Preuve de la défiance envers la clique au pouvoir, à la veille de la pantalonnade parlementaire sur le 49.3, Macron a été mis en échec à l’Assemblée nationale sur son projet de loi « d’accélération du nucléaire »
Le 15 mars, les députéEs ont voté contre la suppression de l’IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire), introduite via les amendements surprise 11 bis et 11 ter. Une énorme baffe pour Macron ! Lui qui avait tout manigancé dans le huis clos d’un conseil de politique nucléaire tenu le 3 février. Pourtant, ni ce conclave ni les basses manœuvres des lobbyistes patentés de l’industrie nucléaire qui siègent à l’Assemblée n’auront suffi à convaincre les députéEs.
L’Assemblée a entendu les grévistes
Car, en lutte depuis le 8 février, les 1 750 salariéEs de l’IRSN se sont invités dans le débat. Des actions quotidiennes, entre deux grèves nationales interprofessionnelles sur les retraites, et 3 jours de grèves et de manifestations appelées par l’intersyndicale CGT-CFDT-CGC ont mobilisé à chaque fois une bonne moitié du personnel (900 manifestantEs le 13 mars). Leur refus d’être mis sous la coupe des 5 commissaires de l’ASN (Autorité de sûreté nucléaire) nommés par la président et ses alliés politiques repose sur une évidence, qui a ébranlé les députéEs : le contrôle technique des installations nucléaires ne doit pas être sacrifié à la politique du « nucléaire à marche forcée ». À part les négationnistes du risque comme Macron, une majorité d’entre eux n’assume pas qu’accélération du nucléaire rime avec accident nucléaire. Malgré les votes du RN, qui a volé au secours du gouvernement, le projet a été rejeté… avec 2 voix d’écart. Une première victoire, résultat d’une lutte déterminée.
Mais la députée macroniste Maud Bregeon, transfuge d’EDF, manœuvre en coulisses pour faire passer la loi en 2e lecture au Sénat dès le 21 mars, durcissant au passage la peine d’intrusion de militantEs écologistes dans une centrale (deux ans de prison et 30 000 euros d’amende).
Omerta et répression d’État
Pour prolonger les réacteurs jusqu’à 80 ans, mettre en service EPR puis imposer la décharge radioactive Cigéo, Macron veut lever les obstacles du vieillissement, des malfaçons et falsifications de conformité qui minent la filière, en bâillonnant le contrôleur technique IRSN. Ses rapports d’expertise ne seraient pas rendus publics avant 2 ans, la vulnérabilité au dérèglement climatique serait négligée et les dérogations facilitées. L’ASN aurait à gérer une étrange « simplification administrative » : absorber l’IRSN (trois fois l’ASN), soit 90 % des experts techniques, muselés par 5 commissaires politiques aux ordres de Macron. Un passage en force de la loi fragiliserait dangereusement la sûreté de toute la filière, nous rapprochant d’une catastrophe. D’autant que les problèmes de vieillissement se multiplient, comme les fissures de fatigue thermique à la centrale de Penly, un « trou dans la raquette » inattendu, découvert par hasard. Comme bien d’autres qui restent à détecter mais qui, l’IRSN une fois dissoute, seraient alors rarement dévoilés, voire tenus secrets pour ne pas gêner le business de l’industrie nucléaire.
Au-delà des risques technologiques, cette obsession du « nucléaire à marche forcée » est l’expression d’un totalitarisme insupportable, fondé sur l’omerta et la répression d’État. Alors, pour combattre cette société antidémocratique et mortifère, contre le nucléaire et son monde, rendez-vous le 3 juin à Bure !