Le 15 mars, comme chaque année, une manifestation dénoncera les violences policières. Cette date résonne d’une actualité brûlante, alors que nous approchons des vingt ans des révoltes de 2005, déclenchées par le meurtre de Zyed et Bouna par la police.
Vingt ans, et pourtant la répression d’État n’a cessé de s’amplifier. Si la question des violences policières s’est imposée dans le débat public, si le vocabulaire a évolué, on ne parle plus de « bavures », mais bien de « violences policières », l’État, lui, persiste à nier leur existence et à les intensifier.
Des banlieues aux Gilets jaunes : la répression s’étend
En 2018, lors d’une manifestation pour réclamer des logements dignes à Marseille, Zineb Redouane a été tuée, visée par la police qui lui a lancé une grenade lacrymogène alors qu’elle fermait la fenêtre de son appartement au quatrième étage craignant que les gaz remontent chez elle. Zineb Redouane a affirmé avoir été visée, mais la justice a laissé libre l’auteur du tir.
Celles et ceux qui dénonçaient depuis longtemps les violences policières armées contre les non-blancs avaient raison : ce qui frappait les quartiers populaires allait se généraliser. Toujours en 2018-2019, avec le mouvement des Gilets jaunes, des milliers de personnes ont expérimenté à leur tour la violence d’un État policier qui ne tolère aucune contestation avec l’utilisation d’armes, comme les LBD et les flash-ball. ÉborgnéEs, mutiléEs, arrêtéEs en masse : la répression a été féroce, avec la complicité de l’exécutif. Ce qui s’abattait hier sur les quartiers populaires s’est étendu aux manifestantEs, aux militantEs, aux syndicalistes. L’iceberg des violences d’État a émergé aux yeux de celles et ceux qui pensaient y échapper.
Les mobilisations contre la réforme des retraites en 2023 n’ont fait que confirmer cette logique. Coups de matraque, arrestations préventives, humiliations : les forces de l’ordre ont agi avec la même brutalité. Mais malgré ces exactions répétées, l’État continue de nier l’évidence. Macron refuse le terme de violences policières, Darmanin « s’étouffe » quand il l’entend, et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, couvre et protège les policiers qui frappent, mutilent et tuent.
2005-2025 : un déni d’État et une extrême droite en roue libre
Si le vocabulaire a changé, la réponse politique, elle, reste inchangée : impunité pour la police, criminalisation des victimes et de leurs soutiens. L’extrême droitisation de la société encourage cette répression. Après la mort de Nahel, assassiné par un policier en 2023, une cagnotte de soutien au tireur a recueilli plus d’un million d’euros. Un signal glaçant : une partie de la population assume désormais ouvertement son soutien aux meurtres policiers.
Dans ce contexte, voir le policier qui a tué Nahel être poursuivi pour homicide est une exception, une avancée à noter. L’IGPN réclame même un conseil de discipline. Le rapport de forces est pourtant loin d’être inversé.
Plusieurs organisations avaient soutenu les jeunes révoltéEs après la mort de Nahel. En septembre 2023, une marche unitaire contre les violences policières et le racisme systémique rassemblait plusieurs milliers de personnes à Paris. Nous n’avons pas réussi à inverser la tendance. L’État, lui, continue son offensive sécuritaire, et les policiers d’agir dans l’impunité.
Répression généralisée : l’iceberg que nous avons percuté
Les violences policières ne sont que la face émergée d’un iceberg de répression d’État. Lois sécuritaires liberticides (loi Sécurité globale, loi anti-squat, multiplication des interdictions de manifester), dissolutions arbitraires d’organisations militantes, criminalisation du soutien à la Palestine… L’État policier ne se cache plus. Il avance à visage découvert, certain que l’opposition restera divisée et incapable de répondre.
Il est encore temps d’inverser la tendance. La marée fasciste n’est pas inévitable. Nous devons construire un front large contre la répression, unir les luttes et ne pas céder au fascisme. Nous l’avons démontré le 8 mars dernier. Cela doit continuer le 15 mars, dans la rue, pour dénoncer les violences policières et affirmer que nous ne laisserons pas la peur et l’autoritarisme nous écraser. Zyed, Bouna, Zineb, Théo, Adama, Nahel et touTEs les autres, on n’oublie pas, on ne pardonne pas !
Amel et Stéphane Waha