Le premier voyage à l’étranger de Barack Obama après sa réélection aura été une tournée de trois jours en Asie. « Alors que nous achevons les guerres qui ont dominé notre politique étrangère pendant une décennie, cette région sera le centre de nos efforts pour bâtir une paix prospère », a-t-il déclaré, voulant tourner la page des échecs des guerres en Irak et en Afghanistan en vue d’un redéploiement économique, diplomatique et… militaire en Asie face à la Chine.«Les États-Unis sont une nation du Pacifique. Nous voyons notre avenir lié à ces nations et ces peuples (…). Alors que notre économie se redresse, c’est là qu’elle trouvera la croissance ». Ce voyage se veut une réponse à la démagogie chauvine contre la Chine, qui a été une rengaine des Républicains durant la campagne présidentielle. Obama se pose donc en « premier président du Pacifique », selon sa propre expression. Sa réponse combine offensive libérale économique et commerciale et redéploiement diplomatique et militaire, à l’heure où les tensions entre la Chine et le Japon s’exacerbent à propos de la propriété d’un petit archipel en mer de Chine orientale. Tournée des popotesCette visite ressemble à une tournée des popotes, comme sa première étape, la Thaïlande, pièce cruciale du dispositif militaire américain. Ses bases aériennes et ses ports sont chaque année le théâtre d’imposantes opérations orchestrées par l’armée américaine comme celles de 2011, Cobra Gold, qui a mobilisé 13 000 soldats de 24 pays. Cette visite participe aussi de la volonté de gagner de nouvelles marches pour l’empire, en Birmanie ou au Cambodge où aucun président américain en exercice ne s’était jusqu’alors rendu. Obama a apporté sa caution au régime de Rangoon au nom du pragmatisme diplomatique : « si nous attendions jusqu’à ce qu’ils aient atteint la démocratie parfaite, je pense que nous devrions attendre horriblement longtemps. » Il s’est cependant donné une image de démocrate en rencontrant Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la Paix désormais députée. Au Cambodge, devant le sommet d’Asie de l’Est qui a réuni des dirigeants de l’Asean (Association des nations de l’Asie du Sud-Est), l’Inde, la Corée du Sud, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, il a souligné la double préoccupation, économique et militaire, des USA vis-à-vis de l’Asie. Alliances commerciales et rapports de forcesIl a répondu aux sollicitations du Premier ministre japonais Yoshihiko Noda pour qui « la situation sécuritaire en Asie de l’Est s’étant aggravée, l’alliance entre le Japon et les États-Unis revêt une importance accrue ». Pour dans le même temps afficher son ouverture vers la Chine : « Il est très important que les deux plus grandes économies du monde que nous sommes travaillent à établir des règles claires au niveau international pour le commerce et l’investissement, ce qui peut accroître la prospérité et la croissance mondiale » a déclaré Obama à Wen Jiabao, le Premier ministre chinois. Ce dernier lui a fait écho, estimant que les « différences et désaccords » avec les États-Unis pouvaient être réglés par le commerce et l’investissement…Déclarations de bonnes intentions libérales réciproques, derrières lesquelles chacun déploie son offensive diplomatique sans oublier les rapports de forces… militaires.Yvan Lemaitre