Le monde s'enfonce dans la crise capitaliste sans que quiconque ne soit capable d'en estimer l'ampleur et la durée.
« Et si on s'en sortait ? Les chiffres qui font espérer » lisait-on récemment à la une du Point. En janvier, un regain de consommation de 1,7% avait déjà déclenché l'enthousiasme, avant d'être refroidi par une baisse de 2% le mois suivant. La moindre amélioration conjoncturelle donne lieu à des spéculations médiatiques sur une reprise prochaine. La profondeur de la récession ne fait pourtant que se confirmer.
Obama venait à peine de faire des déclarations sur les premiers « signes de progrès économique » que de nouvelles statistiques venaient démentir ses propos : recul des prix de détail et de la production industrielle, chute de 6,1% en rythme annuel du PIB au premier trimestre. Les bénéfices de quelques banques ne doivent pas faire oublier qu'aux Etats-Unis la solvabilité du système bancaire n'est toujours pas acquise. Les « tests de résistance » auxquels ont été soumises les banques américaines, montrent que la moitié d'entre elles auraient encore besoin de fonds malgré les renflouements.
Parce qu'elle rechigne encore à nationaliser au-delà de Citigroup, l'administration Obama a mis sur pied le « plan Geithner ». Mais il n'est pas du tout certain que cette usine à gaz, pouvant mobiliser jusqu'à 2000 milliards de dollars, permette de débarrasser les bilans des banques des actifs toxiques sans passer par leur nationalisation. Les pertes sur les titres émis depuis les Etats-Unis sont évaluées entre 2200 et 3600 milliards de dollars. Seulement 30 à 50% de ces pertes ont été déjà réalisées. Il reste donc beaucoup à écluser.
La dynamique de la crise repose sur son caractère planétaire. Or, le commerce mondial diminue plus vite que durant la crise de 1929. En Chine, le ralentissement de la croissance est certes moins sévère que prévu. Mais des pays comme le Japon (deuxième économie mondiale) ou l'Allemagne (première économie européenne) connaissent de très graves difficultés avec la chute de leurs exportations. Pour l'instant, il n'y a pas de modèle de rechange au sein du capitalisme mondial parce que ni les inégalités sociales ni l'endettement américain ne sont remis en cause. Des tensions vont apparaître entre les bourgeoisies nationales et se cristalliser autour du commerce et des taux de change. A terme, le système monétaire mondial pourrait se fragmenter, accroissant ainsi l'instabilité.
En Europe, les économies d'Irlande, d'Espagne, du Royaume-Uni et d'Allemagne sont plus durement touchées que la moyenne, chacune pour des raisons différentes. Quant aux nouveaux pays membres de l'UE, ils subissent la chute des investissements directs. Le pacte de stabilité et les actions de la Commission pour la « concurrence » ont certes été remisés au placard. Mais, comme au niveau mondial, l'ancien modèle disparaît sans qu'un nouveau apparaisse. Et comme partout, on tente de faire payer aux travailleurs la crise du système capitaliste.