur personnel politique.
Les dates des 7, 8 et 9 mars vont être un moment charnière, et elles offrent la possibilité de faire faire un saut qualitatif à la mobilisation. L’appel intersyndical à la grève le 7 mars a été petit à petit suivi d’appels à la reconductible, soit explicites dans divers secteurs (RATP, SNCF, raffineries, éboueurs…), soit pour « mise en discussion » (comme dans l’enseignement primaire à l’appel du SNUipp). Et chaque jour qui nous rapproche du 7 mars voit de nouvelles initiatives être prises.
Le 8 mars, journée de grève féministe, sera une journée clé dans la construction de la mobilisation. Dans le contexte du mouvement contre la « réforme » des retraites, le 8 mars doit être une journée de convergence, qui doit permettre de dénoncer plus que jamais l’injustice sociale majeure de la contre-réforme pour les femmes, mais aussi d’élargir, d’ancrer et de durcir la mobilisation. Articulé à la journée du 7 mars et, le lendemain, à la mobilisation appelée par les organisations de jeunesse, qui pourrait acter l’entrée massive des jeunes dans la bagarre, le 8 mars et sa réussite sont l’un des enjeux majeurs des jours à venir.
Nous pouvons gagner !
Les appels à « tout bloquer » le 7 mars et les jours suivants se multiplient, et c’est tant mieux. Mais un tel mouvement de blocage du pays, qui passera nécessairement par une grève reconductible massive, se construit. Dans nos lieux de travail et d’études, dans nos quartiers, il s’agit de convaincre le plus grand nombre de se lancer dans la bataille. En construisant des assemblées générales, au boulot, à la fac, au lycée ; en organisant, dans les cadres les plus unitaires possible, tant l’unité est une force de cette mobilisation, des réunions d’information, des diffusions de tracts, etc. ; en rendant visible l’opposition à la contre-réforme, par des initiatives de rue, des déploiements de banderoles et de panneaux sur les balcons et aux fenêtres, etc.
Préparer la séquence des 7-8-9 mars, c’est donc à la fois préparer, concrètement, la grève, mais aussi poursuivre le travail visant à « changer l’ambiance ». Et par là même (se) convaincre que nous sommes majoritaires, légitimes, et que nous pouvons gagner. La force de notre camp social, et cela avait été rappelé lors de la période du confinement, est que c’est nous qui faisons tourner la société. Si on s’arrête, tout s’arrête. Et si tout s’arrête, ils n’auront pas d’autre choix que de remballer leur contre-réforme ! Au-delà, les faire reculer sur cette énième attaque ouvrirait la possibilité de les faire reculer sur tout le reste de leurs sales projets, y compris la loi « immigration » de l’abject Darmanin.
La bataille en cours est une bataille éminemment politique, et une victoire changerait la donne pour toutes celles et tous ceux qui, quelles que soient leurs sensibilités politiques, veulent faire vivre la perspective d’un autre monde, débarrassé de l’exploitation et des oppressions. En redonnant envie, espoir, en reconstruisant les cadres collectifs, les solidarités, et en bâtissant une réelle alternative politique à Macron et à l’extrême droite, une alternative de rupture anticapitaliste, féministe, antiraciste, écosocialiste.