Publié le Mercredi 9 juillet 2025 à 08h00.

Unis pour la liberté de circulation et le droit des peuples

Le défilé militaire parisien du 14 juillet sera cette année marqué par des symboles particulièrement belliqueux. Des soldats de l’armée de terre ne vont pas défiler, comme c’est d’usage, en habits d’apparat, mais à titre exceptionnel en tenue de combat — casque sur la tête et gilet pare-balles sur les épaules.

Les soldats ne paraderont pas seulement à pied, mais à bord de leurs blindés, en configuration de mission (chars Leclerc, canons Caesar, blindés Scorpion…). Selon le ministère des Armées lui-même, il s’agit d’une « démonstration de force » pour exposer la « capacité de projection rapide d’une brigade complète, en état de combat »

Augmentation des dépenses militaires

Cette opération de communication participe d’une campagne nationaliste et atlantiste ainsi que d’une politique de militarisation austéritaire. Les membres de l’Otan se sont engagés à porter les dépenses de défense et de sécurité à hauteur de 5 % du PIB d’ici 2035 — ce qui se fera sur le dos des budgets des solidarités et des transformations écologiques. Ce n’est pas l’économie de guerre que certains voudraient ­enclencher, mais c’est un début. 

La vieille recette de l’union sacrée

Surtout, tout cela alimente une petite musique qui marche au pas, une atmosphère de guerre, ou du moins de menace de guerre, dont on connaît la fonction : essayer de gommer les conflictualités qui traversent la société par « l’union sacrée » au nom de la défense de la nation, obtenir un soutien populaire au gouvernement en place, non pour ce qu’il est, mais pour ce qu’il représente comme direction unique d’un pays menacé.

On comprend que Macron et Bayrou suivent cette pente tant leur légitimité est faible un an après l’échec de l’opération dissolution grâce au sursaut antifasciste du peuple de gauche. La promotion d’un esprit guerrier fait partie des conditions de la fascisation. La seule chose qui soit un peu rassurante dans la configuration actuelle c’est qu’aucun ennemi ne se dégage spécifiquement. Le discours ambiant est celui d’une menace diffuse et protéiforme, ce qui permet à la fois de l’entretenir à peu de frais et de l’alimenter à l’infini, mais limite aussi, dans l’immédiat, le déclenchement d’aventures militaires.

Mobilisation contre le racisme d’État et la fascisation

Cette normalisation de l’état de guerre, cette militarisation des états d’esprit soutient une politique raciste au sein même du territoire français — et d’abord dans ses colonies et à ses frontières. À Mayotte, on n’a toujours pas de bilan humain sérieux du cyclone Chido, qui a dévasté l’île en décembre 2024. À Calais, les gendarmes entrent désormais dans l’eau pour détruire les embarcations à coups de couteau, devant les caméras. Retailleau organise ses petites rafles entre deux grosses ­opérations fortement médiatisées. La police fait son travail de contrôles au faciès et de violences racistes, régulièrement encouragée par un système d’impunité bien huilé. Et chaque semaine l’islamophobie fait de nouvelles victimes de violences, pendant que le gouvernement multiplie les perquisitions arbitraires, les fermetures d’institutions, des persécutions qui ne disent pas leur nom et accompagnent néanmoins un mouvement de banalisation des violences racistes, notamment du racisme d’État. Les fermetures des frontières européennes, les contrôles dans les gares et les trains en France, tout cela laisse voir les vents mauvais qui soufflent sur l’Europe qui s’est dotée en 2024 d’un Nouveau pacte européen sur l’immigration et l’asile.

Alors le 14 Juillet, à Paris, nous ne serons pas au défilé nationaliste et guerrier. Nous soutenons au contraire la Marche des Solidarités, l’Intercollectif des sans-papiers, le Collectif des Jeunes du Parc de Belleville, Urgence Palestine, la coalition Guerre à la Guerre et toutes les associations qui appellent à une marche pour l’égalité, contre la guerre, le colonialisme et le militarisme, pour la fin immédiate du génocide à Gaza, contre les rafles policières, les contrôles au faciès, pour l’égalité des droits pour toutes et tous et la régularisation des sans-papiers, contre le racisme et pour l’abrogation de toutes les lois et circulaires racistes, toutes les lois islamophobes. Contre les frontières qui tuent, pour la liberté de circulation et la solidarité internationale.

Olivier Lek-Lafferrière