Estimant les États-Unis maltraités dans le commerce international, Trump, devant un parterre de syndicalistes de l’automobile réunis à la Maison Blanche, a annoncé des mesures qui ne seraient rien de moins qu’une « déclaration d’indépendance » économique…
Les droits de douane fonctionnent sur le même principe qu’une taxe mais transfrontalière, ils viennent augmenter le prix des produits importés. Ainsi, un droit de douane de 20 % conduit à ce qu’un bien importé valant 100 dollars voit son prix augmenter à 120 dollars une fois sur le territoire étatsunien.
Avec ces mesures, Trump vise quatre objectifs économiques : une réduction du déficit commercial (les États-Unis importent davantage qu’ils n’exportent) ; une réindustrialisation ; des créations d’emplois et des recettes fiscales permettant de compenser la diminution des recettes fédérales à venir du fait des baisses d’impôts promises. Ces objectifs seraient atteints par trois effets. Les entreprises étrangères vont s’implanter pour produire sur place afin de contourner les barrières douanières. La production intérieure va remplacer les importations. Et les droits de douane perçus sont des recettes fiscales directes. Mais Trump se garde bien de mettre en avant les conséquences à court terme : hausse des prix des biens pour les ménages, qui pourraient perdre 3 800 dollars de pouvoir d’achat, hausse des coûts de production pour les entreprises (inflation) et représailles des autres pays.
Une politique qui a déjà échoué et précipité le monde dans la guerre
Le même type de mesures furent déjà prises par Trump en 2018 et 2019, sans aucun effet sur le déficit commercial ni sur l’emploi, produisant des recettes douanières anecdotiques (entre 1 et 2 % du budget fédéral). Pas de quoi compenser les baisses d’impôts !
Surtout, c’est le type de mesures que l’ensemble des pays industrialisés appliquèrent dans les années 1930, alimentant une spirale dépressive (les importations des uns étant les débouchés des autres, toute mesure visant à restreindre les importations conduit à réduire la production mondiale…) et inflationniste. C’est d’ailleurs ce scénario de la stagnation économique et de l’inflation qui affole le FMI, la Banque mondiale et les places boursières de la planète.
Une accentuation du nationalisme autoritaire
La hausse des droits de douane est-elle provisoire, à des fins de négociation politique et commerciale (comme avec le Mexique ou le Venezuela), ou bien un choix économique de long terme ? Difficile de trancher à ce stade. En revanche, dans le cadre d’une accentuation de la concurrence inter-impérialiste pour récupérer les fruits d’une croissance mondiale atone et contrainte par la baisse des taux de profit, il semble clair que Trump a fait le choix de revenir à la guerre commerciale et au protectionnisme économique des années 1930. C’est un changement de paradigme qui enterre la manière dont les relations commerciales entre impérialismes étaient gérées jusque-là — c’est-à-dire par des négociations régulières visant l’abolition des droits de douane, de manière différenciée selon les secteurs et la richesse des pays. Et c’est un pas de plus dans le développement d’un nationalisme autoritaire qui voit dans la fermeture des frontières une réponse à la crise.
Un début de contestation
Trump pourrait bien sortir fragilisé de la séquence actuelle si ses annonces ne conduisent pas très vite à une amélioration de la position du capitalisme étatsunien dans les rapports internationaux (par des accès aux ressources ou des accords commerciaux avantageux). Les licenciements dans les services publics et la chute des cours boursiers affectent d’ores et déjà le pouvoir d’achat et l’épargne de millions d’ÉtatsunienEs, dont l’électorat de Trump. La perte de l’élection à la Cour suprême locale dans le Wisconsin début avril (où Musk s’était particulièrement investi), les critiques qui émanent du camp républicain lui-même et, surtout, les milliers de manifestantEs réuniEs dans les quelque 1 200 rassemblements du mouvement « Hands Off » (voir article page 4) montrent qu’un retournement est peut-être en train de s’opérer.
William Donaura, groupe de travail économie