Mardi 12 décembre, sur l’île Seguin, sur la Seine, haut lieu de l’industrie automobile jusqu’en 1992 et des luttes ouvrières, s’est réuni, à l’initiative de Macron, un sommet mondial de « ceux qui comptent » : une soixantaine de chefs d’État ou de gouvernement, des porte-parole de multinationales, d’institutions publiques ou philanthropiques.
L’entre-soi habituel des « décideurs ». Une coproduction de la Banque mondiale et de l’ONU, des stars-paillettes pour faire le show, Bill Gates, Sean Penn, Arnold Shwarzenegger, Macron en maître de cérémonie et un thème central : « la finance verte ». Le spectacle pouvait commencer.
Une lucidité de façade...
Venant deux ans après l’« Accord de Paris », quelques semaines après la COP23 de Bonn, ce sommet se voulait une « réunion de chantier ». Un sacré chantier en effet après la sortie des États-Unis de l’accord ! Macron s’est présenté plus que jamais en bâtisseur d’un monde nouveau car « il est plus que temps ». Il a d’abord pris soin d’afficher une prise en compte réaliste d’une situation dramatique : « on est en train de perdre la bataille, nous allons vers + 3 °C, + 3,5 °C de réchauffement », alors que l’accord de Paris s’était bâti sur l’objectif de + 2 °C maximum (sans aucune mesure contraignante). Sur ce versant de l’argumentation, il a été bien secondé par Nicolas Hulot, deuxième ministre le plus fortuné du gouvernement : « les énergies fossiles ne sont plus la solution, elles sont devenues le problème » ; « quand on se fixe un objectif, un gouvernement ne peut revenir sur ses engagements ». Incroyable aplomb de celui qui vient de renier son faible engagement pris sur la réduction du nucléaire…
… mais vite, retour au « pragmatisme »
Mais après ces déclarations d’intention, le « pragmatisme » a repris le dessus et, si les annonces se sont multipliées, on a eu surtout l’impression d’assister à un concours de com’.
Avec AXA, tout d’abord, qui annonce son désinvestissement massif du charbon. Tout comme HSBC, cette banque pourtant sous les feux des projecteurs à l’occasion de ses exploits récents en matière d’évasion fiscale. Le Crédit Agricole est aussi de la partie. Société Générale et Natixis annoncent l’arrêt des financements d’opérations pétrolières dans le Grand Nord. Comme au Téléthon, ça grimpe, ça grimpe, mais en milliards d’euros… On s’embrasse ! Le groupe Engie aussi veut être sur la photo, on se pousse un peu, voilà…
C’est finalement Bloomberg, l’ex-maire de New York, qui mettra un terme à l’euphorie qui aurait pu gagner un spectateur un peu naïf : « L’initiative volontaire c’est toujours mieux que la législation ». Douche froide. « La finance est essentielle. La finance n’est pas l’ennemi ». Et, de fait, tout ici n’est qu’annonce, affichage. Aucune contrainte. Opacité maximale. Missionné par le G20, Bloomberg avait la mission « d’inciter les entreprises » à jouer franc-jeu avec les financeurs… Degré zéro de la démocratie.
« Green business is good business » ?
Le chaos écologique de la planète n’est pas une affaire simple. Ni pour les peuples évidemment ni même pour les grands groupes capitalistes. Ils vont sans aucun doute tout faire pour retomber sur leurs pieds, mais cela ne se fera pas sans peine. Ainsi, dans l’immédiat, ils poursuivent leurs affaires carbonées allègrement, loin des grand-messes médiatiques. L’économie mondiale continue de consacrer beaucoup plus d’argent aux énergies fossiles qu’aux actions d’économie d’énergie et aux renouvelables. Et ça crache le CO2 comme jamais… 250 milliards d’euros ont été investis dans le charbon depuis la COP21 par les 120 plus grosses entreprises du secteur, annoncent les Amis de la Terre France. Attac indique même que les investissements dans les énergies renouvelables ont baissé de 23 % en 2016. La messe est dite…
Seules des solutions radicales passant par une véritable remise en cause du mode de production seront à la hauteur des enjeux. La planète n’en peut plus, les populations les plus exposées non plus…
2018 verra la création d’un site « One Planet ». Alors, une seule humanité ? Évidemment ! Avec l’impératif absolu d’hospitalité : ouvrons les frontières !
Commission nationale écologie