Si les résultats électoraux de l’extrême droite demeurent moins élevés en Bretagne que dans le reste du pays, sa progression n’en est pas moins réelle. Les derniers mois ont vu une recrudescence des agressions de groupes violents plus nombreux et des tentatives d’implantation du RN et de Reconquête avec un certain succès. Mais la riposte s’organise.
En empêchant l’installation d’un centre d’accueil pour migrantEs à Callac (22), l’extrême droite a remporté une victoire importante. Le recul de la municipalité, malgré les mobilisations de soutien, a donné un mauvais signe. Quelques dizaines d’excités, dont la plupart n’étaient pas de la région, et la fachosphère très active en manifestant, en intimidant, en menaçant de mort — y compris les journalistes faisant leur travail d’information — ont su créer un climat de peur. Les tentatives de renouveler l’expérience à Saint-Brévin (44) ou à Dol-de-Bretagne (35) n’ont pas eu le même succès grâce aux mobilisations unitaires.
Néanmoins, à partir de ces événements, les partis et groupes fascistes ont senti des opportunités de construction. Pas moins d’une cinquantaine d’actes (tags, menaces, agressions physiques, tentatives d’incendie) ont été recensés depuis septembre 2022, tous effectués par des groupes violents ou des individus profitant de la progression électorale du RN et de la nouvelle place occupée par Reconquête. Si des plaintes ont été déposées et quelques rares arrestations effectuées, cela ne freine pas ces pratiques.
Les extrêmes droites défendent l’agrobusiness
Considérant la Bretagne comme une « terre de mission » les têtes d’affiche y viennent déverser leurs paroles racistes et antisociales non sans susciter des initiatives unitaires comme lors de la venue de Zemmour à Brest en juin 2023. En campagne pour les élections européennes, RN et Reconquête saisissent les occasions pour attiser la haine et créer le buzz. On aura ainsi vu Bardella venir soutenir les pêcheurs de Lorient lorsque des fileyeurs se virent obligés de rester au port pendant un mois pour diminuer la pêche accidentelle des dauphins. Pourtant les votes du RN concernant la pêche vont souvent à l’encontre des revendications des marins. Surfer sur la colère agricole est aussi l’occasion de soutenir les demandes de diminution des normes, c’est-à-dire dans bien des cas de favoriser l’agrobusiness en limitant les déjà trop faibles réglementations favorables aux écosystèmes. En votant pour l’extrême droite, certains petits paysans renforcent les politiques productivistes qui conduiront à leur propre disparition et à de nouvelles concentrations. Dans l’agriculture comme dans l’ensemble de l’économie, l’extrême droite roule pour les grands patrons.
Des collectifs unitaires pour une manifestation le 21 avril
Produit des politiques gouvernementales successives — depuis 2017 celles de la droite macroniste qui n’en finit pas de lui paver le terrain — et de la faiblesse et des divisions de la gauche incapable d’incarner une alternative à ces politiques antisociales, racistes, islamophobes, sexistes, transphobes, la progression des extrêmes droites doit être stoppée, en Bretagne comme ailleurs. Dans les cinq départements bretons des collectifs antifascistes existent. Des cadres unitaires se forment régulièrement ou de manière permanente pour contrer la présence et les discours fascistes. Dans les syndicats, des structures construisent VISA (Vigilance et initiatives syndicales antifascistes) pour contrebalancer la progression de l’extrême droite dans les entreprises et les services. Ces initiatives restent cependant limitées.
C’est pourquoi, après plusieurs agressions, s’est constitué dans les Côtes d’Armor (22) un Front commun antifasciste. Celui-ci appelle, fort du soutien de 80 organisations dont le NPA, à une manifestation régionale ce dimanche 21 avril — date symbolique — contre l’extrême droite, pour la justice sociale et la solidarité. À l’issue de cette journée se posera la question d’un front commun permanent avec le triple objectif de contrer les discours fascistes, de proposer des alternatives et d’organiser la protection des lieux, initiatives et militantEs de notre camp social.