Ils l’ont envoyé en prison
Pour un vol à soixante-dix dollars
Fermé la porte derrière lui
Et ils ont jeté la clé
Seigneur, Seigneur, ils ont abattu George Jackson
(…)
Il ne se prosternerait pas ni ne s’agenouillerait
Les autorités le détestaient
(…)
Les gardiens de prison l’ont maudit
Comme ils le regardaient d’en haut
Mais ils avaient peur de son pouvoir
Ils avaient peur de son amour.
En 1971, Bob Dylan écrivit une chanson qui retrace le meurtre du militant afro-américain George Jackson, tué par des gardiens de la prison de Saint-Quentin lors d’une tentative d’évasion controversée le 21 août.
Après une jeunesse agitée, George Jackson, pour avoir conduit la voiture pendant le braquage d’une station-service, avait été condamné à l’âge de 18 ans à une peine de prison d’au moins un an mais de durée indéfinie et laissée à l’appréciation d’une commission (ce système a depuis été condamné par l’ONU et supprimé aux États-Unis).
Emprisonné à la prison d’État de Saint-Quentin en 1966, il se politise et fonde la « Black Guerrilla Family », un groupe se réclamant du marxisme qui vise à combattre le racisme et maintenir la dignité des Afro-américains en prison et vise renverser le gouvernement des États-Unis. Il développe des relations avec les Black Panthers. En 1969, il est transféré à la prison de Soledad. Durant ses périodes d’isolement dans des « cellules de haute sécurité » il lit beaucoup : « En prison, j’ai fait la connaissance de Marx, de Lénine, Trotsky, Engels et Mao, et ils m’ont converti ». Il écrit des textes et lettres qui seront publiés, avec en particulier les Frères de Soledad, livre qui rencontre un écho important.
Il s’attire la haine de la Fraternité aryenne (organisation de détenus blancs) et, avec d’autres, s’affronte violemment avec des gardiens qui avaient maltraité des détenus. Il doit repasser en jugement, accusé d’avoir tué un gardien.
Le 21 août 1971, trois jours avant de passer en jugement, Jackson est tué dans la cour de la prison de Saint-Quentin par un garde en poste sur un mirador, au cours de ce que les autorités ont décrit comme étant une tentative d’évasion avec prise d’otages (il y eut effectivement plusieurs morts) et qui pourrait correspondre à une provocation. Quelques jours après sa mort, se déclencha un soulèvement de prisonniers dans la prison d’Attica. Soulèvement qui fut réprimé par l’armée au prix de nombreux morts.
« Je ne veux pas mourir en ne laissant derrière moi que quelques chansons tristes et un petit tas de terre. Je veux laisser un monde libéré de l’ordure, de la pollution, du racisme, du pouvoir fondé sur la misère, du nationalisme et des guerres qu’il entraîne, des armées, de la bigoterie, des coteries, de cent différentes contrevérités et d’une économie usuraire et déréglée. » (Lettre, avril 1970).