Publié le Mercredi 10 décembre 2025 à 10h47.

Le mouvement des MNA pour le respect de leurs droits

Le mouvement national des mineurEs non accompagnéEs (MNA) s’est d’abord structuré à Paris avec la création du Collectif des jeunes du Parc de Belleville en 2023. Après avoir obtenu une première victoire, les mineurEs non accompagnéEs ont continué la lutte pour toutes celles et ceux qui dorment à la rue et pour faire reconnaître leurs droits.

Ce collectif est né de la nécessité, pour des centaines de jeunes exiléEs à la rue, de s’organiser pour ne plus subir l’abandon dans l’isolement. C’est ce collectif qui, par la suite, a impulsé la création de la Coordination nationale des mineurEs isoléEs, aujourd’hui présente à Paris, Rouen, Tours, Lille, Marseille, Besançon, Toulouse, Clermont-Ferrand, et appelée à s’élargir encore.

L’occupation de la Gaîté Lyrique a constitué un moment fort de visibilisation nationale de cette lutte, mais elle s’inscrit dans un combat plus ancien et plus large mené par d’autres collectifs de mineurEs pour obtenir un hébergement digne et l’accès réel à leurs droits. Partout, des jeunes dans la même situation se sont à leur tour organiséEs.

Les MNA, victimes d’une politique raciste de l’État, des départements et de l’Éducation nationale

À leur arrivée, après un parcours traumatisant, iels ne sont ni aidéEs ni protégéEs mais soumisEs à une première évaluation bâclée effectuée par les services des départements, de l’ASE, l’aide sociale à l’enfance (à Paris, service de la Mairie). Presque systématiquement, ces évaluations décrètent la non-minorité des jeunes sous le prétexte que leurs documents sont « faux ».

Dans certaines villes, l’ASE ordonne des tests osseux, reconnus non fiables, fixant une fourchette d’âge avec des marges de plusieurs années. Les mineurEs ont le droit de faire un recours qui dure des mois. En attendant, iels sont à la rue, sans aucun revenu, aucun hébergement, sans droit à la scolarisation. En Seine-Maritime, un recours sur deux donne gain de cause au jeune en reconnaissant sa minorité. Ce qui prouve que les évaluations ne valent rien. Mais le département s’acharne, fait appel et c’est reparti pour des mois d’attente.

Les institutions fonctionnent de concert : ASE, préfectures et Éducation nationale se renvoient la responsabilité, bloquant notamment l’accès à l’école en exigeant un tuteur légal fourni par l’ASE, ce qui ne figure pas dans les textes. L’Éducation nationale se soumet donc aux exigences de l’Aide sociale à l’enfance. Cette violence institutionnelle est désormais assumée publiquement, dans un contexte politique de plus en plus hostile aux personnes exilées.

Des collectifs auto-organisés et une coordination nationale

Dans de nombreuses villes, les MNA se sont auto-organisés en collectifs, rompant l’isolement et rendant visibles leurs revendications. Ces collectifs se sont regroupés dans une coordination nationale qui mutualise les expériences, organise des mobilisations communes et construit un rapport de force à l’échelle du pays.

Iels exigent le droit à l’hébergement inconditionnel, la reconnaissance de leurs documents, la présomption de minorité pendant les démarches, la scolarisation immédiate, l’accès aux soins, l’accès aux transports et à l’école.

Pour cela, iels mènent occupations, campements, manifestations et rassemblements devant les préfectures, départements, rectorats et mairies, comme à Rennes, Rouen, Paris, Lille ou Marseille. Iels font face à une répression policière régulière, parfois doublée d’attaques de l’extrême droite.

L’expulsion de Rennes et la gestion au coup par coup

À Rennes, l’expulsion de l’occupation de l’Espace social Simone-Iff, le 4 décembre, illustre cette politique nationale de tri et de dispersion. Si certaines personnes ont été relogées provisoirement, près de 40 mineurEs non accompagnéEs n’ont obtenu qu’un hébergement de quatre jours. Des violences policières ont été signalées. Cette énième expulsion montre à nouveau que l’État privilégie la répression et le saupoudrage d’urgence plutôt qu’une protection durable.

Un contexte politique dangereux et une loi arrachée par la lutte

Une proposition de loi, qui doit être examinée le 11 décembre à l’Assemblée nationale, prévoit la prise en charge immédiate des MNA par l’ASE dès leur présentation, le temps de l’évaluation de leur minorité. Cette proposition de loi est le fruit direct des mobilisations et, si elle était votée, constituerait une réelle avancée. Cependant elle reste largement insuffisante face à l’ampleur des besoins.

Dans le même temps, à l’approche des élections municipales, de nombreux candidats de droite et d’extrême droite assument ouvertement, dans leurs programmes, leur volonté d’expulser les MNA installés sous les tentes, comme à Paris. Cette offensive réactionnaire renforce l’urgence de la mobilisation.

Soutien à leur lutte

Les MNA obtiennent parfois des hébergements provisoires, des scolarisations ou des formations, mais l’État refuse toujours de garantir leurs droits sur le fond. Plus que jamais, associations, syndicats, partis et individus doivent soutenir leurs luttes. Défendre les MNA, c’est défendre le droit à la dignité, à la protection de l’enfance et à l’égalité des droits pour toutes et tous.

La Commission nationale immigration