Publié le Mercredi 6 octobre 2021 à 20h00.

Des mineurs expulsés et gazés au cinéma à Lomme

Ils étaient sortis pour aller au cinéma. Une activité banale qui a vite tourné au cauchemar.

Quelques minutes après le début du film (Bac Nord), les 17 adolescents, âgés de 11 à 17 ans, ont été obligés de quitter la salle du cinéma Kinepolis (Lomme) à cause d’une attitude jugée trop turbulente. La sortie avait été organisée par la maison de quartier les Moulins à l’initiative des mineurs eux-mêmes qui avaient été accompagnés par deux animatrices du centre.

« Bande de cassos »

L’information a été rendue publique grâce à une enquête de Médiacités relayée par Mediapart. Les jeunes ont raconté au média local avoir subi des insultes et avoir été malmenés et gazés sans raison apparente par la police.

L’une des animatrices déclare avoir été surprise par l’attitude discriminatoire du vigile qui, dès leur arrivée dans la salle, avait lancé un commentaire inopportun : « Il faudra bien les tenir ». Des pieds sur les sièges, pourtant retirés par les deux jeunes dès la première mise en garde, ont suffi à déclencher la colère du vigile et l’intervention violente des policiers. Les mineurs ont été expulsés par une trentaine de policiers, un déploiement de force surprenant pour une sortie au ciné.

Un jeune de 11 ans a été plaqué contre le mur et s’est fait insulter : « sale puceau », « sale bâtard », raconte l’une des animatrice de la Maison de quartier. « Bande de cassos », « toujours les mêmes »

Fanny Houssière, directrice de la maison de quartier, a essayé en vain de porter plainte mais elle s’est heurtée au refus de la police du quartier qui, déclare-t-elle, lui a interdit l’accès à l’intérieur du commissariat.

Indignées par ce traitement et par une telle violence, la directrice et les animatrices ont décidé d’adresser une lettre au procureur de la République, et de saisir l’IGPN qui a ouvert une enquête.

Elles ont fait preuve d’un grand courage et ne comptent pas lâcher l’affaire : « Ce qu’il s’est passé est grave », déclare la directrice de la maison de quartier.

Ce qui est encore plus consternant est qu’il ne s’agit pas d’un cas isolé mais d’un phénomène systémique où la violence à la fois physique et symbolique se déploie directement à partir des institutions de la République et de ceux qui devraient la représenter.

Le film qu’auraient dû voir les mineurs, Bac Nord, n’était peut être pas le plus adapté pour les armer face au racisme. Bouleversé et indigné par cet épisode, le personnel de la maison de quartier souhaite travailler davantage avec les jeunes et leurs familles afin de les sensibiliser et leur donner des outils pour faire face aux phénomènes de discrimination et de stigmatisation.