En plus de l'absence des femmes dans la sélection pour la Palme d'Or (une seule sur 18 hommes), Cannes a été le festival des déclarations misogynes et des préjugés.François Ozon, réalisateur du film Jeune et Jolie, film racontant la vie d'une jeune fille de 17 ans qui se prostitue par « plaisir » a émis publiquement des propos réactionnaires. Pour lui, la prostitution serait un « fantasme » pour les femmes : « Je pense que vouloir être un objet sexuel, être désirée, être utilisée, est quelque chose de très courant. C’est le genre de passivité que les femmes recherchent ». Ces propos et ce film ont déclenchés de nombreuses réactions et ont contribué à un déferlement de sexisme dans les médias.Fantasmes réactionnairesLoin de s’intéresser aux causes de la prostitution étudiante, entre autres l'augmentation de la précarité et du coût de la vie, le film et ses critiques (dont l'écrasante majorité sont des hommes) préfère y voir l'éveil de la sexualité féminine comme ils le fantasment. Le physique de Marine Vatch, l'actrice principale, passe dans les médias comme le principal intérêt du film. Ainsi, l'Humanité se régale devant le soleil qui « brûle la peau appétissante de son corps idéalement bronzé » et le Figaro.fr regrette « Au-delà du sex-appeal de Marine Vatch […] une mise en scène finalement assez chaste ». Les films montrant une prostitution « propre », loin de la réalité, se sont aussi multipliés ces dernières années (Sleeping beauty, Elles…).Ce festival s'est terminé sur les propos du réalisateur au passé bien connu : Roman Polanski. Pour lui, l'égalité hommes/femmes est une « tendance idiote » et la pilule, qui est un acquis des luttes pour disposer de son corps, « chasse le romantisme » en « masculinisant » les femmes. Le « romantisme » incarne donc pour Polanski une vision traditionnelle de la femme-mère et féminine, celle qui s'occupe des enfants et de son mari à la maison et celle dont le corps sert à la procréation, à l'inverse de celui de Jeune et Jolie qui est exposé pour satisfaire à la fois les « pulsions sexuelles » des personnages masculins du film, et les fantasmes des spectateurs masculins…Jessica Ibre
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