En Suisse aussi, les autorités renforcent les mesures liberticides, avec entre autres un texte de loi proposant une définition extensive et vague des « activités terroristes », recouvrant « les actions destinées à influencer ou à modifier l’ordre étatique ».
Depuis les années 1980, le néolibéralisme s’est imposé un peu partout autour du globe à la faveur de différentes crises et contre-révolutions. Pourtant loin de pacifier nos sociétés, le néolibéralisme et les politiques publiques qui l’incarnent prennent un caractère toujours plus autoritaire. Ce virage punitif répond à une montée de l’insécurité sociale provoquée par les politiques antisociales des gouvernements. En d’autres mots, les gouvernements néolibéraux ont orienté leurs politiques pour organiser une gestion répressive de la pauvreté.
Pouvoir démesuré aux forces de police
La Suisse ne fait pas exception et a décidé d’opérer ce virage depuis quelques années. Ce processus de criminalisation de la pauvreté et du développement d’un appareil répressif s’est encore accéléré sous l’étendard de la lutte contre le terrorisme au niveau international depuis 2001.
Le 26 septembre dernier, en adoptant deux lois dites antiterroristes, le Parlement suisse s’est en effet doté de l’une des législations les plus sécuritaires d’Europe. Ces deux textes instaurent un État d’exception laissant une importante place à l’arbitraire et un pouvoir démesuré aux forces de police : de la création d’une catégorie de « terroriste potentiel » à la liberté pour chaque juridiction cantonale d’inscrire des organisations sur la liste des organisations dites terroristes, de la soustraction de toute une partie des mesures policières de lutte contre le terrorisme au contrôle du pouvoir judiciaire à la privation de liberté pour les enfants de 12 ans, etc.
Mais au-delà du non-respect de ce que d’aucuns appellent « l’État de droit », ces deux lois auront des conséquences politiques très inquiétantes. Elles ouvrent notamment la possibilité de légitimer et de développer une islamophobie d’État qui pourra s’appuyer sur des dispositifs légaux particulièrement pernicieux. La stigmatisation et la violation des droits des personnes musulmanes vont se renforcer en même temps que la criminalisation des organisations musulmanes et des mouvements de libération.
Surveillance et répression des militantEs
Ces lois permettront aussi, le cas échéant, d’étendre ce dispositif répressif à des organisations politiques contestant l’ordre social interne actuel. Avec ce corpus législatif, la surveillance et la répression des mouvements militants radicaux, des groupes politiques révolutionnaires et de toute organisation menaçant l’ordre établi seront très sérieusement renforcées.
Le projet de la bourgeoisie est clair : renforcer le dispositif répressif de l’État et le caractère autoritaire des politiques publiques afin de maintenir l’ordre social et économique en place.
Notre réponse se doit d’être à la hauteur de la violence de ce projet politique. Le premier pas dans cette direction est sans aucun doute l’élargissement du front référendaire contre ces lois antidémocratiques et répressives1. Une campagne de rejet de cette politique autoritaire doit pouvoir s’articuler autour de la défense d’un véritable espace démocratique, de revendications antiracistes conséquentes et de la dénonciation des politiques néolibérales. SolidaritéS a, à juste titre, rejoint ce référendum. Maintenant, nous devons construire cette lutte ensemble.
Publié dans le n° 379 de solidaritéS (Suisse)
- 1. Les opposantEs à ces lois liberticides récoltent actuellement des signatures pour organiser un référendum sur le sujet.