Dans le discours à la mode fleurissent les éloges sur les « entreprises du futur » où se conjugueraient les nouvelles technologies et des relations de travail épanouissantes pour les salariéEs. En fait, la réalité est bien plus catastrophique pour celles et ceux qui y travaillent.
Dans les « entreprises du futur » coexistent trois modèles. Dans le premier d’entre eux, l’utilisation des nouvelles technologies est mise au service d’une intensification du travail. C’est notamment le cas chez Amazon (dont le fondateur Jeff Bezos ne cesse de s’enrichir avec une fortune dépassant désormais les 100 milliards de dollars). Ainsi que l’explique une salariée dans Mediapart : « Nous avons des objectifs, tant de colis à faire à l’heure, et tout ça est indiqué sur notre écran ou sur notre scan. Si on n’y arrive pas, ça s’affiche en rouge sur l’ordinateur du manager qui vient nous voir. » Il s’agit de détruire tous les petits moments où les salariéEs peuvent souffler, de faire que 100 % de leur temps de présence alimente la machine à profit.
Le deuxième modèle, souvent décrit, est celui de l’« ubérisation » et des plateformes où les travailleurEs sont transformés en « indépendants » aux droits dérisoires.
Le troisième modèle, plus minoritaire, est celui de l’entreprise « innovatrice » où les capacités des salariéEs, souvent jeunes, doivent être mobilisées au service de la « créativité » et du fondateur de l’entreprise. Dans ces entreprises règnent souvent derrière des rapports « cools », un mépris à différentes facettes. Mépris des horaires : c’est la charge de travail qui décide. Mépris du droit du travail : on ne va pas s’encombrer d’un « formalisme inutile ». Mépris des salariéEs qui ne se plient pas tout à fait à la norme : ce ne sont que des « fonctionnaires ». Mépris des femmes aussi. Quantic Dream, le studio de jeu vidéo indépendant français le plus connu dans le monde, exposé au grand jour dans la presse à l’occasion d’une plainte aux prud’hommes, est une illustration de cette réalité.
Dans ces entreprises se combinent donc formes traditionnelles et d’avant-garde pour pressurer les travailleurEs. L’entreprise capitaliste demeure, dans un contexte de financiarisation et de démantèlement des droits sociaux, une machine à faire des profits. Réalité fondamentale qui n’est en rien remise en cause par les discours doucereux. La seule garantie des travailleurEs des entreprises, du futur ou pas, c’est leur organisation et leur capacité à créer un rapport de forces.