Dans une interview au Journal du dimanche début mai, Hollande annonce que le « le retournement économique arrive ». Hollande a menti dès le départ de son septennat en nous disant que la finance était son ennemi et il ment aujourd’hui en parlant de retournement économique à seule fin de justifier le plan Valls.
En fait de retournement, comme les autres pays de la zone euro, la France est passée de la récession à une quasi-stagnation. En 2013, le produit intérieur brut (PIB qui mesure les ressources nouvelles créées au cours d’une année) a progressé de 0,3 %. Les prévisions gouvernementales françaises pour 2014 et 2015, pourtant poussives (1 % cette année, 1,7 % l’an prochain) sont jugées trop optimistes par les organismes internationaux (ODE, Commission européenne). Le début d’année 2014 n’est pas bon. Ainsi en mars, la production de l’industrie manufacturière française a reculé de 0,7 % par rapport au mois précédent. Le recul est patent pour presque tous les secteurs d’activité : métallurgie, chimie, pharmacie, automobile, agroalimentaire... La faible croissance se répercute sur le chômage : l’OCDE ne prévoit pas d’embellie sur le front de l’emploi avant fin 2015, et encore de manière « marginale ». D’ailleurs, le ministre du Travail, François Rebsamen, fait preuve de prudence : il s’est ainsi fixé mardi 13 mai l’objectif de passer sous la barre des trois millions de demandeurs d’emploi sans activité « vers la fin de ce quinquennat », contre 3,349 millions actuellement. Certes, la croissance n’est pas la solution à tous les maux. Si on prenait la transition écologique au sérieux, il y aurait d’autres moyens d’accroître à la fois l’emploi et la qualité de vie au travail et hors travail. Mais cela supposerait de rompre avec le capitalisme. Autant dire que ce n’est pas pour demain : dans l’immédiat, l’emploi dépend largement de la croissance. Il y a donc de quoi être pessimiste.
Vers de nouvelles mesures d’austéritéLes mesures annoncées par Valls auront dans les mois qui viennent un effet récessif supplémentaire. Avec une consommation des ménages en berne qui a reculé au 1er trimestre, l’austérité qui comprime la demande de l’État et des autres organismes publics, et une incertitude sur le commerce extérieur (la demande adressée à la France par les autres pays est aussi affectée par les politiques d’austérité ou bien par le taux de change de l’euro), on voit mal pourquoi les entreprises investiraient quand que le taux d’utilisation des capacités de production reste faible (inférieur à 80 %). Il est donc peu probable que les objectifs gouvernementaux de réduction des déficits publics puissent être tenus. La Commission européenne s’en inquiète d’ailleurs puisqu’elle prévoit un déficit public de la France en 2015 à 3,4 % du PIB au lieu des 3 % annoncés. De nouvelles mesures d’austérité sont donc vraisemblables, pesant sur les perspectives de croissance. Mais il faut bien comprendre que la politique de Valls-Hollande a d’autres objectifs que la croissance et la baisse du chômage. En prenant aux catégories populaires pour distribuer aux entreprises, il s’agit à terme d’essayer de faire redémarrer le capitalisme français avec un appareil productif remodelé, une protection sociale réduite et des salaires abaissés (dans l’industrie automobile américaine, les nouveaux embauchés gagnent un peu plus de la moitié des salariés plus anciens) tandis que les actionnaires continueront de se gaver. Dans son entretien au JDD, Hollande annonçait : « Clarté, visibilité et stabilité. Les Français connaissent l’histoire des trois prochaines années ». En réalité, sans craindre de se tromper, on peut dire que ce sera : « chômage, précarité et inégalités » enrobés dans le mensonge permanent.
Henri Wilno