L’annonce par la Radio Télévision Suisse (RTS) du refus de certaines entreprises helvétiques de permettre à leur personnel de se faire vacciner durant les heures de travail a créé la surprise.
En pleine sortie de la pandémie, la vaccination de masse est annoncée par les autorités comme un objectif à atteindre le plus rapidement possible. Dès que l’âge a été abaissé en dessous de 65 ans, se posait une nouvelle question. Cette opération pouvait-elle être comprise dans le temps de travail ?
Tant pis pour les salariéEs
Selon l’enquête de la RTS, la question est claire pour les Chemins de fer fédéraux (CFF), La Poste et la Migros (grande distribution). Ces grandes entreprises refusent d’inclure ce temps pour la vaccination dans le temps de travail de leurs employéEs. Le porte-parole de La Poste l’a même ouvertement défendu devant la caméra.
Voilà une attitude qui éclaire la manière dont ces entreprises remercient leurs salariéEs de leur engagement durant la première période de l’épidémie, lorsqu’il leur était demandé de continuer à maintenir leur activité professionnelle. Ces services, considérés comme essentiels par les autorités, ont continué à fonctionner malgré les risques encourus par le personnel, sur le lieu de travail et durant les déplacements.
Cette attitude contraste avec celle d’autres pays. En Allemagne, dans certaines régions, les vaccinations se font même dans les entreprises !
Chasse aux coûts
Si certains employeurs suisses, y compris ceux des grandes régies fédérales, s’opposent à reconnaître ce droit, il y a sans doute des raisons financières et idéologiques. Engagées depuis de nombreuses années dans des politiques de restructuration, les entreprises publiques s’y engagent avec des objectifs financiers de réduction des coûts.
La Poste en est un bon exemple, avec la réduction drastique de ses agences. Les bas salaires proposés dans certaines filiales montrent leur modèle économique. Le cas de la Migros est plus caricatural. La période de pandémie a vu son chiffre d’affaires augmenter fortement. Cela ne l’empêche pas de serrer la vis sur les coûts.
Chasse gardée
Aux arguments financiers vient s’ajouter un autre, plus idéologique. En Suisse, moins on reconnaît de droits aux salariéEs, et mieux les patrons se portent. Cela va des grandes revendications (salaire minimum, licenciements, temps libre) à celles touchant directement l’organisation de la place de travail.
En refusant de concéder le temps de vaccination Covid-19 comme temps de travail, quelques grands employeurs signifient qu’en Suisse le pouvoir patronal ne s’embarrasse pas de petits gestes qui pourraient être perçus comme des concessions gratuites. S’il n’y a pas de petits profits, il n’y a pas de petites concessions.
Vu le nombre d’employéEs concernés par ces trois grandes entreprises, cette contrainte ne peut se traduire que par une réduction des possibilités de vaccination, et donc d’un ralentissement de la campagne. Est-ce que cela respecte le vœu des autorités politiques ? Aucune réaction de leur part après ces révélations. Qui ne dit mot consent ?