Il n’y a pas de mots pour qualifier la sauvagerie répressive de la junte militaire qui a pris le pouvoir en Birmanie. En deux mois, près de 500 morts. Cent morts pour la seule journée du samedi 27 mars. Des dizaines de villes du pays ne sont plus des lieux de manifestations mais des champs de bataille. La jeunesse étudiante et ouvrière s’est soulevée contre le putsch pour défendre les quelques droits démocratiques acquis depuis une dizaine d’années : légalisation des syndicats, droit du travail quelque peu protecteur (en particulier du travail des enfants), instauration d’un SMIC journalier (au montant certes dérisoire de 2,50 dollars).
Depuis 2016, l’ancienne opposante Aung San Suu Kyi (de la Ligue nationale pour la démocratie), dirigeait le gouvernement mais l’armée continuait à sévir. Le chef de la junte putschiste a orchestré en 2017 le massacre de la minorité Rohingyas, rasant des villages et poussant 800 000 personnes à l’exil vers le Bangladesh voisin.
L’ouverture démocratique, toute relative, a néanmoins vu affluer dans le pays des capitaux étrangers et une explosion industrielle : 140 000 salariéEs dans l’industrie textile en 2013 et 1,5 million aujourd’hui ; 900 millions de dollars de rentrées d’exportations textiles en 2012 et 5 milliards aujourd’hui. Ce sont des ouvrières très jeunes mais aussi des hospitalierEs, des cheminotEs, qui sont aux premiers rangs de ces manifestations et grèves de « désobéissance civile ».
En face, l’armée birmane garde ses positions fortes dans l’économie. Il y a aussi de nombreux patrons chinois. Mais le gros des commanditaires et clients – et profiteurs – sont de grandes enseignes internationales, dont européennes. Dont Total toujours présent – qui en 1995 recourait au travail forcé, sous contrôle de l’armée, pour la construction de ses pipe-lines.
Aux faits de guerre des putschistes birmans, les chefs des grandes puissances opposent des protestations platoniques. Ne parlons pas des dirigeants russes et chinois qui soutiennent l’armée birmane. Les uns et les autres, de toute façon, n’ont pour souci que la meilleure marche de leurs affaires.
Du côté des anticapitalistes révolutionnaires, c’est la question lancinante – dans cette arène mondialisée de la lutte de classe – de faire revivre une solidarité internationale active des travailleurEs.