Comme pour l’Irak ou l’Afghanistan, les puissances impérialistes prennent prétexte d’objectifs humanitaires pour intervenir en Libye. Pour autant, il est impossible de leur faire confiance et seuls les peuples pourront se débarrasser du tyran Kadhafi. C’est bien une guerre que la coalition internationale a engagée en Libye après le vote par le Conseil de sécurité de l’ONU, le 17 mars, de la résolution 1973 qui autorise « une zone d’exclusion aérienne ». En clair, l’ONU a donné son feu vert à l’intervention militaire des grandes puissances qui ont toute latitude pour bombarder le pays. Juppé plastronne, ce serait un « succès » qui aurait permis d’éviter « un bain de sang » à Benghazi. « Nous intervenons pour permettre au peuple libyen de choisir lui-même son destin », prétendait Sarkozy. Il ne se soucie guère du sort du peuple libyen lui qui, il y a peu, recevait en grande pompe Kadhafi, qui se déclare son ami. Il prend la pose du démocrate soucieux du droit des peuples dans le seul but de redorer son blason terni alors que la France a été pendant des années un des principaux vendeurs d’armes au dictateur. Comment croire ces déclarations d’intentions hypocrites comme celles de l’ONU ? Comment faire confiance, pour garantir le droit des peuples, aux vieilles puissances coloniales, à celles qui ont soutenu pendant des années le dictateur ? Comment les croire quand elles invoquent la démocratie et le droit des peuples ? N’est-ce pas le même discours qui a justifié la guerre contre l’Irak ou en Afghanistan ? Le mensonge est usé jusqu’à la corde. Même au sein du Conseil de sécurité, il n’y a pas eu l’unanimité. L’Allemagne, le Brésil, la Russie, la Chine, l’Inde, ont refusé de soutenir la résolution défendue par la France et l’Angleterre. La Turquie a protesté, la Ligue arabe, appelée à donner sa caution, traîne des pieds. Pendant des semaines, les grandes puissances ont laissé les mains libres à Kadhafi pour réprimer, massacrer alors qu’il aurait fallu donner des armes aux insurgés, leur donner les moyens de résister, de renverser le dictateur. Mais ce n’est qu’après que ce dernier a repris l’initiative que la France, l’Angleterre, les USA ont décidé d’intervenir. Le général Carter Ham, commandant des forces américaines pour l’Afrique, a précisé : « Nous n’avons pas pour mission de soutenir les forces d’opposition si celles-ci s’engagent dans des opérations offensives. » Le soutien aux insurgés n’est pas leur but. Les USA dont la France joue les zélés petits soldats ont saisi l’opportunité ouverte par la guerre civile déclenchée par Kadhafi pour tenter de reprendre la main sur la Libye comme sur l’ensemble de la région où sont concentrées les plus grandes réserves pétrolières du monde. D’ailleurs, ni les grandes puissances ni l’ONU n’ont eu le moindre mot de protestation quand les troupes de la monarchie moyenâgeuse d’Arabie saoudite sont entrées au Bahreïn pour venir au secours du roi face à la contestation populaire. Il y a bien une offensive globale pour sauvegarder la stabilité de la région, canaliser, maîtriser le processus révolutionnaire, préserver les intérêts des groupes pétroliers et de ceux qui les servent, une offensive contre la révolte des travailleurs et des peuples. À l’annonce de l’intervention militaire, les insurgés de Benghazi se sont réjouis. Cette dernière contraignait les mercenaires de Kadhafi à relâcher leur pression, elle était pour eux un soulagement attendu. Un soulagement mais pour combien de temps et à quel prix ? Il y a tout lieu de penser que la guerre va durer. Juppé annonçait lundi que l’Otan était « disposée à venir en soutien » de la coalition internationale dans « quelques jours ». Les grandes puissances sont engagées dans une fuite en avant qu’elles ne contrôlent même pas. L’intervention en Libye est un moment d’une guerre globale, celle des USA et de leurs alliés pour la domination du monde, le contrôle des richesses énergétiques, une bataille dont les peuples sont les fantassins et les victimes. Solidarité internationalisteLa réponse, c’est celles des insurgés eux-mêmes, c’est la révolte des travailleurs et des peuples du monde arabe, c’est notre solidarité internationaliste contre le dictateur, contre notre propre impérialisme. Le fait que le Parti socialiste comme les Verts se soient ralliés sans hésitation à Sarkozy n’est qu’une lamentable démonstration de plus qu’ils ne sont en rien des opposants à la politique de la droite. Tout aussi lamentable est le ralliement à l’ONU de Jean-Luc Mélenchon au nom du « devoir de protéger » ! Non, cette guerre n’est pas la nôtre, ni celle du peuple libyen, loin de défendre le droit des peuples, elle le brise. L’avenir, ce sont les révolutions en cours qui le portent, les seules réponses concrètes aux conséquences dramatiques de la domination des classes impérialistes comme des dictateurs. Yvan Lemaitre
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