Publié le Jeudi 22 mars 2012 à 17h32.

« Nicolas Le Pen »

Dans sa chasse aux électeurs, le racisme omniprésent dans les arguments du président-candidat. Pour cela, il n’hésite pas à remettre en cause les accords de Schengen, lançant des ultimatums aux « États passoires », sans se préoccuper des contradictions avec son discours selon lequel il serait impossible de remettre en cause les traités européens. C’est sous le titre choc « Nicolas Le Pen » que le Wall Street Journal a rendu compte, le 13 mars, du discours de Sarkozy à Villepinte avec sa charge contre les « États passoires » qui laisseraient l’immigration déferler et menacer l’Europe, obligeant selon lui à réviser les accords de Schengen. Et d’ajouter : « Même selon les critères locaux, le récent accès de xénophobie du président français est d’un grand cynisme […] Le débat sur l’immigration est principalement une diversion vis-à-vis de l’anxiété des Français envers leur État-providence de plus en plus branlant ». De fait, le président-candidat a réussi à susciter l’opposition ou le malaise dans pratiquement tous les pays et chez la plupart de ses pairs. L’ancien Premier ministre belge et actuel président du groupe libéral et démocrate au Parlement européen, Guy Verhofstadt, s’est lui aussi demandé : « Qui est le candidat de l’extrême droite en France, Le Pen ou Sarkozy ? » PostureC’était évidemment l’effet recherché. Nul doute qu’il y ait dans l’attitude de Sarkozy et de ses partisans une forte dose de posture, de démagogie électoraliste. Pour espérer l’emporter, Sarkozy doit absolument gagner ou regagner des électeurs de Le Pen, au premier comme au second tour – et il s’emploie à la tâche par tous les moyens possibles, en flattant et alimentant les pires préjugés nationalistes et racistes. Nombre de commentateurs, notamment européens, signalent le caractère incongru de son « exigence » d’une réforme des accords de Schengen, alors qu’une proposition dans ce sens de la commission européenne est déjà en cours d’examen. Au-delà, une sortie de la France de Schengen demanderait une modification des traités européens, cela même que Sarkozy et l’UMP écartaient, car impossible par principe, à l’occasion du débat sur la « règle d’or » de super austérité dans l’Union européenne.

C’est du coup le PS qui est monté en première ligne pour défendre la convention de Schengen… De quoi s’agit-il exactement ? Institutionnalisé à l’échelle européenne par le traité d’Amsterdam de 1997, l’espace Schengen (qui réunit aujourd’hui 27 pays européens) institue un contrôle strict des entrées sur le territoire européen (« visas Schengen »), assorti de toute une série de contrôles et de mesures de coopération policière et judiciaire, en échange de la suppression des frontières et de la libre circulation des personnes à l’intérieur de ce même territoire ; libre circulation néanmoins souvent théorique, comme le montrent régulièrement les blocages aux frontières de manifestants ou encore le sort réservé, l’an dernier, aux malheureux réfugiés tunisiens. Toujours est-il que globalement, grâce au dispositif de Schengen, les capitaux et les marchandises entrent librement en Europe, mais pas les personnes. C’est un des fondements de la construction de cette Europe impérialiste, qui exploite les pays dépendants en s’appropriant à bas prix leurs matières premières, mais interdit son accès à leurs populations paupérisées ou les cantonnent dans la précarité et la misère. Politique racisteMais au-delà de la posture et de la course aux électeurs du FN, Sarkozy s’inscrit aussi dans la continuité de sa propre politique raciste, mise en œuvre par Besson et Hortefeux puis par Guéant. Une politique qui vise à diviser les opprimés en stigmatisant les plus vulnérables d’entre eux, comme hier les Roms ou aujourd’hui les musulmans à travers la honteuse polémique sur le halal. Selon ce discours bien rodé, le supposé (et nullement prouvé) « afflux » d’immigrés extra européens se ferait au détriment des salaires et de l’emploi des nationaux. Comme si le patronat avait besoin de l’immigration pour licencier, délocaliser (dans les pays d’où proviennent les mêmes immigrés…), bloquer les salaires et accroître les profits des actionnaires ! Contre l’Europe forteresseContre cette politique mais aussi contre Schengen, ses frontières et ses polices, plus généralement les institutions de l’Union européenne, nous défendons pour notre part la libre circulation et installation des travailleurs, la régularisation de tous les sans-papiers, l’égalité de tous les droits sociaux et politiques. C’est la seule voie permettant aux exploités de se battre, ensemble, pour arracher de meilleures conditions d’existence. C’est aussi un pilier central du combat pour une autre Europe, démocratique, des travailleurs et des peuples.

Jean-Philippe Divès