« Eva Joly a raison : le 14 juillet est devenu le défilé des mercenaires des interventions colonialistes et impérialistes dans le monde.Heureusement, la révolution française c’est autres chose que les bombardements de civils en Afghanistan ou en Libye. Les réactions scandaleuses et nationalistes de François Fillon ou Marine Le Pen sont à la mesure de la politique d’intervention qu’ils soutiennent. Avec Eva Joly, nous exigeons l’arrêt de ces défilés coûteux et provocateurs et le retrait de toutes les troupes françaises engagées dans des combats meurtriers contraires aux intérêts des peuples. » C’est dans ces termes que Philippe Poutou a exprimé sa solidarité avec Eva Joly qui avait osé déclarer qu’il fallait supprimer le défilé du 14 juillet et fustigé cette manifestation de la « France guerrière ». Cette déclaration a valu à la candidate d’EÉLV d’être attaquée par Fillon et plusieurs de ses amis UMP qui ont étalé à cette occasion leur hargne et leurs préjugés chauvins et xénophobes. « Je pense que cette dame n’a pas une culture très ancienne de la tradition française, de l’histoire française et des valeurs françaises », a lâché le Premier ministre comme pour faire concurrence à Marine Le Pen qui, quelques heures auparavant, avait cru bon d’expliquer que « Mme Joly ne comprend strictement rien au lien extrêmement profond qui existe entre le peuple français et son armée », et que cette « incompréhension » était « peut-être » due au fait qu’elle était née en Norvège.
Coïncidence (?), c’est de Côte d’Ivoire puis du Gabon que Fillon a lancé ses attaques odieuses contre Eva Joly, elle qui avait, en tant que juge d’instruction en charge de l’affaire Elf, mis en lumière une partie de la sinistre réalité de la Françafrique : corruption, coups de force et interventions militaires meurtrières, soutien sans faille accordé à des dictateurs chargés de maintenir l’ordre pour les intérêts des Total, Bouygues ou Bolloré. Et que font d’autre les armées françaises engagées en Afghanistan ou en Libye que maintenir l’ordre impérialiste, c’est-à-dire la mainmise des trusts, des banques et de leurs États sur le monde ? Voilà la « patrie » à laquelle a été sacrifiée la vie des sept soldats français qui viennent de mourir en Afghanistan.
Tout en condamnant les attaques nauséabondes lancées contre Eva Joly, la gauche institutionnelle, de Hollande à Mélenchon, s’est revendiquée des défilés du 14 juillet, du patriotisme et de la France. Si on ne peut guère s’étonner que le PS qui vient de voter la prolongation de l’intervention impérialiste en Libye défende l’armée française, Mélenchon a dû en surprendre plus d’un lorsqu’il a déclaré que « le défilé militaire rappelle à toute puissance étrangère ce qu’il lui en coûterait de s’en prendre à la France et à sa République ». Oublierait-il que l’armée française ne s’est depuis longtemps – salement – distinguée que dans les guerres coloniales ?
Galia Trépère