Publié le Jeudi 18 juillet 2024 à 19h00.

Afrique de l’Ouest : rivalité et division entre dirigeants

Les deux structures concurrentes des pays d’Afrique de l’Ouest ne peuvent prétendre incarner une politique panafricaniste qui est d’abord et avant tout l’affaire des peuples. 

 

À quelques heures d’intervalle, deux sommets des pays d’Afrique de l’Ouest se sont tenus. Le premier, celui de l’Alliance des États du Sahel, regroupant le Mali, le Burkina Faso et le Niger, dirigés chacun par des juntes militaires ; le second, celui de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) regroupant les 13 autres pays.

Une nouvelle confédération

Samedi 6 juillet à Niamey, capitale du Niger, a eu lieu la réunion des trois pays sahéliens annonçant la création de la Confédération des États du Sahel. Elle vise à renforcer leurs liens par la formation d’une force commune contre les rebellions notamment djihadistes, ainsi que l’adoption d’un pacte de défense réciproque. D’autres mesures ont été adoptées comme la mutualisation des moyens pour l’agriculture, les transports, l’énergie, l’eau, etc. La mise en place d’une monnaie commune est évoquée. Il est envisagé de fonder une banque d’investissement et un fonds de stabilisation. À cela s’ajoute la promotion des langues locales dans les médias nationaux.

Certains observateurs soulignent que l’addition des faiblesses ne fait pas une force. La situation, tant économique que sécuritaire, se dégrade. Les coupures incessantes d’électricité dans les capitales et l’inflation sont loin d’être surmontées. Dernièrement l’aéroport de Bamako au Mali a été paralysé faute de carburant pour le ravitaillement des aéronefs.

Dans les trois pays, les djihadistes réussissent à mener des attaques meurtrières contre les forces armées alors que ces dernières, avec la participation de leurs supplétifs russes, ne cessent de commettre des exactions. Ainsi à Takalote, les militaires maliens et mercenaires russes ont tué huit personnes. Ces dernières n’étaient pas des islamistes, elles appartenaient à la milice pro-gouvernementale dirigée par le général El Hadj Ag Gamou, actuel gouverneur de la région de Kidal. 

Le sommet de la Confédération s’est terminé par l’officialisation de la rupture avec la CEDEAO jugée trop proche de l’Occident et de la France en particulier.

Une CEDEAO décriée

En effet, cette structure en réponse aux coups d’État a institué en toute illégalité un blocus économique et pour le Niger a même envisagé une intervention militaire.

Certains évoquent un risque d’éclatement de la CEDEAO. Le tout nouveau président du Sénégal a été missionné pour tenter de ramener au bercail les trois pays sahéliens qui ont fait sécession. Son positionnement souverainiste devrait aider à renouer le dialogue même si le succès de cette entreprise paraît peu probable.

Les dirigeants de la CEDAO rencontrent eux aussi les mêmes problématiques notamment sur les questions sécuritaires avec des interventions de plus en plus fréquentes des djihadistes sur les pays côtiers, particulièrement au Bénin et au Togo. Le projet d’une force commune armée autour de 5 000 hommes rencontre une difficulté de taille, celle de son financement évalué à près de 2,6 milliards de dollars.

Enfin le président du Nigeria, Tinubu, a été reconduit à la présidence de la CEDEAO même s’il semble plus préoccupé par la situation économique catastrophique de son pays.

Le panafricanisme par et pour les peuples

Confédération et CEDEAO sont des instruments contre les populations. La première rassemble des auteurs de coup de force qui entendent bien s’éterniser au pouvoir. Leur confédération a été fondée sans aucun débat dans leurs pays respectifs qui connaissent tous des violations des droits humains.

Quant à la CEDEAO, elle n’a eu de cesse d’entériner les farces électorales et autres manœuvres constitutionnelles visant à maintenir au pouvoir des présidents à vie ou à organiser des successions dynastiques.

La mise en place d’une politique authentiquement panafricaniste ne peut faire l’économie d’une participation pleine et entière des populations favorisant le respect des droits démocratiques, aux antipodes de la CEDEAO ou de la Confédération car l’une n’est qu’une amicale des présidents (pour la plupart) mal élus, l’autre un syndicat de putschistes.