Presque épargnée par la première vague, cueillie à froid par la seconde, l’Allemagne est en passe de connaître la pire vague depuis le début de la pandémie.
Si le nombre de cas s’est stabilisé ces derniers jours à environ 55 000, le nombre de morts (plus de 300 par jours) et d’hospitalisations croît toujours. Dans certaines régions de la Saxe ou de Thuringe, où la réticence au vaccin est particulièrement élevée, la pauvreté et le chômage endémiques depuis la réunification, le taux d’incidence est au-dessus de 2000.
Nouvelle vague d’impréparation
Après l’été, le gouvernement a commencé à fermer des centres de vaccination, alors que la couverture stagnait à moins de 70%, et rendu les tests payants. Le ministre de la Santé déclarait déjà que l’état d’urgence sanitaire touchait à sa fin pour les vaccinéEs. Aujourd’hui les centres ont rouvert et des personnes âgées attendent des heures dans les files d’attente à des températures proches de zéro pour leur piqûre de rappel. On discute d’une obligation vaccinale pour les soignants, les établissements publics doivent appliquer les règles « 2G » (ne sont acceptés que les vaccinés et les guéris du covid), les rassemblements privés en présence de personnes non-vaccinées sont restreints, et le masque à l’école redevient systématique. Le gouvernement en est réduit à attendre avec espoir les vacances de Noël… mais répète encore que les contaminations n’ont pas lieu au travail ou à l’école !
Les hôpitaux sous pression
Dans les hôpitaux, les services commencent à être surchargés. Pas de surprise : presque deux ans après le début de la pandémie, le nombre de lits de réanimation… a été réduit de 3000 à 5000 ! Il faut dire qu’une partie était fictive, car déjà lors des précédentes vagues, le problème n’était pas tant l’absence d’équipement que le manque criant de personnel. Un manque qui s’est encore accentué depuis, avec de nombreuses démissions et des arrêts maladies. Si on en n’est pas encore à trier les patientEs à l’entrée comme en Autriche, les opérations « non-essentielles » sont systématiquement déprogrammées.
Les soignantEs sont bien conscients des problèmes : à Berlin, 50 jours de grève ont été nécessaires pour arracher des augmentations de salaires, des améliorations sur les conditions de travail et des promesses (vagues) d’embauches. De nouvelles grèves étaient annoncées, avec des rassemblements importants en préparation, pour les négociations collectives des services publics (dont les cliniques publiques et universitaires).
Malgré la volonté évidente exprimée par les salarié de poursuivre le mouvement, le syndicat ver.di a fièrement annoncé le 29 novembre un accord « surprise » : une prime de 1300 euros… et aucune augmentation de salaire avant décembre 2022, ensuite est prévue une revalorisation de 2,8 %. C’est sur les réseaux sociaux que les salariéEs ont exprimé leur colère contre cet accord, d’autant que le même jour, la presse annonçait 5,2 % d’inflation pour l’année écoulée ! Une quatrième vague et une réduction de salaire joliment emballée par des rubans patronaux et syndicaux : on a vu mieux comme cadeau de Noël !
Le cas de l’Allemagne nous montre aussi ce qui nous attend : sans investissement dans la santé, sans embauches et augmentations de salaires, sans la levée des brevets pour une vaccination systématique jusque dans la pays pauvres… on subira l’alphabet grec jusqu’au bout.