C’est peu dire que le visage affiché en cette rentrée par l’économie de marché capitaliste est bien peu reluisant : un chômage de masse et inflation qui entraîne une explosion des prix, notamment dans des secteurs vitaux comme l’alimentation ou l’énergie.
Avec comme seule réponse du pouvoir quelques mesurettes (comme l’aide à la pompe ou le chèque alimentaire) et les leçons de morale de Macron pour gérer au mieux les pénuries énergétiques annoncées pour cet hiver…
Tout augmente… sauf nos revenus !
La litanie des chiffres pourrait donner le tournis si elle ne masquait pas des réalités si dramatiques pour notre camp social.
Selon les données de l’INSEE (estimation provisoire réalisée fin août), les prix à la consommation auraient augmenté dans leur ensemble de 5,8 % sur une année, + 0,4 % par rapport à juillet. Et dans ce cadre, l’augmentation du prix de l’énergie bat évidemment tous les records (+ 22 % sur une année).
Les entreprises prétendent que si leurs prix de vente augmentent, c’est parce qu’elles répercutent les hausses de coûts qu’elles subissent (hausse des prix de l’énergie, du coût des transports, etc.), mais à la vérité, pour nombre d’entre elles, l’augmentation des prix qu’elles fixent est bien plus importante que cette hausse de leurs coûts. Par là même, elles amplifient l’inflation réellement liée à la conjoncture (guerre en Ukraine, réduction importante des importations de gaz et de pétrole russes, hausse du prix des matières premières, etc.).
Dans le même temps, le pouvoir nous fait l’aumône… Nos revenus seraient, parait-il, à la hausse : + 3 % sur un an pour le salaire mensuel de base dans le secteur privé, + 3,5 % pour les fonctionnaires (avec des annonces tonitruantes dans certains secteurs, comme les enseignantEs dont les salaires vont être revalorisés à hauteur de + 10 %), + 4 % pour les pensions et prestations sociales… Outre que le compte n’y est pas par rapport à l’inflation subie, ce type de chiffrage lisse des réalités sociales bien différentes, souvent marquées par de grandes difficultés à boucler les fins de mois qui arrivent toujours de plus en plus tôt.
Défendre des mesures d’urgence anticapitalistes
Si pour celles et ceux d’en bas, rien ne va plus, ceux d’en haut s’en sortent, comme toujours... Ainsi les sociétés du CAC 40 ont réalisé l’année passée des profits records, dégageant un résultat net de près de 160 milliards d’euros (deux fois plus qu’en 2019, avant la pandémie…).
Dans la suite de ce qui se passe dans une partie des pays européens (à commencer par le Royaume-Uni), une partie de la gauche défend la taxation des « superprofits » comme première réponse. Cela peut sembler une évidence dans un contexte où une entreprise comme Total engrange plus de 6 milliards de dollars de profit sur le deuxième trimestre 2022. Mais qu’appelle-t-on un « superprofit » au juste ? Cela voudrait-il dire que les profits réalisés dans d’autres secteurs d’activité sont justifiés et qu’il ne faudrait pas les taxer davantage ? Pourtant, ils sont tout autant le produit de l’exploitation du travail qui va dans la poche des actionnaires… Comment alors juger qu’un profit serait « raisonnable » et que tel autre serait « excessif » ? Ce sont bien l’ensemble des profits, et au-delà les fortunes des actionnaires, qu’il faut taxer.
En rupture avec la doxa des capitalistes et des patrons, une autre répartition des richesses passe d’abord par une augmentation importante des revenus. Dans ce pays, le salaire moyen est de 2 330 euros par mois pour un temps plein, mais le revenu salarial moyen est de 1 200 euros net pour un employéE, 1 330 euros net pour un ouvrierE… Comment peut-on vivre aujourd’hui avec moins de 1 800 euros ? Cela devrait être le salaire minimum, et il faut en outre imposer une augmentation d’au moins 300 euros net mensuel. De plus, l’explosion actuelle de l’inflation nous rappelle qu’il ne suffit pas d’augmenter les salaires. Quand les prix montent, les revenus doivent augmenter en proportion, c’est l’échelle mobile des salaires. Il faut donc indexer les revenus sur les prix, une mesure vitale pour notre camp social.
Construire les mobilisations, reconstruire une alternative
Pour imposer de telles mesures d’urgence, il faut mener le combat. Dans un contexte où déjà quelques secteurs se sont mobilisés sur la question salariale (comme les salariéEs des transports en commun de différentes villes), la journée de grève interprofessionnelle du jeudi 29 septembre, à l’appel de la CGT, de Solidaires et de la FSU, peut être l’occasion d’une mobilisation massive du monde du travail. Le premier jalon d’une rentrée sociale anti-gouvernementale, antipatronale, qui pour cela ne doit donc pas rester sans lendemain.
Dans sa suite, la proposition, lancée par Jean-Luc Mélenchon, d’une « marche » – contre la vie chère et pour répondre aux urgences écologiques – est une bonne chose. Prévue possiblement pour la mi-octobre, elle ne peut être la simple démonstration de force de LFI ou de la Nupes, mais doit viser à rassembler dans l’unité l’ensemble de la gauche sociale et politique, syndicats, associations et organisations politiques réunies dans une nouvelle étape de mobilisation.
Au-delà, la faillite aux milles visages du capitalisme — en tant que système — sur les terrains écologiques, économiques ou sociaux, met l’ensemble du mouvement ouvrier et du mouvement social et leurs organisations face à de grandes responsabilités. Il y a urgence à sortir du train-train, à débattre stratégie, programme et organisation, et à regrouper les forces militantes, à commencer par celles et ceux qui défendent la transformation révolutionnaire de cette société ou qui voient LFI et l’Union populaire comme une rupture salutaire avec la vieille gauche de gouvernement. Ce sont les conditions indispensables pour construire la force politique, unitaire et anticapitaliste, dont nous avons besoin.