Publié le Lundi 15 novembre 2021 à 14h46.

Nicaragua : « L’élite au pouvoir » et les élections de novembre 2021

Éléments d’analyse sur les dynamiques sociales et politiques au Nicaragua un mois avant les élections générales prévues le 7 novembre.

La nouvelle oligarchie et les membres du grand capital n’ont pas l’habitude de parler d’argent. Personne ne connaît donc l’ampleur exacte de leur empire économique. S’affirme ici la coïncidence entre l’ancienne et de la nouvelle oligarchie afin de dissimuler l’argent accumulé ces dernières années dans un réseau opaque de trusts et de sociétés qui opèrent à partir de paradis fiscaux (Dubaï, Îles Vierges, Grand Caïman, Panama, Belize, États-Unis, et bien d’autres encore). Cela démontre à quel point les pouvoirs nicaraguayens en place sont pourris et explique les machinations entre le grand capital et la dictature Ortega-Murillo. Ils établissent entre eux les rapports de forces politiques et économiques du pays.

Pacte entre régime et grand capital

Le pacte entre le régime et le grand capital a impliqué un transfert des « excédents » de capital de la sphère publique vers la sphère privée, ce qui, évidemment, n’a pas bénéficié en aucune mesure à la population la plus vulnérable ni aux salariéEs. Telle a été la recette de la politique économique mise en œuvre par le régime Ortega-Murillo : remettre les « excédents » générés par les travailleurs ruraux et urbains au capital privé, au capital international et à la nouvelle oligarchie qui s’est développée sous la protection du régime. En appauvrissant le peuple, les élites démontrent qu’elles comprennent, pratiquement, le concept de la lutte des classes. L’avilissement des plus pauvres, sous le règne d’une corruption politique multifacette, favorise le maintien au pouvoir des classes dominantes.

Pour rester au pouvoir, Ortega, dont le gouvernement fonctionne comme une kleptocratie, réprime les mouvements sociaux et les divers secteurs critiques à l’égard de son gouvernement. Des centaines de personnes « ordinaires » quittent le pays chaque jour. Parmi eux, des centaines d’adolescents et de femmes sont contraints de quitter le Nicaragua, où le gouvernement corrompu et dictatorial n’est pas en mesure de fournir les biens de première nécessité qu’exige la survie quotidienne.

Où ira le Nicaragua après la farce électorale de novembre 2021 ? Clairement vers le parti unique, où en plus du parti « orteguiste » existera un certain nombre de partis qui décorent le paysage politique, mais qui n’ont et n’auront aucune influence sur l’élaboration des politiques publiques. Et ils ne luttent pas – et ne lutteront pas – pour la libération des prisonniers politiques et pour le retour en sécurité des exiléEs.

Vaincre la dictature

Ceux qui vont participer avec Ortega à cette farce électorale sont des partis fabriqués par lui, ce sont des gens qui se prêtent à cet opéra-bouffe. Le régime leur promet, en échange de cette participation à ce cirque, de recevoir un ou deux sièges à l’Assemblée nationale et/ou quelques postes dans l’appareil d’État. Ortega obtiendra sûrement environ 70% des députés à l’Assemblée nationale ; le reste sera réparti entre les partis. Nous sommes confrontés à une dictature qui n’a pas de limites, qui ne se fixe aucune limite, ce qui la mènera, certes, à son propre désastre (avec le pays).

Dès lors, à plus ou moins court terme, nous devons élaborer une stratégie commune et, à moyen terme, construire un instrument de lutte unitaire, efficace, pour vaincre la dictature. La défaite politique de l’opposition formelle a ouvert un débat sur les leçons à tirer. Cela est positif. Nous avons besoin de nouvelles expériences de lutte pour faire émerger de nouvelles générations de militantEs qui puissent créer des brèches dans un espace politique qui semble aujourd’hui « saturé ». Il s’agit donc d’accumuler des forces pour les nouvelles batailles politiques qui nous attendent. Il est nécessaire que nous gardions des espaces politiques ouverts, même restreints, afin que nous puissions élaborer une stratégie unificatrice qui nous permettra de constituer les éléments d’un contre-pouvoir alternatif pour sortir de la dictature.