Niché dans le parc naturel régional du Pilat, le village de Saint-Julien-Molin-Molette est doté de nombreux atouts. Près de la vallée du Rhône mais à l’écart des grands axes, il possède un magnifique panorama sur les Alpes, de nombreux chemins de randonnée et une vie associative et artistique dynamique. Pourtant, ce village se dépeuple.
En cause, une carrière de granite mangeant petit à petit la montagne, exploitée par Delmonico-Dorel, qui ne cesse d’obtenir des autorisations d’exploitation et d’extension.
En 2005, le préfet autorise l’exploitation du site jusqu’en 2020. Saisi par l’association Bien vivre à Saint-Julien, le tribunal administratif de Lyon casse l’arrêté préfectoral, contraire à la charte du parc du Pilat. Mais la décision est annulée en appel, au motif que, bien qu’elle ait raison sur le fond, l’association n’a pas qualité pour agir.
Impact calamiteux pour les riverains
En 2014, Delmonico-Dorel veut agrandir l’exploitation, et évoque un volume de 500 000 tonnes par an jusqu’en 2050 contre 150 000 actuellement. En réaction, la mairie de Saint-Julien vote début 2017 un plan local d’urbanisme (PLU) qui empêche l’extension. Il faut dire que l’impact de la carrière est calamiteux pour les riverains. La seule voie d’accès traverse le village, les 200 camions quotidiens, pas toujours bâchés, rasent les maisons, répandent de la poussière dans les rues et sur le linge, se renversent parfois. La rivière est polluée, le paysage défiguré, les maisons à vendre se multiplient sans trouver d’acquéreurs.
De plus, les matériaux extraits présentent une radioactivité naturelle 4 à 8 fois supérieure à la moyenne de l’écorce terrestre. La CRIIRAD l’a dénoncé en 2008, mais sans réaction à l’époque. Depuis 2013, la situation a changé : une directive européenne impose de procéder à la caractérisation radiologique des matériaux de construction potentiellement radioactifs, notamment du granite.
Valeurs limites d’exposition dépassées
Le préfet a décidé de déclarer le projet d’intérêt général, ce qui lui permettra de modifier d’autorité le PLU et d’autoriser l’extension. Dans ce cadre, une enquête publique a été ouverte en octobre 2017.
Le dossier partial est truffé d’erreurs. On y lit par exemple qu’il s’agirait de la seule carrière de roches dures à 40 km à la ronde. Or le collectif de riverains de Saint-Julien en a recensé au moins 4. Le risque lié aux poussières (le seul risque identifié dans le dossier) est qualifié de « très faible pour le personnel », et a fortiori pour les riverains, alors que les contrôles réglementaires révèlent que les valeurs limites d’exposition professionnelle sont dépassées pour 3 des 4 paramètres contrôlés !
La CRIIRAD vient de demander la suspension de l’enquête publique, au motif de l’absence d’étude sur la radioactivité des roches et sur les risques d’exposition, interne et externe, qu’elle induit pour le public et les travailleurs.
Espérons que cette action aboutira et que, sous la pression des habitantEs et associations locales, ce PII (projet inutile et imposé) sera définitivement abandonné.
Commission nationale écologie