Le rapport d’Amnesty international sur la France paru le 29 septembre est sans appel. Il dénonce, chiffres à l’appui, la violente répression policière et judiciaire déchaînée contre les gilets jaunes et de plus en plus souvent contre les journalistes témoins des faits. Il dénonce également les traitements inhumains et scandaleux subis par de nombreux réfugiés et migrants ainsi que par leurs soutiens. Et sans surprise la remise en cause de nos libertés.
Une répression rapide et de forte intensité!
Depuis l’irruption du mouvement des gilets jaunes, et d’après les chiffres officiels, 2945 manifestants auraient été blessés, dont 25 qui ont perdu un œil et 5 qui ont eu une main arrachée. Quant à Steve Maia Caniço et Zineb Redouane ils y ont laissé leur vie! Et pourtant, l’inspection générale de la police nationale (IGPN), saisie 313 fois pour des faits avérés de violences policières n’a reconnu qu’un seul policier «coupable d’usage illégal de la force»!
En 2018/2019, 40 000 personnes ont été condamnées «sur la base de lois vagues» utilisées «pour restreindre illégalement les droits à la liberté de réunion publique et à la liberté d‘expression». Le rapport met en cause «des infractions trop vagues et des sanctions disproportionnées». Par exemple en 2019, 1192 personnes condamnées autour des manifestations, l’ont été car soupçonnées «de participer à regroupement en vue de commettre des violences». C’est le délit fourre-tout, celui que la justice utilise en l’absence de preuves matérielles.
Faire peur pour l’exemple
L’objectif du gouvernement est de faire cesser tout mouvement revendicatif de rue, toute vague de contestation sociale d’ampleur. Alors il s’agit de dissuader les participants aux manifestations d’y aller en rendant celles ci dangereuses. Ensuite, il faut empêcher tout témoignage, tout récit autre que celui de la version officielle, à savoir celle des ministres de l’intérieur successifs «il n’y a pas de violences policières». Pour cela il faut réduire l’accès à l’information des journalistes travaillant sur le terrain. Pour la seule journée du 5 décembre, 34 journalistes ont été arrêtés, certains ont été blessés et/ou poursuivis pour outrage. Avec le floutage du visage des policiers qui devrait être autorisé, autant dire que les droits à être informés et à se défendre vont encore se compliquer singulièrement...
Le rapport dénonce aussi les armes de guerre utilisées en France, LBD, grenades, GLI-F4, dans le cadre du maintien de l’ordre, des pratiques inexistantes dans de nombreux autres pays de l’UE.
La barbarie contre les étrangers essayant d’entrer en France
Durant les 6 premiers mois de 2019, 33 628 étrangers cherchant un asile en France ont été interceptés aux frontières italiennes et espagnoles, empêchant le dépôt d’une demande de protection, comme le droit les y autorise! Ceux et celles qui accueillent, réchauffent, sauvent parfois des migrants, ont été l’objet de harcèlements policiers et parfois de poursuites judiciaires sévères tout au long des 3 dernières années. Le Refuge du col de l’Échelle a été détruit.
Les centres de rétention administrative (CRA) ont été largement utilisés comme des SAS vers le retour des personnes sans papiers quelque soit la situation dans leur pays d’origine.
Ainsi Amnesty a recensé en 2018, 690 Irakiens, 278 Afghans, 247 Soudanais, 165 Érythréens, 133 Syriens déboutés du droit d’asile et enfermés pour être renvoyés malgré les dangers encourus dans leur pays. Malgré leurs protestations, et les soutiens de citoyens scandalisés et d’associations, 12 sont repartis de force au Soudan, 7 en Iran, 10 en Irak. De plus, l’accord de coopération entre l’UE et l’Afghanistan a facilité aussi les renvois forcés d’Afghans plus nombreux.
Le rapport d’Amnesty met en avant que l’attitude de rejet des étrangers affirmée par les autorités permet la diffusion d’un racisme «populaire» et les crimes racistes. Il cite 38 crimes contre des R roms et leurs campements en région parisienne, une attaque de mosquée à Bayonne, et plus largement un harcèlement quotidien des populations arabes et noires.
MasquéEs mais pas baillonnéEs!
Enfin, le rapport rajoute que les libertés individuelles ont été réduites de manière drastique. Entre octobre 2018 et octobre 2019, 134 mesures de contrôles individuels, ont été créées, soit 84% de plus que l’année précédente. Par exemple, l’interdiction de quitter une ville ou de rencontrer certaines personnes, l’interdiction pour de longues durées de participation à des rassemblements, l’obligation d’aller pointer au commissariat tous les jours… Voire plusieurs fois par jour.
Le plus souvent ces mesures ne sanctionnent pas des faits mais des soupçons, c’est la présomption de culpabilité. Toutes ces mesures permettent de supprimer petit à petit les libertés d’aller et venir, la vie sociale, les droits de manifester, de se réunir…de vivre!
En conclusion, Amnesty signale que la pandémie a joué et jouera un rôle déterminant dans le contrôle et la réduction du droit de manifester.