Le 31 mars, l’Otan prenait en main les opérations militaires en Libye avec la mission officielle « de protéger les civils et les zones civiles de la menace d’attaques ». Le lendemain, treize insurgés anti-khadafistes étaient tués sous des bombardements. Une sanglante bavure qui illustre l’hypocrisie de l’Otan et de ses commanditaires. Il est évident que l’intervention militaire ne peut que provoquer des victimes et des dégâts dits collatéraux, mais les grandes puissances s’en moquent. La « protection du peuple libyen » n’est pas leur objectif. Ce n’est qu’un prétexte pour une intervention qui vise à garder la main sur la Libye et son pétrole, et plus largement à faire pression sur les peuples d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient pour contenir le processus révolutionnaire dans les limites que les USA entendent leur imposer : celles d’une « transition démocratique » qui préserve l’ordre libéral et impérialiste, leur domination. C’est bien pourquoi il n’est pas question pour l’Otan d’armer les insurgés. Les grandes puissances gèrent un rapport de forces contre la révolution en ménageant leur ancien allié, le dictateur devenu embarrassant et préparent la transition en espérant pouvoir s’appuyer sur le Conseil national de transition (CNT). Après la France et le Qatar, l’Italie a décidé de reconnaître celui-ci comme « le seul interlocuteur légitime ». Kadhafi n’a pas réussi à reprendre le contrôle de la situation et des défections apparaissent dans son propre camp après celle du ministre des Affaires étrangères, Moussa Koussa. Deux de ses fils auraient proposé une transition vers une démocratie constitutionnelle qui prévoirait le retrait de leur père. Dans la nuit de lundi à mardi, le porte-parole du gouvernement libyen a affirmé que le régime était prêt à négocier toute forme de réforme politique, comme des élections ou un référendum, tout en rejetant un départ du dictateur : « Le leader est la soupape de sécurité pour le pays et pour l’unité de la population et des tribus. Nous pensons qu’il est très important pour toute transition vers un modèle démocratique et transparent. » Kadhafi tentent de négocier sa survie en tant que « soupape de sécurité », le plus à même de préserver l’ordre. Pour les grandes puissances, il ne peut plus y avoir de négociation avec leur ancien allié. « Nous ne recherchons pas de stratégie de sortie pour Kadhafi » a déclaré le porte-parole de David Cameron, le Premier ministre britannique. Les grandes puissances voudraient faire de la Libye la plaque tournante de leur politique de reprise en main de toute la région contre les peuples, de leur contre-offensive. Dans le rapport de forces qu’ils entendent construire en leur faveur, ils laissent du temps à Kadhafi pour mieux maîtriser les insurgés. Ils s’opposent au droit du peuple libyen à décider de son propre destin.
Non à l’intervention impérialiste ! Halte aux bombardements ! Dehors Kadhafi ! Solidarité avec le peuple libyen et le processus révolutionnaire du monde arabe.
Yvan Lemaitre