Manuel Valls, en visite en Israël et dans les territoires palestiniens pour défendre « l’initiative française pour le Proche-Orient », n’aura donc rien obtenu...
Sa visite aura toutefois eu l’intérêt de démontrer, à qui refusait de le voir, que les positions pourtant pro-israéliennes du Premier ministre ne suffisent pas au gouvernement d’extrême droite de Netanyahou.
Une « initiative française » ?
En quoi consiste le projet français ? Il s’agit, afin de « relancer le processus de paix », d’organiser une conférence à Paris avant l’été, en présence des pays « intéressés », afin de définir les « paramètres » d’une solution au « conflit ». Puis, Palestiniens et État d’Israël seraient invités à se réunir afin de conclure un « accord de paix » dans le cadre de ces « paramètres ».
Beaucoup de guillemets, tant le projet français repose sur des hypothèses… peu crédibles. Qui peut en effet croire que la base d’un règlement de la question palestinienne pourrait être le point de vue (et donc les intérêts) des pays occidentaux et de certains régimes arabes (puisque c’est d’eux dont il s’agit) ? 25 ans de « processus de paix » n’ont-ils pas suffi à démontrer que la seule paix possible repose sur la justice, et donc la fin de la négation des droits nationaux des Palestiniens ?
Arrogance israélienne
L’initiative française, condamnée à l’inutilité, a reçu le soutien d’une direction palestinienne ravie d’être considérée comme un interlocuteur crédible, alors qu’elle a perdu toute légitimité auprès de la population palestinienne. Mais elle a été, comme on pouvait bien évidemment s’y attendre, rejetée par le gouvernement Netanyahou qui, faisant une nouvelle fois la preuve de son arrogance, en a appelé à une « autre initiative française ».
Netanyahou affirme qu’il est prêt à discuter avec les Palestiniens, mais dans un cadre bilatéral, et sans aucune précondition. Autrement dit : poursuivre la mascarade de pseudo-négociations qui consistent en l’écrasement du faible par le fort et sa légitimation au nom de la « recherche de la paix », tandis que sur le terrain, le gouvernement israélien poursuit sa politique de fait accompli, par la colonisation, les expulsions et la répression.
Aucune solution sans sanctions
À la tête d’un gouvernement d’extrême droite dans lequel Avigdor Lieberman – qui en appelait il y a peu à « décapiter à la hache » les Palestiniens d’Israël « déloyaux » –pourrait faire son entrée au poste de ministre de la Défense, Netanyahou n’a pas l’intention de renoncer à l’entreprise coloniale et au nettoyage ethnique. Et ce ne sont pas les déclarations d’amour de Manuel Valls à l’État d’Israël, destinées à repositionner la diplomatie française dans la région, qui vont y changer quoi que ce soit.
En effet, quand bien même la pseudo-initiative française n’aurait rien changé sur le terrain, c’en est déjà trop pour une extrême droite israélienne qui refuse que quiconque se mêle de la question palestinienne qu’elle considère, conformément à son idéologie coloniale, comme une affaire de politique intérieure... Le refus de l’initiative française n’est pas tant un désaveu de la France qu’une posture politique qui participe de la course à la radicalisation du champ politique israélien.
Une nouvelle démonstration du fait que les gesticulations diplomatiques, même si elles déplaisent à Israël, ne serviront jamais les intérêts du peuple palestinien, et donc de la justice, tant que de véritables mécanismes contraignants (boycott, désinvestissement, sanctions) ne seront pas imposés à un État d’Israël qui ne comprend pas d’autre langage que celui du rapport de forces.
Julien Salingue