Publié le Dimanche 23 novembre 2014 à 20h42.

Combattons toutes les violences faites aux femmes

Combattons toutes les violences faites aux femmesLe 25 novembre est la journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Le NPA participe aux initiatives militantes à cette occasion. Mais il ne s’agit pas pour nous d’une cause de type simplement humanitaire.La violence sexiste prend racine dans le système capitaliste, patriarcal et raciste que nous subissons. Le capitalisme perpétue à son profit le patriarcat qui lui préexistait. À la maison, la grande majorité des femmes fait un travail gratuit (« tâches domestiques ») qu’il coûterait très cher d’organiser collectivement avec de vrais services publics de la petite enfance, du troisième âge, etc. Trop cher pour les capitalistes ! Au travail, les femmes sont à travail égal moins bien payées, employées de manière plus précaire, avec de nombreux temps partiels imposés. Cela permet de faire pression à la baisse sur l’ensemble des salaires. Toutes ces injustices perdurent grâce une vision sexiste de la place des femmes.Le maintien de l’ordre social actuel passe par le maintien de la soumission des femmes. C’est pourquoi la violence sexiste n’est souvent combattue qu’en façade. Dans la profondeur de notre éducation et de notre culture, les femmes sont présentées comme inférieures. Plus ou moins subtilement, notre société continue à passer un certain message. Aux hommes, elle dit qu’ils doivent décider ce qui est bon pour les femmes et l’intérêt général, et qu’il est normal d’imposer ces décisions. Aux femmes, elle dit que l’essentiel est de s’épanouir en ayant des enfants avec l’homme de sa vie. Si l’épanouissement par d’autres voies est un peu entendu, c’est grâce aux luttes passées des femmes elles-mêmes. Les femmes sont aussi éduquées à penser qu’elles doivent accepter leur sort, pas se défendre.Cette culture patriarcale permet la violence sexiste. Si elle est en apparence condamnée, dans les faits notre société ferme les yeux sur ce fléau. Les points d’accueil pour celles qui quittent un conjoint violent sont très insuffisants. Les femmes agressées ou violées sont stigmatisées, traitées de menteuses. Les plaintes, quand on ose porter plainte, n’aboutissent que rarement à des condamnations. Certaines femmes sont même condamnées pour violence envers leur agresseur !Il faut lutter pied à pied contre les violences sexistes. Cependant, ce n’est qu’en renversant le système capitaliste qu’on pourra renverser le patriarcat, et inversement. La lutte pour construire une société nouvelle, débarrassée de toutes les formes d’exploitation et d’oppression, continue.Dossier réalisé par la Commission nationale intervention féministe du NPAViolences sexuelles : l’agresseur n’habite pas loin…Quelques chiffres... En France, en 2010 et 2011, 400 000 femmes ont subi des violences. Les ¾ d’entre elles connaissaient leur agresseur, et pour 31 % il s’agit de leur conjoint ou de leur ex...

C’est entre 18 et 29 ans que les femmes sont les plus exposées : 2,1 % d’entre elles ont subi un viol ou des attouchements. Les femmes sont 3 fois plus souvent victimes de violences sexuelles que les hommes, elles subissent aussi plus souvent le harcèlement, les injures, l’exhibitionnisme. Une femme meurt tous les 2,5 jours sous les coups de son conjoint ou ex-conjoint… Les conditions de vies ont bien sûr un impact sur les violences : la précarité, le mal-logement, etc. pèsent au quotidien et favorisent les violences. Cependant, il faut noter que tous les milieux sociaux sont touchés.

L’État nous protège ?Le plan du gouvernement pour lutter contre les violences a consisté essentiellement à refondre le site consacré à ce thème et à améliorer la permanence téléphonique. Pour le reste, c’est restriction budgétaire à tous les étages ! Places d’hébergement d’urgence, embauche et formation de personnels d’accueil, etc. les moyens sont dérisoires face aux besoins.Par ailleurs, si les femmes ne portent pas plainte, c’est parce qu’elles connaissent les obstacles auxquels elles vont être confrontées. L’enquête de l’Insee souligne plusieurs raisons avancées par les victimes : « cela n’aurait servi à rien », « éviter des épreuves supplémentaires comme un témoignage ou une confrontation »… Systématiquement la parole des femmes est remise en cause et les condamnations restent difficiles à obtenir. Loin de nous protéger, l’État, de fait, cautionne les violences faites aux femmes.

La violence physique, pilier du patriarcatCes violences sont banalisées dans notre société. Par exemple, les ­assassinats de femmes par leur (ex-) conjoint sont présentés comme des faits divers sans que jamais ne soit souligné le déséquilibre femmes/hommes.Les violences participent du rapport de domination imposé aux femmes. C’est la partie physique de violences plus globales subies de manière exacerbée par la moitié de la population : violences sociales, violences psychiques, violences verbales… Elles permettent au système de maintenir l’ordre existant, reléguant les femmes à leur rôle soi-disant naturel de mère, d’épouse, de femmes au foyer… Pendant ce temps, le sous-emploi des femmes permet de faire diminuer les chiffres du chômage, et la casse des services publics est compensée par le travail gratuit effectué à la maison à 80 % par les femmes…

Elsa Collonges (Grenoble)

 

Harcèlement de rue : le ras-le bol monteCes derniers temps, les agressions verbales, voire physiques, dans la rue, dans les transports ont été mises en lumière grâce à des campagnes et de nombreux témoignages tournés en caméras cachées.

Un phénomène de plus en plus « visible »La litanie des insultes, des agressions parfois récurrentes, quotidiennes, que subissent les femmes dans l’espace public est large, allant du plus grossier, au plus insultant. De nombreux « tumblr » ouverts récemment, avec le hastag #stopharcelement, relatent toutes ces petites agressions du quotidien.Son retentissement a montré l’ampleur du phénomène, et aussi combien les filles et les femmes avaient envie de le dénoncer et de le faire savoir. Car le fond du problème est bien que la place des femmes n’est pas censée être dehors, ou pas aussi tard, ou tôt, ou pas toute seule, ou un peu éméchée, ou pas habillée en jupe, ou pas seule dans les transports, etc.

La rue, fief des mâles ?Des enquêtes récentes menées par des géographes ont montré combien ce phénomène était profond et ancré dans nos inconscients. Promenez-vous dans n’importe quelle ville (ou campagne, ça marche aussi), vous verrez que les femmes et les hommes ne fréquentent pas les mêmes lieux, et surtout qu’ils n’y adoptent pas le même comportement...Les hommes vont occuper les places passantes (allant jusqu’à être gênants), alors que les femmes vont se déplacer rapidement d’un point à un autre, en évitant justement certaines places. Et ce phénomène s’accentue encore plus la nuit, ce que cherchent à dénoncer les marches de nuit non mixtes.

Et les transports ?L’association Osez le féminisme a récemment lancé la campagne #TakeBackTheMétro pour mettre en lumière cette question, en particulier dans le métro parisien. Les femmes interrogées y dénoncent des agressions au quotidien, déclarent adopter un comportement et une façon particulière de s’habiller. Là encore, la liberté de circuler ne vaut pas pour tout le monde.

Hélène Pierre (Rouen)

 

Harcèlement sexuel et violences au travail, ça suffit !On peut lire sur le site du gouvernement que 8 % des agressions sexuelles et 25 % des gestes déplacés sont subis sur le lieu de travail ou d’études. Des chiffres sans appel...

D’autres chiffres sur la place des femmes dans le monde du travail sont éclairants sur la situation. En 2010 les femmes représentent près de la moitié de la population active (48 %). Deux sortes de ségrégations sont constantes : l’horizontale, concentration dans des secteurs d’activité déjà féminisés (la moitié des femmes est concentrée dans 12 des 87 familles professionnelles) et verticale, avec le plafond de verre. Les hommes ne représentent que 20 % des emplois à temps partiel, 80 % donc pour les femmes...Près d’une femme sur 3 est exposée à la tension au travail, ce qui est le cas d’un homme sur 5, quelle que soit la catégorie socioprofessionnelle, l’écart étant plus important pour la catégorie « Ouvrier ».

Sexisme et violencesTous ces chiffres mettent en lumière qu’au sein du travail la place des hommes et celle des femmes n’est pas égalitaire. Cela contribue à amplifier les attitudes sexistes qui provoquent des situations portant atteinte à la dignité de la personne et à des agressions violentes sur les femmes. Qui n’a pas entendu parler autour d’elle ou de lui de ces femmes conductrices de train continuellement exposées à des insultes sexistes ou cette cadre subissant quotidiennement des gestes déplacés de la part de sa propre hiérarchie ou de ses collègues ? Qui n’a pas entendu parler de ces infirmières, de ces femmes de ménage… perpétuellement rabaissées par des propositions à caractère sexuel, des insultes, des « blagues » sexistes ? La place des femmes dans le monde du travail aujourd’hui contribue à entretenir et favoriser cette situation de harcèlement sexuel. Nous devons lutter pour l’égalité homme-femme au travail.Certes la loi du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel est une véritable avancée face à ces violences et permet de les condamner. Cependant, elle est rarement appliquée car malheureusement les femmes victimes ne portent pas ou peu plainte. Maintenant l’employeur doit prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de prévenir les agissements constitutifs du harcèlement sexuel. Celui-ci constitue un délit pouvant être puni de 2 ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. En cas de circonstances aggravantes, les peines peuvent être portées à 3 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende. À nous de nous saisir de cette loi ! Par l’information sur les lieux de travail et d’études, en interpellant la justice, en constituant des groupes auto-­organisés de femmes dans l’entreprise et l’université, battons-nous pour que ces violences à l’encontre des femmes cessent enfin !

Charlotte et Nathalie (Nîmes)

 

Femmes et lesbiennes, la double peineL’offensive réactionnaire de ces deux dernières années a eu des conséquences lourdes pour les femmes lesbiennes, bisexuelles, et pour les personnes trans. Les polémiques autour de l’ouverture du mariage, puis de la « théorie du genre » et la naturalisation de l’hétérosexualité et de l’identité de genre ont eu pour effets directs la banalisation des propos mais aussi des actes homophobes et transphobes.

C’est dans ce contexte que l’association d’intervention en milieu scolaire SOS Homophobie va publier ce 25 novembre les résultats d’une vaste enquête sur la lesbophobie menée en 2013 auprès de plus de 7 000 femmes lesbiennes et bisexuelles. Les premiers résultats sont frappants : 82 % des lesbiennes et bies déclarent ne pas être visibles au travail auprès de touTEs leurs collègues alors qu’elles sont 74 % à ne pas avoir réalisé un coming-out auprès de l’ensemble de leur famille. 63 % ne manifestent pas leur affection en public à leur partenaire par peur des réactions d’hostilité.Selon le rapport annuel de la ligne d’écoute de SOS Homophobie en 2014, les témoignages d’agressions physiques ou sexuelles lesbophobes sont en hausse de 46 % par rapport à 2012. Les témoignages de lesbophobie chez les moins de 18 ans ont eux doublé, principalement dans la famille et dans le milieu scolaire.

Une « argumentation » pseudo-écolo...La lesbophobie est donc une réalité au quotidien, et nécessite une vigilance et des positionnements clairs. C’est pourquoi il est d’autant plus grave de voir des individus, prétendument d’extrême gauche, saper volontairement la lutte centrale actuellement chez les lesbiennes, à savoir l’accès à la PMA pour toutes les femmes.C’est pourtant le cas d’Alexis Escudero avec son livre la Reproduction artificielle de l’humain. Après la tribune anti-PMA d’une poignée de militantEs EÉLV dans le journal la Croix en février 2013, après la sortie anti-PMA de José Bové en mai dernier, c’est de nouveau sous le drapeau de l’écologie que sont tenus des propos sexistes, homophobes et anti-féministes tels que la dénonciation de la « confusion entre égalité et identité biologique, entre émancipation politique et abolition de la nature » (p. 209) ou encore « Avec l’insémination artificielle tout est tellement plus simple ! Un coup de téléphone et le sperme est livré à domicile. (...) Plus besoin surtout d’entretenir un mâle à l’année, ce qui est contraignant et coûte trop cher pour le peu de fois qu’on s’en sert (et imaginez en plus s’il ne fait pas la vaisselle) » (p. 89)...Non seulement ce type d’élucubrations sert de point d’appui pour dénier les droits des lesbiennes (et des femmes en général) mais participe d’une légitimation des violences. Il constitue d’ailleurs une violence en elle-même pour toutes les femmes concernées. Il est donc extrêmement problématique que des librairies « militantes » proposent ce torchon et organisent même des rencontres avec l’auteur...

Chloé Moindreau (Paris)

 

Féminicide : désigner un crime pour le combattreLe mot « féminicide » va entrer dans la nouvelle version du Petit Robert (2015), pour désigner un crime pourtant vieux comme le monde : le « meurtre d’une femme, d’une fille, en raison de son sexe ».

Le terme a d’abord été utilisé en Amérique latine, notamment au sujet des meurtres de Ciudad Juarez (Mexique) : en moins de dix ans, plus d’un millier de femmes (souvent des prostituées, des travailleuses pauvres) ont été tuées dans cette région, dans une totale impunité. Ce sont les familles de victimes et les associations qui ont défendu, contre les autorités politiques et judiciaires, l’idée que ces crimes ne visaient que des femmes : elles ont alors imposé la reconnaissance du terme « féminicide ». Au Canada, le terme a également été utilisé lors du massacre de l’École polytechnique en 1989 : le tueur avait séparé les garçons des filles, pour ne tirer que sur les étudiantes. Quatorze femmes, professeures ou élèves, ont été tuées.En Europe, les femmes subissent aussi une violence spécifique qui peut aller jusqu’au meurtre : il faut rappeler que jour après jour, dans une relative discrétion, le nombre de femmes tuées s’accroît. À chaque 25 novembre revient ce sinistre décompte.

Inscrire le meurtre dans sa dimension politiqueLe terme « féminicide » permet donc de mettre en lumière la dimension sexiste d’un grand nombre de morts, de la petite Chinoise étouffée à la naissance à la jeune Pakistanaise lapidée « pour l’honneur », en passant par l’Américaine abattue par un « déséquilibré » ou la Française poignardée par un mari jaloux. Ces crimes concernent tous les continents, toutes les classes sociales et toutes les tranches d’âge, même si évidemment certaines spécificités peuvent aussi se croiser.Le fait de nommer implique aussi, bien sûr, de dénoncer. Il inscrit chaque meurtre, souvent réduit à un drame conjugal ou à l’acte d’un déséquilibré, dans une dimension globale, politique. Le féminicide est un « dommage collatéral » indissociable du système patriarcal que nous combattons, il s’agit donc de le faire connaître par l’usage de ce nouveau mot.La reconnaissance par le Petit Robert est une première étape symbolique. C’est aux féministes de l’imposer aussi dans les médias, pour que cesse la représentation romancée de « crimes passionnels », et de mener bataille pour que la justice (même bourgeoise et patriarcale) l’intègre dans sa législation : dans plusieurs pays d’Amérique latine, le délit de féminicide a été reconnu.

Catherine Stotzky (Metz)

 

Premières victimes des guerres...La violence contre les femmes est utilisée comme arme de guerre dans l’ensemble des conflits. Il s’agit avant tout d’une arme ayant pour but (et pour fonction) de terroriser les populations, de briser les familles, de détruire les communautés et, dans certains cas, de changer la composition ethnique de la génération suivante.

Le viol comme arme de guerre est un crime contre l’humanité. Il l’est parce qu’il est planifié, organisé, et a lieu en masse dans des conflits comme celui du Kivu (Congo) ou en Syrie, sans oublier la Bosnie et le Rwanda où le viol est devenu un outil à part entière du nettoyage ethnique. Lors du génocide au Rwanda de 1994, on inculquait aux jeunes hommes que le viol était un acte révolutionnaire... Et en Libye, Kadhafi utilisait le viol comme un outil de pression politique et de pouvoir.Dans tous ces conflits, le viol est un outil de barbarie et de pouvoir, appliqué à grande échelle dans une perspective militaire et conquérante, où l’autre est volontairement réduit à un objet déshumanisé.

L’impunitéPour les femmes qui ont été torturées ou violées en temps de guerre, il est souvent impossible de prétendre à des soins médicaux et à une réparation en justice. Dans l’ex-Yougoslavie, dans le nord de l’Ouganda, dans l’est du Congo et en Inde, la plupart des victimes de viol ne parlent pas par crainte d’être stigmatisées et bannies par la société ou par leur mari. De plus, les services de soins peuvent avoir été en partie ou totalement détruits par la guerre.Malgré l’horreur de ce crime qui a lieu à répétition et qui est loin d’être récent, tout est fait comme si cela n’existait pas. Parce que les victimes sont essentiellement des femmes, une véritable impunité existe. Il faut donc que ces violences contre les femmes dans le cadre des conflits soient jugées par la justice internationale au même titre que l’ensemble des crimes de guerre. Un long combat.

Sandra Demarcq (Paris)