Publié le Lundi 8 juin 2020 à 17h06.

Division au sein de l’élite et bruits de bottes au Mexique

Le cyclone électoral qui a balayé la domination hégémonique des deux principaux partis bourgeois du Mexique – le « Révolutionnaire Institutionnel » (PRI) et l « Action Nationale » (PAN) – lors de l’élection présidentielles de juillet 2018, ne s’est pas éteint et même il est en train de retrouver une force renouvelée.

Bien que lors de ce processus électoral on ait de nouveau connu les mêmes mécanismes de fraude ( achat de votes et dizaines de candidats assassinés) qui avaient empêché la victoire de Cuauhtémoc Cardenas en 1988 et d’Andres Manuel Lopez Obrador (AMLO) en 2006, l’énorme mécontentement contre la corruption, le manque de démocratie et la misère engendrée par plus de 30 ans de néolibéralisme a apporté plus de 30 millions de votes au candidat vainqueur, soit 53% du total. Il ne s’agit pas, comme le dit un secteur de la gauche mexicaine, d’une manœuvre de palais pour que rien ne change, il s’agit d’un authentique mécontentement populaire qui, si le résultat des urnes n’avait pas été respecté, aurait déclenché une irruption violente des masses capable de détruire l’ordre établi. Lopez Obrador n’était pas le candidat d’une oligarchie de classe et raciste – qui l’a toujours vu comme un parvenu dérangeant – mais une couleuvre qu’elle a du avaler pour éviter le pire. Face à l’évidente agonie du régime autoritaire et semi-dictatorial du PRI-PAN, il y a eu un secteur – avec à sa tête Alfonso Romo et, dans une moindre mesure, Carlos Slim, Salinas Pliego et Televisa qui ont opté pour lui octroyer un appui discret, à l’inverse du secteur majoritaire qui a décidé de l’affronter.

Division parmi l’élite 

Cette division vient de loin. Certains secteurs de l’oligarchie coïncident avec le courant d’économistes, parmi lesquels on trouve Joseph Stiglitz, Paul Krugman ou Jeffrey Sachs, qui soutiennent que le néolibéralisme orthodoxe n’est plus viable et demandent des ajustements du modèle. De plus ces secteurs se sentaient de plus en plus gênés de soutenir un régime autoritaire, corrompu, lié au narco trafic et qui protégeait des secteurs bourgeois arrivistes ou charognards qui leur faisaient concurrence, même s’ils continuaient à avoir des affaires en commun avec eux. Face à eux se trouvent d’autres secteurs oligarchiques fortement dépendants de leur relation avec l’Etat, qui sont les plus conservateurs (patriarcaux, homophobes, racistes et de classe) et néolibéraux orthodoxes qui continuent d’être de farouches opposants du gouvernement d’AMLO. Cette division au sein d’une oligarchie qui avait été solidement unie pendant des décades, annonçait des différents importants avec le gouvernement à venir.

Les désaccords entre l’ensemble de l’oligarchie et Lopez Obrador ne se situent pas sur la continuité du capitalisme. Le gouvernement de Lopez Obrador est sans aucun doute un gouvernement bourgeois. Mais il reflète également des différences centrales à propos du rôle que doit jouer l’Etat comme régulateur de la politique économique. Ces différences se sont aiguisées pendant la pandémie du Covid-19. Alors que les organismes de la représentation patronale espéraient la déclaration d’un état de contingence sanitaire qui n’aurait obligé, à titre d’indemnisation, la partie patronale à ne payer qu’un salaire minimum par jour jusqu’à un mois, le gouvernement fédéral a décrété un état d’urgence sanitaire qui garantit le paiement intégral des salaires et prestations. Le plus conflictuel a été l’exigence patronale de solliciter une augmentation de la dette publique pour subventionner le paiement des impôts ou pour les sauver face à de possibles faillites, comme ils en avaient l’habitude sous l’ancien régime. On ne leur a concédé aucun de ces privilèges et, au contraire, on a continué les dépenses en assistance sociale et canalisé les ressources vers les petits et moyens entrepreneurs.

Il y a d’autres  thèmes sur lesquels l’élite et le gouvernement de Lopez Obrador se sont affrontés. Je vais mentionner les plus importantes : l’arrêt de la construction de l’aéroport sur le lac de Texcoco (aire du grand Mexico, ndt), en raison de son caractère anti écologique et de marché corrompu, l’annulation de la mal nommée « Réforme éducative », contraire aux intérêts du professorat et ouvrant la voie à la privatisation de l’enseignement public, l’abandon de la construction de l’usine de brasserie de Constellation Brands dans la ville de Mexicali, Basse Californie (état mexicain, ndt), en respect d’une consultation populaire, parce qu’elle menaçait l’approvisionnement en eau une ville qui se trouve en zone semi-désertique, la récupération de la souveraineté énergétique avec la construction d’une nouvelle raffinerie et la reconfiguration et modernisation des cinq raffineries existantes, dans le domaine électrique on a établi un nouveau cadre de production qui annule les privilèges des entreprises génératrices d’énergie photovoltaïques et éoliennes qui ont amené les entreprises transnationales, en particulier Iberdrola, à pousser de hauts cris, les dénonciations continuelles sur la corruption des gouvernements néolibéraux qui pourtant, si elles ont attrapé quelques gros poissons, sont encore très loin d’amener devant les tribunaux et de saisir les biens de tous ceux qui ont mis la nation à sac.

Cet aspect progressiste de la politique d’Obrador entre en contraste avec d’autres qui réaffirment la continuité des politiques néolibérales comme celle de maintenir et renforcer l’accord commercial avec les Etats-Unis et le Canada (T-MEC), celle d’impulser des méga projets (train Maya et celui qui traverse l’Isthme de Tehuantepec) qui, même si ils pourraient être d’importants leviers pour le développement de ces régions appauvries et réduire drastiquement la consommation d’hydrocarbures, vont servir au développement du grand tourisme, prédateur, de parcs industriels et qui, plus grave, ont été approuvés au moyen de consultations simulées des peuples originaires. On n’envisage aucune sorte d’audit de la dette publique, on continue l’application d’une austérité draconienne qui a entraîné le licenciement de dizaines de milliers d’employés publics et limité la possibilité d’impulser le marché intérieur. Malgré la promesse de démilitarisation du pays, le gouvernement a été dépassé par l’augmentation de la violence criminelle et a décidé de prolonger la présence de l’armée dans les rues pour le restant du mandat présidentiel (2024, ndt) et sans créer d’ instances civiles ou humanitaires qui la surveillent ou l’évaluent. Le fait que son gouvernement se soit soumis à la politique migratoire de Trump est également très critiquable.

Bruit de bottes

C’est ce cadre qui explique l’offensive de l’extrême droite patronale contre le gouvernement de Lopez Obrador et pourquoi il existe une sérieuse préoccupation pour l’irruption de mouvements ayant un discours clairement putschiste. Malheureusement il y a au Mexique divers secteurs de la gauche radicale pour lesquels ce gouvernement est à l’égal du PRI ou du PAN et, en conséquence, ne voient aucun danger dans l’existence de forces putschistes.. Ils considèrent même que parler de « forces putschistes » n’est qu’un « phantasme » qui vise à protéger le gouvernement actuel de toute critique et à « diviser la gauche ».

Assurément la possibilité d’un coup d’état au Mexique n’est pas un danger immédiat. Surtout en raison de l’énorme popularité dont jouit encore Lopez Obrador, du discrédit des forces identifiées au PRI et au PAN et à l’absence d’une direction alternative qui les remplace. Mais cela ne veut pas dire que nous devons prendre à la légère les faits suivants :

Depuis le début de son mandat, le gouvernement de Lopez Obrador s’est heurté à une claire hostilité des moyens de communication et à des rumeurs sur la « nécessité » d’un coup d’état. Ces rumeurs provenaient même des milieux militaires. L’inquiétude était telle que le 15 juillet 2019, elle justifia un communiqué du Secrétariat de la défense nationale où on enjoignait les militaires à la retraite de s’abstenir de faire des commentaires contre le président et où on leur rappelait qu’ils restaient soumis à sa juridiction1

Le thème est monté d’un ton le 22 octobre de la même année quand le général de division en retraite, Carlos Gaytan Ochoa, a tenu un discours, en présence du Secrétaire (ministre, ndt) de la Défense, Luis Crescencio Sandoval, où il mettait en cause les décisions prises par le « commandant suprême » lors de l’opération ratée réalisée dans la ville de Culiacan, capitale de l’état de Sinaloa (affaire du fils du « chapo » « libéré » par les narcos, ndt) et où il critiquait la situation de « polarisation » dans laquelle se trouvait le pays.2

Le 4 novembre Obrador a qualifié d’imprudente et de peu mesurée la déclaration du général Carlos Gaytan Ochoa3.  Il a ensuite nié qu’il y ait les conditions pour la réalisation d’un coup d’état, tant qu’il compterait avec l’appui du peuple mexicain, peuple qui inclue les militaires, « cela bien que ce week-end il soit apparu qu’il y a des généraux insatisfaits du gouvernement actuel »

Celui qui de façon claire et ouverte, depuis les premiers jours du gouvernement actuel, incite l’armée à faire un coup d’état contre Lopez Obrador est Gilberto Lozano, le chef d’entreprise de la ville de Monterrey (la plus industrielle du pays) au Nuevo Leon. Le mardi 12 novembre 2019 celui qui est également leader du « Congreso Nacional Ciudadano » est venu dans la Septième Zone Militaire, située à Escobedo, Nuevo Leon, pour demander à l’armée d’effectuer un coup d’état pour sortir Andres Manuel Lopez Obrador de la présidence du Mexique4.

Gilbert Lozano, qu’on appelle déjà le « Bolsonaro du Mexique » n’est pas un lunatique. Il a été directeur de la multinationale mexicaine FEMSA et fondateur du Congreso Nacional Ciudadano qu’il présente comme une « organisation citoyenne apartidaire qui cherche à renverser le système politique mexicain pour aller vers un Mexique nouveau »

FEMSA, l’entreprise qu’il a dirigé, a son siège dans la capitale chef–lieu de l’état et est la principale entreprise d’embouteillage de Coca Cola dans le monde. La chaîne de boutiques self service OXXO appartient également à cette entreprise qui distribue différentes marques, dont Heineken.

Avec les fêtes de fin d’année et la pandémie du coronavirus une espèce de trêve s’est ouverte mais a peu duré. Le 15 avril le portail de la journaliste Carmen Aristegui a publié un éditorial du journal Financial Times, porte-parole de l’oligarchie britannique, qui avertit que « de plus en plus de voix parmi l’élite du Mexique parlent d’une tragédie qui s’annonce. Les leaders patronaux ont proposé une alternative au plan de réponse au virus » et se plaint du fait que « le leader du Mexique a écarté des emprunts supplémentaires, les exemptions d’impôts ou les sauvetages d’entreprises… »5

Le 20 avril dernier est apparue sur les réseaux sociaux une fuite où un journaliste connu, Pedro Ferriz de Con, révèle son plan pour « renverser » AMLO. Plusieurs voix se sont élevées pour critiquer la position du journaliste détracteur de la Quatrième Transformation (« quatrième transformation du Mexique » expression utilisée par AMLO pour caractériser son projet, ndt)6

Plus récemment, le samedi 9 mai, un autre chef d’entreprise de premier plan a fait irruption dans les réseaux sociaux contre le gouvernement de Lopez Obrador sur un ton qui frôlait la conspiration ouverte. La gravité du fait a mérité un éditorial du journal La Jornada (11 mai) titré « Martin Bringas : putschisme inadmissible », dont je reproduis le premier paragraphe : « le chef d’entreprise Pedro Luis Martin Bringas, actionnaire du groupe Soriana, a annoncé samedi dernier dans un message vidéo diffusé sur les réseaux sociaux qu’il assumait la direction d’un Front National anti-AMLO (Frenaaa), groupe irrégulier composé de certains industriels d’extrême droite parmi lesquels se détache Gilberto Lozano, ancien haut fonctionnaire du Secrétariat de gouvernement (équivalent cabinet de premier ministre, ndt) et ex-directeur de FEMSA (Coca Cola). La famille Martin Bringas possède une fortune estimée par la revue Forbes à 3 200 millions de dollars. Dans son allocution Martin Bringas a déclaré que le but du groupe en question est de faire sortir de sa charge le président Andres Manuel Lopez Obrador avant le premier décembre prochain7.

Des intellectuels liés au mouvement dirigé par l’Ejercito Zapatista de Liberacion Naciolan (EZLN), comme Carlos Antonio Aguirre Rojas et Gilberto Lopez y Rivas, qui qualifient également le gouvernement d’Obrador de semblable à ceux du PRI et du PAN, conviennent également qu’un « coup d’état mou » est en train de se préparer8.

Reconnaitre l’existence de ces forces putschistes ne signifie en aucun cas que nous devons nous « aligner » sur le gouvernement de Lopez Obrador, mais oui nous oblige à effectuer un examen plus mesuré de ces contradictions et à être en capacité d’anticiper pour qu’une future crise politique ne débouche pas sur un authentique coup d’état « dur » ou « mou », comme il est advenu dans des pays frères d’Amérique du Sud.

Lopez Obrador et la classe ouvrière

Au sein du faible et fragmenté syndicalisme démocratique on avait le grand espoir que l’arrivée du nouveau gouvernement servirait à démanteler les vieilles structures corporatistes et corrompues qui gardent le contrôle sur le gros de la classe ouvrière et à renverser les réformes néolibérales en matière de droit du travail. Ce contrôle corporatiste est la clé qui explique la relative stabilité du régime issu de la Révolution Mexicaine de 1910.

Ci-dessous nous ferons un rapide examen de la politique d’Obrador dans le domaine du travail.

Du côté positif on a la reconnaissance de la convention 98 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT) relative au droit à la syndicalisation et au contrat collectif et on une réforme du droit du travail qui, bien qu’elle introduise de sévères contrôles sur la vie interne des organisations syndicales, impulse l’élection de leurs directions par le vote libre, direct et secret. Cette réforme oblige les directions syndicales à rendre précisément compte de la gestion des cotisations et de la négociation des contrats collectifs de travail, elle bloque l’existence de contrats collectifs de protection patronale, rend transparent l’enregistrement des organisations syndicales et des conventions collectives de travail en les rendant publics, elle permet une plus grande liberté syndicale en reconnaissant l’existence de plus d’une organisation syndicale dans chaque entreprise (bien que ceci constitue une arme à double tranchant) et l’annulation déjà citée de la réforme éducative.

Lors des deux dernières années les salaires minimaux généraux ont augmenté de 39,45% et 110% dans la zone frontière du nord, mais cet acquis n’a pas été étendu aux salaires contractuels. On a instauré une rente de base pour les adultes de plus de 68 ans et 65 ans pour les groupes indigènes (1275 pesos mensuels) et un programme de formation pour les jeunes de 18 à 29 ans qui n’étudient pas et ne travaillent pas dans des entreprises, des ateliers ou commerce avec une allocation mensuelle de 3748 pesos et avec une assurance médicale contre les maladies, pour la maternité et les accidents de travail. Le problème est que ce programme est monopolisé par les grandes entreprises qui obtiennent ainsi une main d’œuvre gratuite et n’accordent aucune garantie d’emploi permanent.

Du côté négatif nous constatons que les maximum salariaux sont maintenus dans les révisions contractuelles, qu’aucune réforme législative n’a été engagée pour bannir la sous- traitance et autres formes perverses de contrat de travail, ces formes persistent même au sein de l’administration publique.

Face à la crise des « Afores » (système privé de retraites copié sur le modèle failli de la dictature chilienne), crée dans la période néolibérale, Obrador n’a pas encore clairement dit quelle était sa proposition pour garantir une vieillesse digne aux nouvelles générations. Ce dont nous avons besoin c’est d’un abandon complet de ce système et le retour à un système solidaire avec le contrôle des travailleurs sur leurs fonds de pension et d’effectuer un audit sur sa mauvaise gestion.

Bien que la réforme du code du travail favorise l’épuration et la démocratisation des organisations syndicales, on n’a pas pu atteindre cet objectif à cause de l’extrême faiblesse, fragmentation et sectarisme de branche du syndicalisme indépendant et les travailleurs qui sont sous le joug du corporatisme ne sont pas encore à même de récupérer leurs organisations syndicales. Au Mexique, c’est à peine 3% de la classe ouvrière qui a des syndicats authentiques, les syndicats bureaucratiques en représentent 8% et donc près de 90% des travailleurs n’ont aucune organisation syndicale ou appartiennent encore à des syndicats patronaux. Dans la tâche de réorganiser la classe ouvrière de façon indépendante et démocratique avec un programme de classe, il faut souligner l’effort de la Nueva Central de Trabajadores (NCT). Notons que le gouvernement de Lopez Obrador a refusé de se réunir avec les directions syndicales démocratiques, chose qu’il par contre faite avec le syndicalisme « charro » (« jaune » ndt).

Comment devons nous nous positionner face au gouvernement de Lopez Obrador ?

Convenir de la caractérisation du gouvernement de Lopez Obrador comme un gouvernement bourgeois est important mais complètement insuffisant. Lopez Obrador, comme nous l’avons décrit précédemment, ce n’est pas la même chose que le PRI ou le PAN. Il ne se soumet pas aux diktats de l’oligarchie même s’il ne se risque pas à rompre avec elle. Pour enlever le pouvoir au vieux régime, il a du s’appuyer sur une intense mobilisation populaire et sur une alliance avec une fraction de la classe dominante. Cette origine confère à son gouvernement des traits d’un bonapartisme progressiste. Que voulons-nous dire par là ? Quand la classe dominante ne peut plus gouverner comme avant et la classe ouvrière n’a pas encore la conscience, l’organisation et la discipline pour se mettre à la tête de la nation, une troisième alternative apparaît, généralement concentrée sur une seule personne, qui se présente « au-dessus des classes sociales ». Depuis une perspective nationale, Lopez Obrador fait partie de ce vieux courant « nationaliste révolutionnaire » ou cardeniste (du président Lazaro Cardenas) qui essaie de rétablir un Etat-Providence sur des bases démocratiques et non-autoritaires.

C’est pour cette raison que nous pouvons, sans la moindre hésitation, revendiquer le fait de pouvoir coïncider avec certains points du programme démocratique-progressiste de Lopez Obrador, surtout quand il reprend les drapeaux que nous mouvements sociaux avons brandi pendant des dizaines d’années, même si nous sommes en désaccords et nous critiquons les inconséquences et les limites que nous avons mentionnées. L’essentiel est de nous maintenir en dehors des institutions et de défendre à toute force notre indépendance politique.

Un clair exemple de cette position est l’attitude du Sindicato Mexicano de Electricistas (SME) face à la réponse furieuse des multinationales photovoltaïques et éoliennes à la perte de leurs contrats léonins avec la Comision Federal de Electricidad (CFE, entreprise génératrice et distributrice d’électricité, en conflit depuis des années avec le SME, ndt). Devait-il appuyer cette mesure ? Bien entendu, mais en insistant sur la nécessaire renationalisation du secteur électrique et la solution de son conflit avec la CFE et l’Etat. Cette position n’a en rien réduit l’autonomie envers le gouvernement de cette organisation syndicale combative

Nous ne devons pas fermer les yeux devant l’émergence de forces d’extrême-droite ou penser que cela est « un problème de Lopez Obrador ». Si ces forces parviennent à démettre du pouvoir Lopez Obrador lors du référendum révocatoire de l’année qui vient, elles se trouveraient très bien placées pour accéder au pouvoir et cela signifierait un coup très dur pour tous les mouvements sociaux et un recul historique. L’extrême droite aussi est notre ennemi et, dans le cas d’une crise politique majeure, il sera nécessaire de recourir à l’unité d’action de toutes les forces démocratiques pour la vaincre.

Impulser la construction d’un pôle social indépendant

Nous avons encore du temps pour éviter un scenario politique tragique. Nous devons profiter des nouvelles conditions pour organiser les travailleurs actuellement inorganisés, pour récupérer les syndicats actuellement contrôlés par le syndicalisme jaune et unifier le syndicalisme démocratique et indépendant. Des processus semblables doivent se développer dans les campagnes et dans les organisations sociales les plus diverses. Sans sectarisme et en partant du niveau actuel de conscience des masses, nous devons proposer un programme basé sur des idées-force pour empêcher que cette nouvelle crise affecte la classe travailleuse et faire que ce soient les riches qui assument le coût d’une crise provoquée par leur avarice :

Exiger un audit de la dette publique, réaliser une réforme fiscale progressive, une rente de base universelle, renationaliser les secteurs stratégiques de l’économie, exproprier la Banque.

Ce sont des propositions qui gagnent de plus en plus d’audience dans les secteurs universitaires et politiques et qui visent à la création d’un autre monde possible, à partir du moment et quand nous parviendrons à ce que ces idées soient assumées par la classe travailleuse.

Yautepec, Morelos, Mexique le 2 juin 2020