« Depuis maintenant plusieurs mois nous constatons toutes et tous que le climat politique et social en France, comme partout en Europe et dans le monde est de plus en plus imprégné́ par l’extrême droite et ses idées. Face à ce climat de haine, raciste et attentatoire aux libertés individuelles et collectives, nous appelons à une réaction forte, unitaire et rassembleuse, pour réaffirmer notre combat commun contre l’extrême droite, ses idées, et toutes celles et ceux qui participent à sa propagation. » Ainsi débute l’appel unitaire « pour les libertés et contre les idées d’extrême droite » publié le 4 mai dernier, qui a abouti à l’organisation de la journée de mobilisation du samedi 12 juin.
À « front républicain » renversé
Incapable de gérer la crise sanitaire et ses dramatiques conséquences sociales, force est en effet de constater que le gouvernement a opéré un « tour de vis sécuritaire » supplémentaire en s’en prenant une fois de plus, avec le loi dite « sécurité globale », à nos droits et aux libertés démocratiques, dont la liberté de la presse. La loi dite « séparatisme » (rebaptisée « consolidant les principes républicains ») et le déchaînement de violences policières racistes contre les migrantEs et dans les quartiers populaires participent de la même tendance : le renforcement du cours autoritaire-raciste de la Macronie, qui ne se contente pas d’emprunter sa rhétorique à l’extrême droite mais met en œuvre des pans entiers de sa politique.
On le sait, la Macronie est en campagne pour 2022 et a décidé de se placer dans un tête-à-tête avec le Rassemblement national. Pour ce faire, députés et ministres LREM n’hésitent pas à reprendre à leur compte les thématiques de l’extrême droite, quitte à dénoncer, comme Gérald Darmanin, la « mollesse » de Marine Le Pen. Et c’est ainsi que se produit une reconfiguration du débat public et du champ politique, dont on mesure chaque jour la dangerosité, par laquelle, malgré les joutes médiatiques et les différences politiques, une nouvelle forme de « front républicain » semble se constituer. Un front renversé, pourrait-on dire, puisque l’on est passé en 20 ans du « front républicain » contre Le Pen (père) lors de la présidentielle de 2002 à un « front républicain » avec Le Pen (fille) contre les « séparatistes », « racialistes », « islamo-gauchistes » et autres ennemiEs de leur « république » raciste, autoritaire et antisociale.
Face à cette dangereuse reconfiguration, dont l’extrême droite est en réalité la principale bénéficiaire, il n’est certes pas trop tard, mais il y a urgence : à ne rien céder face à la déferlante en cours, à construire les nécessaires digues avec toutes celles et tous ceux qui ne se résignent pas face à la perspective du pire, à faire vivre les solidarités et la perspective d’un autre monde face au désastre en cours.