En prenant fin juin la décision de présenter la candidature de Philippe Poutou à l’élection présidentielle, le NPA n’a pas décidé d’agir par habitude… Au contraire, il s’agit de prendre la mesure des enjeux d’une situation lourde de dangers et d’aider à ce que notre camp social franchisse une étape dans son organisation tout en avançant les éléments d’une rupture anticapitaliste plus qu’urgente, en particulier après un an et demi de crise sanitaire.
« Tous les niveaux de crises — sanitaire, écologique, économique, sociale, démocratique — se conjuguent pour produire un sombre bilan pour le capitalisme. Cela ne peut plus durer ! Ce n’est pas seulement le NPA qui le dit mais des millions d’exploitéEs et d’oppriméEs qui défendent leurs droits les plus élémentaires dans différentes parties du monde. » Ces mots qui concluent l’introduction de la déclaration de la conférence nationale du NPA lançant la campagne de Philippe Poutou, veulent exprimer le ressenti de beaucoup parmi nous, en particulier ces derniers mois.
À elle seule, la séquence ouverte par l’apparition du Covid-19 en Asie apparaît comme un concentré du pouvoir de nuisance d’un système qui nous mène partout droit dans le mur. Là-bas, comme pour les pandémies précédentes, ce dernier virus est lui aussi né dans des environnements naturels détraqués, agressés, par un productivisme capitaliste sans limite qui détruit les écosystèmes favorisant le passage d’un pathogène de l’animal à l’humain. Ici, après des années d’attaques contre le système hospitalier et un service public de santé asphyxié, le pouvoir actuel a prouvé son incurie, mentant sur l’affaire des masques, développant ses mesures constamment à contretemps, jusqu’à une campagne vaccinale lancée trop tardivement, trop lentement et avec toutes les pesanteurs des intérêts privés. Dans ce cadre, comment peuvent-ils justifier le maintien des brevets sur les vaccins – dont la levée serait une mesure d’urgence de santé publique – sinon par le profit des seuls actionnaires des grands laboratoire pharmaceutiques ? Pas étonnant donc que la richesse des seuls milliardaires français ait augmenté de 68 % depuis le début de l’année dernière, et que les entreprises du CAC 40 aient versé 51 milliards d’euros à leurs actionnaires, soit une augmentation de 22 % des dividendes !
C’est d’abord pour porter l’urgence de rompre avec un tel système générateur d’inégalités dans toute la société que nous devons être en campagne. Pas de ripolinage verdâtre ou rosâtre possible, nous avons besoin « d’avancer vers une société qui organise la production et les rapports sociaux en fonction des besoins sociaux et des nécessités écologiques, qu’on l’appelle écosocialiste, communiste ou autogestionnaire. » Pour cela, mettre en discussion un programme de rupture pour répondre aux besoins du plus grand nombre, exprimer la nécessité de construire les mobilisations qui seules peuvent rendre possible ce qui semble impossible mais nécessaire, et tracer la voie d’un autre monde libéré de l’exploitation et des oppressions.
Car si d’autres possibles que la régression capitaliste n’apparaissent pas dans le cadre de cette campagne, c’est la colère nourrie du désespoir qui va dominer les esprits et qui peut conduire aux pires dangers incarnés par l’extrême droite de Marine Le Pen. La concurrence généralisée, la valorisation de la réussite individuelle, l’autoritarisme exacerbé et les divisions suscitées et entretenues (en particulier sur le terrain du racisme et de l’islamophobie), autant de marqueurs politiques du pouvoir macroniste qui ne peuvent trouver leur aboutissement que dans les perspectives du RN si on ne les arrête pas... D’où la nécessité de se servir de cette campagne pour construire des fronts de résistance à l’extrême-droitisation du champ politique, contre les idées réactionnaires et de développer les mobilisations unitaires les plus larges contre l’extrême droite.
À nous seuls, nous n’avons bien entendu pas la prétention d’incarner ces possibles, y compris même dans cette échéance électorale, mais nous avons notre contribution à y apporter, nos nécessités à y faire entendre. En particulier, la question de « prendre nos affaires en main » gagne en acuité. S’auto-organiser pour nos luttes, bien entendu, mais au-delà nous rassembler, nous organiser.
Pour cela, nous avons besoin d’une nouvelle représentation des oppriméEs et des exploitéEs, de construire une force politique qui représente les intérêts de l’ensemble de notre camp social, un parti pour la rupture révolutionnaire qui s’adresse à touTEs les anticapitalistes, à toutes celles et ceux qui subissent cet ordre social et veulent agir pour le renverser. Avancer la nécessité d’avoir un cadre collectif organisé, un parti qui soit un véritable processus s’inscrivant dans la période dans laquelle nous voulons agir, bien éloigné du dogmatisme parfois rassurant mais hors sol d’une certaine extrême gauche et plus encore de la figure d’un sauveur suprême qui existe souvent à gauche, même chez les plus « insoumis »…
C’est peut-être l’ultime exigence que nous voulons poser aux yeux de toutes et tous, à travers la campagne de Philippe Poutou, qui doit être celle de tout le NPA, et au-delà ouverte à toutes celles et ceux qui se revendiquent des mêmes combats sociaux que nous.