Des millions d’électeurs et électrices étaient invitéEs à se rendre aux urnes dimanche 6 mai dans le Schleswig-Holstein, à l’extrême nord de l’Allemagne, et dimanche 13 mai en Rhénanie du Nord-Westphalie.Dans les deux cas, le parti Die Linke apparaît comme le plus grand perdant. Avec 2,2 % des voix exprimées au Schleswig-Holstein et 2,5 % en Rhénanie, il disparaît des deux Landtage (Parlement régional) puisqu’il ne passe plus la barre des 5 % des voix.
Dans le Nord, le parti a ainsi perdu 3,8 % des voix, et en Rhénanie 3,1 %. Dans le dernier cas, une analyse des résultats publié mardi 22 mai par la fondation Rosa-Luxemburg – proche du parti – montrent que Die Linke a surtout perdu des voix au profit du Parti social-démocrate SPD d’un côté (90 000 électeurs) et du Parti pirate (80 000 électeurs) de l’autre. Sur 250 000 électeurs perdus au total dans toutes les directions, 20 000 ont choisi l’abstention.
Ce recul important est surtout dû au manque de stratégie visible et à l’absence de perspectives d’amélioration de la situation sociale. Considéré ni comme parti de luttes sociales – le SPD garde toujours largement la mainmise sur les appareils syndicaux – ni comme un parti de gouvernement perçu comme « crédible » sur ce terrain, Die Linke perd sur ces deux tableaux. En effet, des militantEs rapportent que d’anciens électeurs leur reprochaient de ne pas aller au gouvernement (ce que le SPD refuse d’ailleurs catégoriquement en Allemagne de l’Ouest), y voyant une incapacité d’améliorer concrètement leur situation. Alors que d’autres leur reprochaient trop de modération vis-à-vis de l’establishment.
Le parti n’a pas réussi non plus à marquer des thèmes qui lui soient propres, pour gagner un profil spécifique. En Rhénanie, où le SPD et les Verts n’avaient pas de majorité propre avant les dernières élections – ils viennent d’en gagner une – mais avaient besoin des voix de Die Linke ou de la droite, le parti apparaissait comme « Monsieur ou Madame Plus » sans pouvoir se distinguer sur le fond. Les débats entre SPD/Verts et Die Linke semblaient se bloquer sur le montant des fonds alloués, par exemple aux forfaits de transports subventionnés pour les étudiantEs. Mais l’opposition de gauche est apparue comme faisant de la « surenchère » sur le plan quantitatif, sans pouvoir se démarquer qualitativement.
Le parti est renvoyé là où il se retrouvait entre 1990 (après la chute du Mur et l’expansion de l’ancien parti d’État de la RDA, « refondé », vers l’Ouest) et 2005. Le prochain congrès de Die Linke, prévu les 2 et 3 juin, devra débattre de ses orientations.
En attendant, c’est le Parti pirate qui a le vent en poupe. Il bénéficie d’un très gros effet de mode depuis plusieurs mois et est désormais représenté dans quatre Landtage. Parti sans idéologie caractérisée, initialement constitué pour défendre le droit au téléchargement illimité sur Internet, il est devenu l’expression idéale d’un vote protestataire sans marquage idéologique caractérisé. Sur le plan social, il reprend cependant certaines revendications de Die Linke, ou des points programmatiques des Verts en matière de défense des libertés individuelles.
Bertold du Ryon