Entretien. Dans le cadre de l’AG de la fac de Rennes 2, un comité Féminismes s’est monté pour lutter contre les oppressions dans le cadre du mouvement. Nous avons rencontré J. et A., militantes contre la loi El Khomri et membres du comité Féminismes de l’AG de Rennes 2.
Pour quelles raisons avez-vous décidé de former ce comité Féminismes ?
A. : Au début, une majorité de mecs intervenaient en AG et les filles se plaignaient de comportements sexistes, d’où l’idée de création du comité qui a été débattue et actée en AG. À la première réunion, il y a eu deux mecs, on a donc décidé à ce moment-là d’avoir un temps en mixité puis un temps en non-mixité. Après cette réunion, il n’y a plus eu que de la non-mixité.
Comment le comité s’est-il mis en place ?
A. : Lors de la première réunion, nous sommes revenues sur tous les moments difficiles que nous avions rencontrés, on a essayé de créer un cadre safe pour que l’on puisse toutes parler. Ensuite, on a fait un cortège féministe en manif avec une banderole « riposte radicale contre la domination patronale et patriarcale ». La création de la banderole a permis d’apprendre à se connaître et de se demander ce qu’on voulait faire ensemble.
J. : Plein d’idées ont émergé et plein de personnes ont souhaité s’investir. Nous avons ouvert des espaces mixtes à trois reprises, où nous avons réussi à mettre en avant les comportements sexistes de manière à ce que certains se remettent en question, mieux que quand on les reprenait individuellement. On a aussi fait des ateliers de libération de la parole pour les femmes et on a rédigé un tract contre les comportements sexistes dans le cadre du mouvement.
A. : Grâce à ça, on s’est sentie soutenues par les camarades quand on prenait la parole en AG, quand on scandait des slogans...
Qu’a permis le comité ?
A. : La création du comité a permis aux femmes de prendre confiance en elles, il y a eu une prise de conscience à Rennes 2. On est ainsi arrivé pas loin d’une parité des prises de parole en AG. On a réussi à faire changer les choses à la fac, même si nous nous sommes rendues compte dans les dernières semaines de cours qu’il restait encore beaucoup à faire.
J. : Nous n’avons pas pu tenir toutes les choses que nous souhaitions faire, c’est ce qui nous donne envie de remettre ça à la rentrée !
Sur quoi le comité travaille-t-il actuellement ?
J. : Une affaire de harcèlement sexuel à Rennes 2 qui a touché des enseignantes et des étudiantes. Les professeurs accusés de harcèlement ont été relaxés par la section disciplinaire de Rennes 2 pour deux d’entre eux, et le troisième a été sanctionné légèrement. Nous souhaitions que le président fasse appel de la décision mais il a refusé par peur de la médiatisation.
A. : Notre rôle consiste à soutenir toutes les femmes qui ont ce genre de soucis, nous voulons qu’elles ne se retrouvent pas l’année prochaine face à leurs agresseurs ou face aux hommes contre lesquels elles ont témoigné. Il est important de dire qu’on veille au grain ! Nous sommes aussi sur l’affaire Bagelstein, un restaurant qui utilise comme outil de communication des blagues oppressives, sexistes, racistes et homophobes, qui prônent la culture du viol. On a organisé une réunion pour en parler, un communiqué appelant au boycott et un rassemblement.
J. : Il y a deux semaines, un groupe de personnes a voulu aller voir sur place, et le gérant a directement fait le lien entre eux et le communiqué. Il les a agressées verbalement puis physiquement, la BAC est arrivée, et 4 personnes ont été arrêtées puis jugées en comparution immédiate. Il y a eu 4 peines de prison ferme avec mandat de dépôt de 1 à 3 mois.
J. : On cherche à faire connaître l’affaire en s’organisant avec des gens d’autres villes et en appelant au boycott nationalement.
A. : Ces dernières semaine, le comité Féminismes a pris beaucoup d’ampleur et notre page facebook ne cesse de grossir !
Propos recueillis par Sophie et Laurent