Publié le Lundi 11 mars 2013 à 14h18.

Palestine : la bataille des prisons

« Ne vous inquiétez pas si mon cœur cesse de battre , si je meurs c'est une victoire, si nous sommes libérés c'est une victoire, dans tous les cas j'aurai refusé de céder à l'occupation israélienne, à sa tyrannie et à son arrogance. » C'est par ces mots que Samir Issawi (FDLP), en grève de la faim, conclut sa dernière lettre. L'histoire de Samir est semblable à celle de milliers de jeunes Palestiniens qui sont nés et ont vécu toute leur vie sous l'occupation israélienne. Arrêté pour la première fois à 17 ans, il est condamné à deux ans de prison. Arrêté de nouveau pendant la 2e Intifada, il écope de 30 ans pour avoir résisté pendant l'opération Rempart de 2002. Libéré en décembre 2011 dans le cadre de l'échange négocié pour la libération du soldat Shalit, il est de nouveau arrêté le 7 juillet 2011, sous prétexte qu'il s'était éloigné de son lieu d'assignation à résidence, Jérusalem, alors qu'il se trouvait toujours sur le territoire de la municipalité de Jérusalem. Le 1er août 2012, Samir a commencé une grève de la faim, rejoint par Ayman Sharaweh (Hamas). Tous deux se trouvent maintenant dans un état critique, ce qui n'empêche pas le gouvernement israélien de continuer à s'acharner sur la famille de Samir. La maison de son frère a été démolie et deux de ses frères ont été arrêtés il y a quelques jours. Deux autres grévistes de la faim, Jaafar Izzedine et Tarek Qaadane, ont suspendu leur action en attendant la révision de leur cas qui doit être réexaminé le 8 mars. Accords violés par IsraëlUne longue grève de la faim des prisonniers en avril et mai 2012 avait abouti à un accord avec les autorités israéliennes, les revendications principales étant la fin de l'isolement, une forme de torture qui peut durer des années, et de la détention administrative, qui viole le droit international. Cet accord n'a pas été respecté, pas plus que celui sur le droit de visite. La détention administrative, qui permet d'emprisonner pendant des mois voire des années sans procès, est toujours allègrement pratiquée. Ayed Doudeen de Dora, près d'Hébron, a passé 8 ans en détention administrative. Finalement libéré, il a été arrêté de nouveau deux mois plus tard ! Il est maintenant en grève de la faim. Mort sous la tortureLe mouvement de solidarité avec les prisonniers, déjà important en Cisjordanie et à Gaza, a pris une nouvelle ampleur avec la mort sous la torture d'un jeune Palestinien de 30 ans, Arafat Jaradat. Arrêté lors d'une manifestation près de la colonie de Kyriat Arba à Hébron, les interrogatoires très musclés qu'il a subis pendant quatre jours ont abouti à son décès, que les autorités israéliennes ont essayé de faire passer pour un « malaise cardiaque ». L'autopsie a révélé que la « crise cardiaque » avait été causée par des tortures poussées trop loin. À Hébron, cette mort s'ajoute au ras-le-bol de la population confrontée à la colonisation à l'intérieur même de cette ville palestinienne, avec son grand marché dont presque toutes les boutiques ont dû fermer, son centre ville quadrillé et ses rues barrées. Les manifestations de protestation, pacifiques mais déterminées, à Hébron mais aussi à Ramallah et devant la prison d'Ofer, ont pris une telle ampleur que l'Autorité palestinienne a commencé à émettre quelques bruits, parlant de « provocation » au sujet de la mort d'Arafat Jaradat. D'autant que la perspective, évoquée par la presse, d'une 3e Intifada est tout aussi redoutable pour elle que pour Nethanyaou. Mireille Court