Publié le Jeudi 6 février 2014 à 08h56.

Droite : « Au secours, les socialistes m’ont volé mon programme ! »

François Hollande jubile : il a réussi à « trianguler » ! La triangulation, c’est la géniale tactique inventée par Anthony Giddens, conseiller de Tony Blair (Premier ministre britannique de 1997 à 2007), consistant à reprendre de larges pans du programme de ses adversaires pour mieux les mettre dans l’embarras...

En réalité, sur le fond, cela recouvre la transformation profonde de la vieille social-démocratie en un « social-libéralisme » menant une politique économique et sociale qui ne diffère plus en rien de celle de la droite. Exactement ce que fait le gouvernement Hollande-Ayrault.« Le chef de l’État a surtout réussi un certain coup de force : s’attirer à la fois les critiques des alliés de la majorité et des syndicats et le soutien d’une partie de l’opposition et du patronat », commentait l’Express au lendemain des déclarations présidentielles sur le « pacte de responsabilité ». De son côté, le Huffington Post estimait que « le nouveau cap fixé par l’Élysée rompt définitivement avec la gauche de la gauche en vue d’une future alliance avec le centre, au détriment de l’UMP de Jean-François Copé et de Nicolas Sarkozy ».CacophonieLa droite, prise à contre-pied, a réagi dans la plus grande dispersion. À l’UMP, Raffarin, Le Maire, Baroin ou encore Pécresse ont répondu « chiche », tout en émettant des doutes, à différents niveaux, quant à la capacité de Hollande à appliquer réellement son accord avec le Medef. Idem pour Bayrou du Modem et Borloo de l’UDI (« dans une opposition constructive »). Mais pas pour leur allié Morin, ni pour les principaux responsables de l’UMP.Copé (« c’est une grande mystification (…) un plan pour sauver les meubles avant les municipales (…) les Français ne sont pas dupes »), Fillon (« ce pacte n’est qu’un slogan, or l’urgence exige des actes »), ou encore Hortefeux, le représentant officieux de Sarkozy, ont tous crié à la supercherie. Ces derniers se sont essayé dans le même temps à la surenchère, sur la base du projet économique adopté par l’UMP en décembre 2013, qui prévoit entre autres la fin de la loi des 35 heures et la retraite à 65 ans.C’est l’ancien ministre du Budget, Woerth, qui a le mieux résumé le dilemme de ses amis politiques avec la boutade : « comme il [Hollande] vient de prendre sa carte à l’UMP, c’est forcement un peu compliqué ! » Il faut bien constater que les dénégations et surenchères de la droite sont peu crédibles. Car si Hollande et son gouvernement parviennent à imposer le pacte de responsabilité, après l’ANI, la réforme des retraites et le crédit d’impôt compétitivité, ils auraient fait plus pour le patronat et la contre-réforme néolibérale que Sarkozy durant tout le mandat précédent…Reste à la droite, plus que jamais en manque d’un projet alternatif, à surfer sur le rejet massif de la gestion Hollande-Ayrault, et à Sarkozy à préparer son retour d’homme supposément providentiel... Conforté dans sa dénonciation du « système UMPS », le FN se prépare à tirer les marrons du feu pour parvenir, enfin, à s’installer à l’intérieur des institutions.Force est de constater qu’une alternative basée sur les besoins, revendications et mobilisations des travailleurs apparaît dans cette situation bien lointaine, pour ne pas dire dépourvue de crédibilité. Ce qui n’est pas une raison pour ne pas s’y atteler dès à présent, pour commencer à changer la donne.Jean-Philippe Divès