Lundi 3 mai, à 6h30 du matin, une quarantaine de peintres du Pôle peinture d’Airbus Aviation à Toulouse ont cessé le travail à l’appel de la CGT.
Nous n’étions que quatre à connaître la date et l’heure de ce débrayage mais tous les peintres étaient partants. Nous voulions éviter les fuites, car trop de gens bien intentionnés seraient venus nous expliquer que ce que nous faisons, c’est pas bien…
Une longue liste de revendications
Cela faisait plusieurs semaines que l’idée de marquer le coup face à la direction faisait son chemin. Nous avions déjà arrêté une date il y a trois semaines, mais le projet est tombé à l’eau du fait d’un trou dans le planning et donc du renvoi des salariéEs en activité partielle. Mais cette fois, c’était la bonne.
Ras-le-bol de voir des acquis sociaux disparaître : suspension de l’horaire variable le temps de l’APLD (activité partielle de longue durée), et la direction ne cache pas sa volonté de le supprimer, lundi de Pentecôte travaillé, ce qui n’était pas le cas jusque-là, intégration d’une prime de salissure dans le salaire de base mais le compte n’y est pas, suppression d’une prime peinture pour certains métiers qui la touchaient jusqu’alors.
Bien sûr, le secteur du transport aérien a été touché par la crise du covid, mais tout le monde sent bien à l’usine que la pandémie a servi d’accélérateur pour la direction qui avait déjà un plan dans les tuyaux, qu’elle déroule grâce à la complicité des syndicats majoritaires dans la boite.
Ensuite la direction vient de publier les résultats pour le premier trimestre : 363 millions d’euros de bénéfice net et une trésorerie de 1,2 milliard d’euros.
Nous nous sommes donc retrouvés à une bonne quarantaine, nous avons voté à main levée notre liste de revendications ainsi que le fait de tenter d’aller faire débrayer les chaînes d’assemblage de l’A350 et de l’A320.
Fiers d’avoir osé
Nous voilà donc partis, nous sommes passés par le bâtiment des « pistards » qui font des retouches peinture juste avant livraison au client. Là, un copain CGT nous a suivis. Ensuite nous sommes passés à la chaîne d’assemblage de l’A350. Là, malgré la présence de délégués FO qui expliquaient aux salariés qu’ils faisaient un abandon de poste s’ils se mettaient en grève, une dizaine de techniciens d’essai nous ont rejoints. Ensuite nous sommes partis en direction de la chaîne A 320 et là, même topo, les délégués FO avaient fait le travail en disant aux salariés que c’était une grève CGT et que donc s’ils nous rejoignaient, ils ne seraient pas couverts. Il faut comprendre qu’Airbus n’est pas un désert syndical : sur les chaînes, 90% du personnel est syndiqué… à FO. Sur ces chaînes, les salariés sont très jeunes et la CGT n’est pas implantée, et donc les pressions des délégués FO ont porté leur fruits : personne ne nous a suivis.
On ne s’est pas laissé démonter et on est partis manifester sous les fenêtres de la direction qui nous a reçu, à trois. Elle nous a écoutés poliment mais n’a pris aucun engagement. Cela ne dit personne ne se faisait d’illusion. Nous sommes retournés à la peinture, fiers d’avoir osé.
L’après-midi, l’équipe de la salle 35 du Pôle peinture a débrayé en essayant d’entrainer avec elle les équipes des salles 32 et 33, mais sans succès.
Dans les jours qui ont suivi, dans beaucoup de secteurs de la boîte, tout le monde ne parlait que de ça ; des salariés ont osé, et contre l’avis du syndicat majoritaire. Des graines ont été semées. La direction peut se gratter la tête….