Toutes les affaires judiciaires auxquelles est mêlé à des degrés divers Nicolas Sarkozy ont un fort parfum d’argent. Le Monde en a recensé dix. Tout récemment (le 1er mars), il a été condamné à trois ans de prison, dont un ferme, dans l’affaire dite des « écoutes », qui vient elle-même après les soupçons liés à la « générosité » de la milliardaire Liliane Bettencourt, héritière de L’Oréal, dont auraient pu profiter les finances de la droite et du futur candidat à la présidentielle (dans cette affaire, Nicolas Sarkozy a bénéficié d’un non-lieu). Le 17 mars doit s’ouvrir le procès Bygmalion – soupçons de fausses factures au cours de la campagne de 2012, établies pour masquer un dépassement de 20,5 millions d’euros du seuil maximal (fixé à 22,5 millions d’euros). L’affaire des fonds libyens lors de la campagne électorale de 2007 montre quant à elle des connexions dont les conséquences ont été dramatiques.
On ne peut pas préjuger des suites que l’appareil judiciaire donnera à ces affaires. D’autant que Sarkozy, contrairement à un « Jojo avec un gilet jaune » (selon l’expression méprisante de Macron), que l’on peut condamner sans problème, a les moyens de mobiliser des avocats prompts à dénoncer tout ce qui pourrait passer pour des inégalités de procédure. Il a aussi table ouverte dans les grands médias souvent réceptifs à ses dénonciations des « juges politisés ». Ce qui provoque du mécontentement dans certaines rédactions, ainsi celle du Parisien a annoncé, le 2 mars, se « désolidariser » de l’éditorial écrit par son directeur, qui dénonçait la « sévérité accrue » et l’« intransigeance implacable » des juges.
On sait qu’après la condamnation, Darmanin a ouvertement exprimé sa solidarité avec Sarkozy. Plus gravement, ce dernier a bénéficié à de multiples reprises des faveurs et de la sollicitude d’Emmanuel Macron, qui n’a pas hésité à en faire son ambassadeur personnel dans plusieurs pays étrangers pour des événements officiels.
Tout cela n’est en fait pas nouveau et va au-delà de la personne de Sarkozy. Dans un discours prononcé le 8 février 1893, Jean Jaurès dénonçait déjà ce type de comportement des politiciens et le rattachait au système capitaliste lui-même : « … dans l’ordre social actuel, avec le tour nouveau qu’ont pris les entreprises et les affaires, le divorce grandissant de la propriété et du travail, il est impossible de discerner sûrement l’honnêteté et la malhonnêteté, l’entreprise loyale de l’escroquerie ; c’est que nous assistons à une sorte de décomposition sociale […], il ne suffit pas d’apporter de vagues protestations d’honnêteté […], ce n’est pas là un étroit procès instruit contre quelques hommes entre les murs étroits d’un prétoire ; c’est le procès de l’ordre social finissant qui est commencé, et nous sommes ici pour y substituer un ordre social plus juste. »