Dans la soirée du samedi 31 mai, Taksim, le centre-ville d’Istanbul, était encore une fois occupée par des dizaines de milliers de personnes. Mais à l’inverse de 2013, les occupants étaient cette fois-ci les forces de l’ordre... En effet, 25 000 policiers et 50 chars anti-émeutes ont été mobilisés par le gouvernement pour empêcher toute manifestation fêtant l’anniversaire de la révolte de Gezi.
Métro, bateaux, tramway, bus, tous les moyens pour accéder à Taksim ont été suspendus afin d’empêcher les citoyens de commémorer la mort de jeunes résistants ayant péri lors des assauts de la police durant cette révolte. Alors que les CRS constituaient des barricades aux entrées et sorties de chaque ruelle, des centaines de policiers en civil (au look soi-disant « résistant », avec chemise à carreaux, sac à dos, casquette… et matraque !) étaient présents tout au long de l’avenue débouchant sur la place Taksim, intervenant au moindre rassemblement et slogan. Résultat de cet État d’exception (qui dévoile toute la frayeur de l’AKP) en plein cœur d’Istanbul : 203 gardes à vue et une centaine de blessés. Les autres villes du pays, Ankara et Adana en tête, n’ont pas été épargnées par cette démonstration de force de la part du gouvernement. Un an après cette formidable révolte, s’il est bien question d’un affaiblissement de la vague de radicalisation, « l’esprit de Gezi » semble avoir prouvé qu’il était encore bien vivant dans la mémoire de l’AKP, hanté par l’idée d’un nouveau mouvement massif susceptible d’approfondir la brèche ouverte dans son hégémonie.
D’Istanbul, Uraz Aydin