Publié le Mercredi 29 juin 2022 à 08h23.

Face à Macron, aux capitalistes et à l’extrême droite : la riposte sociale et politique reste à construire !

Emmanuel Macron a donc annoncé qu’il « confirmait » la Première ministre Elizabeth Borne dans ses fonctions, malgré la claque reçue aux législatives et son absence de majorité à l’Assemblée. « La Première ministre a ma confiance pour mener l’action du gouvernement dans la durée pour notre pays », a ainsi expliqué Macron, ajoutant : « [Elle] me soumettra des propositions pour une feuille de route pour le gouvernement de la France sur les prochains mois et les prochaines années, et également pour la composition d’un nouveau gouvernement d’action au service de la France, que nous mettrons en place dans les premiers jours du mois de juillet. »

Rien de nouveau sous le soleil, en somme ? Pas complètement. Car si Macron et les siens font mine d’enjamber le résultat des législatives, répétant à l’envi que le président a été élu en avril sur un mandat et un programme et qu’il entend bien l’appliquer, les petits génies de la macronie savent bien qu’ils ne pourront pas obtenir de majorité au Parlement pour faire passer leurs contre-réformes s’ils n’arrivent pas à coopter, sinon d’autres courants politiques, du moins des fractions de ces courants. Les tractations vont bon train, qui ne nous intéressent guère on doit le dire, et on peut imaginer que le prochain gouvernement se voudra « d’ouverture », afin de contester, du moins symboliquement, l’idée selon laquelle le pouvoir exécutif serait minoritaire.

Monsieur 3,5 %

Nous sommes donc actuellement dans un entre-deux, mais un certain nombre d’indicateurs et de tendances sont là, qui nous permettent de comprendre ce à quoi nous allons devoir nous opposer. Les prétendues annonces « sociales » du gouvernement sont à ce titre exemplaires. Alors que les fins de mois commencent de plus en plus tôt, que la misère et la précarité explosent, que les salariéEs sont payés une misère alors que l’inflation fait flamber les prix, le pouvoir a annoncé coup sur coup un plafonnement de l’augmentation des loyers à 3,5 % et une revalorisation des salaires des fonctionnaires dans la même proportion.

Concernant les loyers, c’est au minimum un blocage qui serait nécessaire, et même une baisse significative, tant les prix ont augmenté ces dernières années. Comble de la provocation, Bruno Le Maire a annoncé que les APL seraient elles aussi revalorisées de 3,5 %, pour un coût de 168 millions d’euros. Comme si l’on avait oublié ce que rappelait la Fondation Abbé Pierre en janvier dernier : « En cinq ans, si l’on cumule les multiples baisses de l’Aide personnalisée au logement (APL) et la réduction du financement du logement social, ce sont plus de 15 milliards d’euros d’économies que l’État a faits au détriment du logement des plus faibles. »1

À propos des salaires des fonctionnaires, si l’on peut évidemment considérer que 3,5 % c’est toujours mieux qu’un maintien du gel du point d’indice, là encore on a l’impression que le gouvernement se fiche de nous. La CGT demandait ainsi une augmentation de 10 %, avec indexation sur l’inflation, ce qui est bien le minimum. Mais de ce minimum le gouvernement ne veut pas, qui tente de se donner un air « social » en pratiquant le saupoudrage tout en ne lâchant rien sur ses fondamentaux de droite : 3,5 % d’augmentation, c’est + 70 euros pour unE salariéE à 2 000 euros, soit même pas un plein d’essence, et sans indexation sur l’inflation, ce pas grand chose va rapidement devenir : rien.

Une riposte unitaire et radicale

On imagine donc sans peine que la loi dite « pouvoir d’achat » sera tout aussi misérable que l’ont été ces quelques annonces du gouvernement qui, dans le même temps, n’a absolument pas renoncé à ses projets de destruction sociale, qu’il s’agisse de la poursuite de la contre-réforme de l’assurance chômage, de la retraite à 65 ans ou de la saignée des services publics qui, à l’image de l’hôpital et de l’école, sont à l’agonie. Pour nos conditions de travail et nos conditions de vie, il va donc falloir se préparer à des combats d’ampleur, à une généralisation des mobilisations qui ont eu lieu ces derniers mois, sur les salaires, le logement, les services publics, etc.

Des batailles qui vont également être un premier test pour les éluEs de la Nupes, et notamment ceux incarnant une gauche de rupture avec le social-libéralisme. Leur élection et leur travail peut redonner confiance, encourager à surmonter la résignation, et même être un point d’appui pour les luttes. Mais cette élection ne peut, en soi, être une réponse aux problèmes d’ampleur qui se posent à notre camp social, pas plus que ne peut l’être une focalisation sur la « guérilla parlementaire » à venir. Face à Macron, aux capitalistes et à l’extrême droite qui menace, c’est un puissant rapport de forces qu’il va falloir construire, alliant unité et radicalité, appuyé sur les mobilisations et l’auto-organisation locales.

Il s’agit donc de préparer, dès aujourd’hui, cette riposte, sans se focaliser sur le jeu parlementaire et les intrigues de cour – et tout en combattant fermement ceux qui seraient tentés, à gauche, par toute forme d’« union nationale ». Une riposte unitaire et radicale donc, s’appuyant entre autres sur les dynamiques militantes qu’ont pu générer les campagnes d’une partie des candidatEs de la Nupes, afin de constituer ou de pérenniser des collectifs prêts à mener les bagarres à venir. Le tout en posant dans le paysage l’urgence de la constitution d’une force politique de rupture, anticapitaliste, indispensable pour faire face à l’extrême droite, pour nous représenter nous-mêmes et mener la bataille jusqu’au bout.

  • 1. « Et les autres ? », journal de la Fondation Abbé Pierre, janvier 2022.