Publié le Mercredi 6 décembre 2023 à 15h00.

Justice : sans surprise, Éric Dupond-Moretti blanchi !

La Cour de justice de la République (CJR) a encore redoublé d’imagination, sans doute après de sérieuses tractations en coulisses, pour sauver l’un des barons de la République. Cette fois, le ministre de la Justice est bien coupable mais comme il ne l’a pas fait exprès, il est relaxé !

 

Pour la première fois, un ministre de la Justice en exercice comparaissait devant la CJR, grâce à une plainte déposée par deux syndicats de la magistrature et l’association Anticor, pour une double prise illégale d’intérêts.

EDM reconnu coupable des faits

Il est accusé d’avoir utilisé des pouvoirs disciplinaires liés à sa fonction ministérielle pour régler leur compte à quatre juges qui s’étaient opposés à lui quand il était avocat. Et ce n’est sans doute pas anodin, trois étaient alors en fonction au Parquet national financier (PNF), qui réussit chaque année à récupérer le vol de 10 milliards de fraude fiscale, et l’autre était détaché à Monaco dans le cadre de l’anti­corruption... La CJR reconnaît que EDM a effectivement commis le délit de prise illégale d’intérêts dans les deux affaires et estime que « l’élément matériel est établi ». Dans le camp des justiciables, souvent maltraités par leur justice, on se reprend à espérer !

Mais il est innocent

On écoute médusé les avocats de la défense plaider l’innocence de leur client. Il était nouveau dans la fonction ministérielle, il n’avait pas pris la dimension de celle-ci, il ne savait pas gérer ses nouvelles prérogatives, mais surtout, surtout, il était très mal conseillé par tous les hauts fonctionnaires du ministère de la Justice qui l’entouraient. On se dit que c’est tellement gros, tellement impossible que ça ne va pas marcher. Comment un avocat, réputé brillant pénaliste depuis trente-cinq ans, une fois ministre pouvait-il ne pas reconnaître une prise illégale d’intérêts, comment pouvait-il n’être entouré que d’incapables, lesquels doivent quand même posséder quelques notions de droit constitutionnel (!), qui ne l’auraient pas alerté ? Mais ça marche, la CJR juge qu’« en l’absence d’élément intentionnel ces infractions reconnues matériellement ne sont pas constituées». Dit plus trivialement, il ne l’a pas fait exprès, il ne savait pas, donc EDM est relaxé !

Une fascisation rampante ?

Borne se réjouit de cette relaxe, Macron reçoit EDM l’après-midi même de sa sortie du tribunal. Leur tribunal d’exception a, une fois encore, bien fonctionné. Macron et ses sbires ne doutent pas qu’il en sera pareil pour Dussopt, ministre du Travail en exercice, assis aujourd’hui sur le « banc d’infamie ». Comme EÉLV et LFI, nous exigeons la suppression de la CJR. Au-delà, cette déliquescence d’en haut crée un ras-le-bol dans l’ensemble de la société, une défiance généralisée. À force de développer une justice de classe scandaleuse, de museler syndicats, associations, résistances, de faire dans le populisme en piétinant le pouvoir indépendant de la justice et en rassemblant tous les pouvoirs dans les mains de l’exécutif, il déploie le tapis rouge à l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite.