Depuis le 22 novembre dernier, les salariéEs d’un des deux Carrefour de l’île, ainsi que ceux du magasin Promocash, sont en grève contre leur direction, soutenus par les syndicats UGTG et CGT. Ils et elles ont passé leur réveillon de Noël sur le site.
La grève a été déclarée suite à une provocation de la direction : celle-ci voulait profiter des ordonnances Macron pour négocier un nouvel accord d’entreprise revenant sur nombre d’avantages acquis, en particulier sur certaines primes (ancienneté, transports, vacances, prime Bino obtenue après la grève générale de 2009). La ponction pouvait atteindre de 1 600 à 2 000 euros par an pour les 260 salariéEs. On comprend la colère des intéresséEs. Au début, les patrons ont essayé d’embaucher des intérimaires pour remplacer les grévistes, mais l’inspection du travail, alertée, leur a intimé l’ordre d’arrêter.
Les grévistes sont soutenus par la population et reçoivent des dons en nature et en argent pour les aider à tenir. Des auditeurEs ont même lancé à la radio un appel au boycott des magasins appartenant à la richissime famille Despointes.
Les patrons : la famille Despointes
Cette famille est bien connue en Guadeloupe pour être une des grosses et riches familles békés qui ont la mainmise sur une grande partie de l’île et y font la pluie et le beau temps au niveau économique. Ils possèdent notamment l’usine Gardel, dernière sucrerie de Guadeloupe, et surtout la SAFO, un groupe consacré à la grande distribution, comptant 108 magasins, parmi lesquels l’hypermarché Milénis, qui en est son « navire amiral ».
La famille Despointes, c’est celle de ce patriarche qui avait expliqué, dans une excellente émission en 2009 sur les descendants d’esclavagistes, qu’il y avait de « bons côtés à l’esclavage » et ajouté qu’il fallait « préserver la race » : « Quand je vois des familles métissées avec des Blancs et des Noirs, les enfants naissent de couleurs différentes, il n’y a pas d’harmonie ». Il avait été condamné deux fois pour « crime contre l’humanité », puis... réhabilité par la Cour de cassation. Le reportage montrait déjà les entrées de ces gens-là dans les cabinets ministériels et leur influence parmi le monde politique de métropole.
Cette même famille avait porté plainte en 2013 contre la CGT Guadeloupe pour un tract où il était écrit que la famille « avait bâti sa fortune sur la traite négrière, l’économie de plantation et l’esclavage salarié ». La justice aux ordres avait condamné la CGT à 53 000 euros d’amende ! Mais en métropole, le journal l’Humanité, qui avait publié les mêmes propos, avait été acquitté. Selon que vous serez....
En plus du Noël pour les enfants et collègues sur le piquet de grève, un meeting a été organisé à la fin décembre, à l’entrée du parking. Les autres salariéEs ont été appelés à rejoindre le mouvement, et les grévistes ont pu constater qu’ils bénéficiaient de la sympathie et du soutien de nombreux travailleurs. C’est important car la partie qu’ils jouent est rude contre ces requins.
Régine Vinon