Dix ans après les révoltes des quartiers populaires de 2005 (voir l’Anticapitaliste n°308), 10 000 personnes se sont rassemblées samedi à Paris, pour une Marche de la dignité et contre le racisme entre Barbès et Bastille. Un succès pour les organisateurs, qui sont d’abord des organisatrices : le collectif MAFED, réunissant des personnalités et des militantes d’organisations antiracistes, de l’immigration et des quartiers populaires, avec Angela Davis à la tête d’un large collectif de soutien. Les violences policières sont centrales dans la ségrégation que connaissent les quartiers populaires en France aujourd’hui, et donc dans les luttes des quartiers. Voilà la première raison d’un tel rendez-vous : donner toute leur place à des luttes qui existent déjà, locales et auto-organisées, pour la dignité et l’égalité. Derrière un carré de tête dynamique et combatif, se sont retrouvés Urgence notre police assassine, le Parti des indigènes de la République, le Front uni de l’immigration et des quartiers populaires, la Brigade antinégrophobie, la Voix des Roms, des collectifs contre les contrôles au faciès et les crimes policiers, des groupes féministes antiracistes, des antifascistes, des sans-papiers et des Chibanis en lutte, des manifestantEs des quatre coins de France... Soit les composantes d’un mouvement antiraciste en plein renouvellement. Les mots d’ordre ont décliné toutes les dimensions de la dignité des quartiers populaires : vérité et justice face aux violences policières, dénonciation des politiques islamophobes, de toutes les discriminations systématiques, et de l’impérialisme (Palestine, Françafrique...), réparation de l’injustice sociale et du racisme d’État. Autant de questions qui bousculent les priorités d’un mouvement ouvrier et social lui-même en crise, autant de questions qui fâchent. Et aussi autant de questions dont se sont emparés, en sens inverse, aussi bien les partis au pouvoir que le FN. On ne peut ignorer ces questions difficiles, l’orage ne passera pas. L’impérialisme et le racisme constituent l’un des deux piliers de la stratégie de ceux qui nous gouvernent, avec l’austérité. Face à cette double logique, il y a urgence à lutter contre les deux faces d’une même politique antidémocratique, ultra-autoritaire. Cette Marche de la dignité, portée par un effort d’auto-organisation des oppriméEs, est source d’espoir : elle ne devra pas rester sans suites.
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Marche pour la dignité et contre le racisme. Photothèque Rouge / JMB