Reza Shahabi, figure emblématique du syndicalisme indépendant, a été libéré de prison. Il aura passé au total six ans et demi derrière les barreaux, dont 19 mois à l’isolement total, pendant lesquels il a subi de multiples sévices.
Dans la foulée, Reza et deux autres syndicalistes ont pu venir en Europe à l’invitation du collectif syndical français (CGT, CFDT, FSU, UNSA et Solidaires) qui les soutient depuis une dizaine d’années. Ils ont notamment rencontré des représentantEs du monde du travail à l’Organisation internationale du travail (OIT), ainsi des syndicalistes de Suède, de Norvège, du Royaume-Uni et d’Allemagne. Cette reconnaissance du mouvement syndical international devrait logiquement à l’avenir les protéger des formes les plus extrêmes de répression. Lors d’une réunion publique à Paris, dont la vidéo est disponible sur internet1, ils sont longuement revenus sur la situation syndicale en Iran. On trouvera ci-après un résumé de leurs réponses à quelques questions concernant la situation générale du pays.
« Nous allons continuer à nous organiser »
La population subit simultanément la répression du régime et les conséquences des sanctions économiques internationales. Cette situation existe en fait -depuis la fondation de la République -islamique d’Iran.
Si les avoirs iraniens à l’étranger étaient débloqués aujourd’hui, les classes populaires n’en bénéficieraient pas pour autant, et cela tant que le régime actuel sera au pouvoir : cet argent serait même utilisé contre la population et pour réprimer les luttes.
Après la signature de l’accord sur le nucléaire, des avoirs iraniens avaient été débloqués. Non seulement les classes populaires n’avaient rien touché, mais leur situation matérielle est devenue de plus en plus plus délicate.
La seule solution pour en finir avec la répression et les sanctions imposées par les puissances étrangères, c’est l’unité et la solidarité des salariéEs. C’est ainsi que les travailleurs et les travailleuses peuvent changer le monde et leur propre situation.
Malgré la répression, des organisations indépendantes de salariéEs ont pu se créer. Cela a aidé la population à prendre conscience de sa situation et à descendre dans la rue. Les femmes ont pu plus facilement se réunir, parler de leurs revendications et de leurs droits.
Malgré le prix que nous avons payé et que nous continuons à payer, nous allons continuer à nous organiser pour obtenir la satisfaction nos revendications, concernant l’emploi, la fin des discriminations, la liberté d’expression et d’organisation.
« Des potentialités pour que les salariéEs s’organisent »
Des milliers de mouvements sociaux ont lieu en Iran, et des organisations indépendantes de salariéEs ont été imposées au gouvernement. Des potentialités existent donc pour que les salariéEs s’organisent.
Mais des forces de répression puissantes sont à l’œuvre pour freiner et arrêter les luttes.
Nous avons le devoir de continuer à lutter pour améliorer le rapport des forces permettant de défendre les intérêts des exploitéEs et des oppriméEs.
C’est la solidarité de la classe ouvrière internationale avec notre lutte qui a permis que nous soyons autorisés à venir en Europe. Le pouvoir iranien avait besoin d’améliorer ses relations avec les pays européens. Il ne souhaite donc pas que soit utilisée contre lui son attitude répressive envers les salariéEs iraniens. Il veut notamment éviter de nouvelles manifestations devant les ambassades.
Si nous avons pu venir en Europe, c’est avant tout grâce à l’action menée par le collectif syndical français et les exiléEs iraniens et iraniennes.
Interventions recueillies par Dominique Lerouge