Retour sur la « convention de la Droite » organisée par Marion Maréchal et ses proches le 28 septembre. Nous ne nous appesantirons pas ici sur les immondes déclarations de Zemmour et consorts, mais davantage sur le sens et la portée de la démarche de Marion Maréchal.
Marion Maréchal (ex-Le Pen) est un caillou dans la chaussure du RN et de LR : populaire dans l'électorat de droite, toujours influente au RN (dans le sud-est et à Lyon notamment). Elle peut aussi compter sur des réseaux autour de l'Action française, dont plusieurs de ses proches sont issus, des Identitaires, et bien sûr de la Manif pour tous où elle est quasiment « en famille ». Enfin, elle électrise les cathos tradis à qui elle envoie des signaux très appuyés : déclarations anti-IVG, participations au pèlerinage de Chartres, affirmation des racines chrétiennes de la France, etc.
Quelle réserve électorale ?
Pour autant, même si elle a un fort potentiel médiatique, elle ne peut s'appuyer que sur un minuscule appareil : son école (l'ISSEP à Lyon) n'a scolarisé l'an dernier que 12 étudiants à temps plein et quelques dizaines en cours du soir. Les quelques structures qui la soutiennent sont confidentielles, et regroupent souvent les mêmes personnes. Elle a perdu son ancien bras droit Arnaud Stephan et elle s'est brouillée avec Patrick Buisson qui juge obsolète sa stratégie droite contre gauche, préférant désormais chercher « l'alliance des populistes ».
La « convention de la Droite » du 28 septembre s’est déroulée sans la participation d'aucun dirigeant du RN, sans dirigeant de LR et même sans Nicolas Dupont-Aignan ou Jean-Marie Le Pen. Cette réunion rassemblait un seul parlementaire LR (Xavier Breton, un des rares députés anti-mariage pour tous a avoir survécu à la vague Macron des législatives) et un seul parlementaire RN (l'électron libre Gilbert Collard).
Surtout, rien ne montre l'existence d'une « armée cachée » électorale pour cette droite radicale : en 2016, Jean-Frédéric Poisson, candidat de l'aile droite de LR, a fait seulement 1,5 % à la primaire, avant d’être battu dans sa circonscription des Yvelines aux législatives. Lors de ces dernières, les candidats de Sens commun, au programme similaire, ont tous lamentablement échoué à se faire élire. Enfin, lors des dernières européennes, les piteux 8,5% obtenus par François-Xavier Bellamy l'ont été sur une ligne politique libérale-conservatrice-catho très proche de celle de Marion Maréchal. La droite hors les murs est surtout une droite hors les urnes !
Avenir politique bloqué ?
La métapolitique pratiquée par Marion Maréchal et son équipe est aussi un bon moyen de ne pas affronter les urnes. Il n'est pas du tout certain que le RN aurait d'aussi bons résultats dans le bassin minier du Pas-de-Calais avec le discours libéral-catho de Marion Maréchal, sans parler de la bataille qui s'annonce sur les retraites où Marine Le Pen va jouer la carte du discours de défense des salariéEs comme elle l'a fait avec les Gilets jaunes.Si le principal problème de la droite classique est d'avoir perdu sa base populaire depuis 2012, ce n'est pas un discours ultra catho qui fera revenir ces électeurs perdus... Quant aux électeurs bourgeois de la droite, s'il peuvent apprécier les idées défendues par Marion Maréchal, ils votent désormais en masse pour le libéralisme macronien : le portefeuille avant les « valeurs »...
Marion Maréchal voudrait bien revenir en politique mais elle hésite : évincée de la direction du FN, son avenir politique est pour l'instant bloqué par Marine Le Pen. Il ne lui reste qu'à espérer l'éventuelle chute de sa tante d'ici 2022. De plus, la concurrence est rude avec Dupont-Aignan, Jean-Frédéric Poisson ou même Éric Zemmour, qui veulent tous jouer le premier rôle à la présidentielle de 2022 : plusieurs crocodiles pour un petit marigot.
Sans militants, sans base sociologique large et avec un programme qui sent bon l'eau bénite, Marion Maréchal a peu de chances de réussir. Certes, elle rêve d'être une version de droite de l'ascension de Macron, mais Macron avait derrière lui des secteurs clés du patronat, des banques et des médias… Une chose est certaine : en attendant un improbable « dépassement » du RN et de la droite, tout ce petit monde se retrouvera le 6 octobre à la manif contre la PMA.
Commission nationale antifasciste