Mardi 2 mai au soir, les représentantEs des quatre principales composantes de la Nupes (LFI, PS, EÉLV et PCF) se sont retrouvés à l’Assemblée nationale. Mais l’heure n’était pas vraiment à la fête, même d’anniversaire… En cause, des tensions sur l’avenir de ce qui reste largement une coalition électorale, pourtant en difficulté pour s’unir pour le prochain scrutin important, les élections européennes qui auront lieu dans un an.
«Il est passé une année entière depuis que nous avons créé la Nupes, bien sûr c’était difficile, bien sûr que ça le reste, bien sûr que c’est compliqué, et alors ? » Mélenchon a la réponse facile, mais un an à peine après sa création, le crash-test que constituent les élections européennes pourrait être fatal à la Nupes. Car à sa fondation, le programme devenu partagé, « l’Avenir en commun », avait opportunément laissé de côté la question européenne qui n’était pas à ce moment-là un enjeu de l’heure, mais qui surtout cristallisait les désaccords autour de la rupture nécessaire avec les traités capitalistes qui régissent l’Europe depuis sa fondation.
Rupture avec le projet social-libéral ou pas, il va falloir choisir
Le programme de la Nupes enregistrait d’ailleurs l’état des désaccords passés : « La France insoumise et le Parti communiste français sont héritiers du non de gauche au traité constitutionnel européen en 2005, le Parti socialiste est attaché à la construction européenne et ses acquis, dont il est un acteur clé, et Europe Écologie-Les Verts est historiquement favorable à la construction d’une Europe fédérale »... tout en affirmant la volonté commune de « faire bifurquer les politiques européennes vers la justice sociale, l’écologie, le progrès humain et le développement des services publics ». Et s’il est dit que l’application des mesures proposées nécessite bien « de renégocier les traités et les règles européennes actuelles », l’ambiguïté régnait, masquant assez mal les désaccords sous-jacents : « Du fait de nos histoires, nous parlons de désobéir pour les uns, de déroger de manière transitoire pour les autres, mais nous visons le même objectif »...
Il y a un an, la réussite électorale de la campagne de Mélenchon à l’élection présidentielle avait imposé à toute la gauche institutionnelle le leadership de LFI et de son orientation, y compris en construisant en deux semaines une alliance électorale pour les législatives. C’est largement ce leadership qui redevient aujourd’hui en dispute au sein de la Nupes, et derrière celui-ci la profondeur de la rupture (ou pas) avec le projet social-libéral hérité des tristes expériences passées de la gauche au pouvoir.
Projet social-fédéraliste d’EÉLV
La récente secrétaire nationale d’EÉLV, Marine Tondelier, entend bien profiter des élections européennes habituellement favorables aux écologistes et à leur projet social-fédéraliste pour rebattre les cartes en défendant une liste autonome. À la veille du 1er Mai, elle rappelle dans le JDD les divergences qui opposent EÉLV et LFI sur « des sujets qui sont loin d’être un détail » comme le « rapport à la Chine, l’Ukraine, la défense européenne, etc. » et ramasse ainsi les désaccords : « Face aux crises que nous traversons, nous pensons que l’Europe fait partie de la solution, pas du problème. » Tout cela en réaffirmant la nécessité d’une candidature commune de toute la gauche pour les prochaines présidentielles…
« Que fera et dira notre candidat commun à la présidence de la République sur la Chine, l’Ukraine, sur la défense européenne et même plus généralement au sein de l’Union européenne ? » En répondant à Marine Tondelier, l’eurodéputé LFI Manon Aubry met le doigt sur le problème, mais pour ensuite souligner les convergences EÉLV−LFI, notamment lors des votes au Parlement.
Pourtant, pour combattre l’austérité et les frontières et défendre une construction démocratique au service des peuples, l’unité ne peut se faire qu’en toute clarté : choisir de rompre avec l’Europe forteresse, celle des marchés et des banques.